À force de tergiverser, Emmanuel Macron réussit à énerver

À force de tergiverser Emmanuel Macron russit à nerver
FRED DUFOUR / AFP

Emmanuel Macron tient son premier vrai meeting politique ce soir à Paris mais on ne sait toujours pas s’il veut être candidat à la présidentielle. Votre parti pris : si Macron veut être choisi, il doit apprendre à choisir ! Vous croyez qu’il hésite ?

Pas sur le fond : il ne fait pas tout ça pour être un deuxième couteau, ou même un premier lieutenant dans la campagne de François Hollande. Emmanuel Macron est persuadé qu’il ferait un meilleur candidat que lui. Donc s’il hésite, c’est sur le timing, la mise en scène, la meilleure façon de justifier une candidature sans que ce soit uniquement son ambition personnelle. Le résultat, c’est que ça fait à peine trois mois qu’il a créé son parti et il y a déjà une crispation chez ses adversaires et une lassitude chez ses partisans, à cause de ses petites phrases plus ou moins explicites, de ses critiques contre François Hollande (qu’en général il corrige tout de suite après)… À force de tergiverser, Emmanuel Macron prétendait innover. Il réussit surtout à… énerver.

Beaucoup de ses partisans annoncent son entrée en campagne à la fin de l’été. On a même entendu qu’il devait quitter le gouvernement cette semaine. Vous pensez qu’il devrait le faire maintenant ?

Si la démarche d’Emmanuel Macron vise réellement à rénover la politique, il ne peut pas continuer à tourner autour du pot. Ce dont la politique souffre le plus, c’est justement de ces hypocrisies tactiques et de ses faux-semblants tactiques. Si c’est pour y contribuer à son tour, quel intérêt ? Donc oui, s’il a un projet à porter devant les Français, qu’il le fasse. Mais on sent bien que son problème, c’est de justifier sa sortie du gouvernement alors qu’il n’a pas de désaccord politique avec François Hollande. Sans quoi, sa transgression aura l’air d’une trahison. Son mouvement s’appelle « En Marche »… pour l’instant, il n’a pas trouvé le moyen de descendre en marche !

Tout de même, est-ce qu’Emmanuel Macron n’est pas victime d’un certain corporatisme politique (et médiatique) ? En France, ceux qui veulent bousculer le jeu traditionnel des partis sont toujours critiqués… et à la fin, on a toujours les mêmes !

C’est vrai qu’il y a une tradition française qui confine à l’immobilisme. Un Nicolas Hulot, qui a des idées et qui est populaire, préfère renoncer parce que tout dans notre système est fait pour le dissuader. Dans le cas d’Emmanuel Macron, il faut relativiser. Il est lui-même un pur produit du système français : un haut-fonctionnaire nommé à des fonctions politiques très élevées sans jamais avoir été élu et un technocrate qui dit connaître les entreprises parce qu’il a travaillé deux ans dans une banque d’affaires. Il n’a pas à se plaindre du système... S’il veut porter une modernisation des pratiques, qu’il commence par lui-même. Emmanuel Macron a suscité une attente. Il ne peut plus y répondre par de l’attentisme.