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C’est un théâtre réinventé, avec un hall polyvalent et spectaculaire dévoilant le superbe gradin, des ouvertures nouvelles sur la ville, une coupole ouverte au public et une grande salle rééquipée, que nous allons redécouvrir.

Neuf. Il est comme neuf. Ni la façade, ni les toitures n’ont changé. D’ailleurs, elles sont inscrites au titre des Monuments historiques. Le Théâtre de la Ville donne toujours le sentiment d’être édifié en miroir du Théâtre du Châtelet. Mais dès que l’on pénètre à l’intérieur du bâtiment, on est saisi. Au-dessus d’un hall qui semble beaucoup plus vaste qu’auparavant, comme suspendue, impressionnante et aérienne, se déploie la coque de béton imaginée dans les années soixante par les regrettés Jean Perrottet (1925-2021) et Valentin Fabre (1927-2022), qui signèrent également et entre autres, Chaillot, Les Gémeaux, La Colline. Cette conque surplombante, c’est l’envers de la salle, l’envers des gradins ! La nouvelle équipe d’architectes, Marie-Agnès Blond et Stéphane Roux, en dialogue avec Emmanuel Demarcy-Mota et ses équipes, a rééclairé l’œuvre des prédécesseurs. Et aussi les feuilles d’or de François Morellet, que l’on voit mieux. Ainsi dégagé, le hall devient une agora. Ouvert sur la place arborée, il est en contact vivant avec l’animation de la ville.

Emmanuel Demarcy-Mota parle du nouvel âge du Théâtre de la Ville.

Les équipes du Théâtre de la Ville auront finalement passé sept ans à l’Espace Cardin. Une expérience laboratoire ?

E. D.-M. : Chacun a su rapidement trouver sa place. Entouré d’arbres, jouxtant les jardins des Champs-Élysées, nous avons pu réinventer le bâtiment de l’avenue Gabriel qui baigne dans une douceur certaine. Le travail sur les espaces extérieurs, l’aménagement de la véranda et des parkings à vélos, le calme à l’écart de la circulation, tout a nourri une atmosphère propice au travail et au partage, aux expérimentations nouvelles. Nous avons appris à organiser des événements en plein air, au printemps, en été comme à l’automne. Sept années, c’est le temps que nous avions passé avec notre troupe au centre dramatique de Reims. Un temps long de construction. L’Espace Cardin est devenu un lieu phare, un lieu d’expérimentation de tous les possibles, pour le travail avec les artistes et le public, comme pour les alliances qui ont vu le jour avec la science, la santé et la jeunesse.

Une page nouvelle de l’histoire du Théâtre de la Ville est en train de se construire ?

E. D.-M. : Pour l’avenir, dans ce théâtre à nouveau associé au nom de l’immense Sarah Bernhardt, nous avons le devoir d’honorer l’ambition des actes fondateurs, de 1862, de 1954, de 1968 et inventer le lieu d’art de demain, dans un souci profond de transmission et de création. Si le Théâtre de la Ville entre dans un nouvel âge, la société entière est entrée dans une nouvelle époque. Nous devons prendre en compte les enjeux d’au-jourd’hui et affirmer un théâtre pour le XXIe siècle. Un théâtre pluridisciplinaire à dimen-sion européenne, internationale, en écho au Théâtre des Nations, mais aussi porteur d’ambitions nouvelles. Nous devons réenchanter nos années 20 du XXIe siècle.

Quels changements majeurs attendent le public dans ce nouveau bâtiment ?

E. D.-M. : Il n’y avait pas eu de travaux d’envergure, au Théâtre de la Ville, depuis 1968. L’incendie de février 1982, qui avait touché le plateau et jusqu’à la toiture, avait conduit à de sérieuses interventions. Mais pour l’essentiel, tout était fatigué et ne répondait plus aux normes de sécurité. La réhabilitation technique a été complète, avec un cintre électronique, un plateau refait. Le bâtiment a été mis aux normes et nous avons souhaité aménager des ouvertures sur la ville. L’idée architecturale centrale déve-loppée avec Marie-Agnès Blond et Stéphane Roux a été de mettre en valeur le grand gradin de béton, tout en réouvrant totalement le hall, créant ainsi un nouvel espace. Celui-ci pourra accueillir des propositions artistiques, des répétitions, des bals, des rencontres et des débats. Nous lançons le projet du « hall connecté » permettant de relier les espaces les uns aux autres et de proposer des expériences culturelles mon-diales entre le réel et le virtuel, le rêve et la réalité. La « coupole », mythique lieu de répétitions et de créations, sera accessible aux publics. La grande salle entièrement rééquipée et rénovée, conserve quant à elle son atout majeur : le rapport unique entre la scène et la volée de sièges, sublime et vertigineuse à la fois.

Quelles lignes de force vous ont guidés ?

E. D.-M. : Le hall entièrement ouvert sur la ville permet d’inventer un nouveau projet relié à la place du Châtelet où nous pouvons affirmer notre idée d’un théâtre dans la ville. Ainsi, nous créerons des temps forts sur la place avec des artistes de toutes les disciplines, une agora en lien avec le théâtre. Les nouveaux espaces du théâtre permettront également de développer les passerelles avec les champs de l’éducation, de la santé, de la science, comme autant de lignes directrices. Le Théâtre de la Ville qui reprend, pour mieux éclairer son histoire, le nom de Sarah Bernhardt, n’oublie pas pour autant les explorations et recherches nouvelles en art comme dans tous les domaines. Ainsi, ce sont toutes les générations d’artistes qui seront réunies pour cette première saison. Au fil du temps, nous avons affermi la dimension européenne et internationale renouant ainsi avec les grandes heures du Théâtre des Nations, réunissant les « arts frères » : danse, théâtre, musique et tout ce que leurs intersections permettent d’inventer. L’affirmation de ce que nous avons appelé la Troupe de l’Imaginaire, née après l’expérience de la pandémie, où des artistes de toute génération travaillent à nos côtés autour de la poésie dans l’espace public et s’engagent ensemble dans un travail collectif que nous avons intitulé Tenir Paroles.

Aux côtés des nouvelles et nouveaux venus, nous retrouverons des artistes fidèles, en théâtre comme en danse, tels que Maguy Marin, Anne Teresa De Keersmaeker, Ivo van Hove, le Tanztheater de Wuppertal, Crystal Pite. Le spectacle pour tous les âges, qui occupe une part importante de notre projet, sera présent dans toutes les salles. Nous tenons à ce que les productions, plus spécialement adressées aux jeunes, soient de haute exigence, pensées par des artistes confirmés de toutes les disciplines, avec lesquels nous échangeons autour des enjeux de la création tout public. Ainsi par exemple Christophe Honoré créera-t-il aux Abbesses son tout premier spectacle pour la jeunesse. Une saison, c’est une effervescence en un mouvement puissant, des surprises, des reprises. Et puis quelques projets, comme de précieuses pépites… Le retour du Nederlands Dans Theater, présent lors de la première saison de l’histoire du Théâtre de la Ville en 1969 et qui revient avec un programme aussi audacieux qu’alors, en est une ; ou Romeo Castellucci dirigeant Isabelle Huppert dans la Bérénice de Racine. Hofesh Shechter, artiste associé, ouvrira en septembre à nos côtés le « Festival de la Place » et clôturera la saison en juillet avec sa création mondiale qui verra le jour au Théâtre de la Ville-Sarah Bernhardt.