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Pollution

La demande ralentit, mais le charbon ne s'avoue pas vaincu

La consommation mondiale de charbon va connaître un coup de frein jusqu'en 2021, mais ce combustible fossile très polluant a encore de beaux jours devant lui: il reste incontournable en Asie, nécessitant de développer des technologies pour le rendre plus propre, estime l'Agence internationale de l'énergie.

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La couverture du rapport de l'institut Climate Analytics sur les implications de l'accord de Paris sur l'utilisation du charbon dans le secteur de l'énergie

Le charbon représente aujourd'hui environ 30% de l'énergie mondiale.

©Climateanalytics.org

"En raison des implications pour la qualité de l'air et des émissions de carbone, le charbon est très critiqué ces dernières années, mais il est trop tôt pour affirmer que la fin du charbon est arrivée", résume Keisuke Sadamori, directeur de la division marchés et sécurité énergétiques de l'AIE, dans un communiqué publié par l'Agence internationale de l'énergie lundi 12 décembre 2016. La planète devrait consommer 5,6 milliards de tonnes de charbon en 2021, moins que l'estimation précédente de 5,8 milliards de tonnes, précise l'agence énergétique dans son rapport annuel sur le marché du charbon, publié un an après l'adoption de l'accord de Paris sur le climat.

30 % de l'énergie mondiale

Après avoir atteint 4% par an entre 2000 et 2013, la croissance de la demande mondiale va ainsi ralentir à une moyenne annuelle de 0,6% par an sur la période 2015-2021. Et la part relative du charbon dans la production d'électricité va diminuer de 41% (en 2014) à 36%, même si le monde n'a jamais brûlé autant de charbon depuis le début de la révolution industrielle. En effet, le charbon représente aujourd'hui environ 30% de l'énergie mondiale. Mais d'après cette étude, sa part devrait tomber à 27 % dès 2021. La tendance s'explique par une croissance économique globalement molle qui pèse sur la demande d'électricité, le développement des énergies renouvelables et une efficacité énergétique accrue dans le cadre des politiques déployées pour lutter contre le changement climatique. Elle est déjà enclenchée, avec une baisse de 2,7% à 5,4 milliards de tonnes en 2015, inédite depuis le début du nouveau millénaire en raison d'une baisse de régime en Chine et aux Etats-Unis. Mais il faudra attendre 2021 pour retrouver les niveaux de consommation de charbon de 2014. Et cette tendance cache toutefois des réalités géographiques différentes. L'Asie consomme de plus en plus de charbon - sa part dans la consommation mondiale est passée de 46% en 2000 à 73% en 2015 -, l'Europe (22 à 12%) et l'Amérique du Nord (25 à 10%) de moins en moins. "Ce glissement va s'accélérer au cours des prochaines années", de quoi compliquer les négociations sur les réductions des émissions de CO2, prédit l'AIE.

La colonne vertébrale du charbon

Outre-Atlantique, l'essor du gaz de schiste a supplanté le "roi charbon", si bien que la consommation de ce combustible y a chuté de 15% l'an dernier à 523 millions de tonnes. Le déclin devrait se poursuivre jusqu'à 475 Mt en 2021. Dans le même temps, l'Asie continuera à afficher un fort appétit, surtout l'Inde, le Japon, la Corée du Sud, le Vietnam et l'Indonésie. La Chine se montrera elle moins gourmande, du fait d'une économie davantage axée sur les services au détriment d'une industrie lourde très énergivore, mais elle demeurera le plus gros consommateur de charbon: elle pèsera près de 50% de la demande mondiale avec 2,8 milliards de tonnes en 2021, et 45% de la production.

Pourtant, un autre rapport de l'institut Climate Analytics, daté de novembre 2016, chiffre à 1082 le nombre de nouvelles centrales au charbon qui vont être construites dans le monde dans les prochaines années, totalisant une capacité de 596 Gigawatts "qui viendrait s'ajouter à la capacité actuelle déjà en surproduction des centrales actuellement en place", estime l'institut. Ces projets de construction, s'ils sont menés à leur terme, "verrouilleraient les infrastructures énergétiques de bien des pays dans l'option charbon pendant au moins 40 ans" poursuit l'institut. Car si les investisseurs prennent de plus en plus leurs distances avec le charbon, celui-ci n'en demeure pas moins la colonne vertébrale de la production d'électricité et industrielle dans de nombreux pays émergents - surtout en Asie du Sud et du Sud-Est - où la solide croissance économique s'accompagne d'une démographie grandissante et de problèmes d'approvisionnement électrique. 

C'est le paradoxe du charbon, relève l'AIE: une source d'énergie qui permet d'apporter une électricité "abordable et sûre" à des millions de personnes, mais qui noircit l'atmosphère en rejetant 45% des émissions mondiales de CO2 liées au secteur énergétique, auxquelles s'ajoutent autres gaz à effet de serre et particules fines. "C'est pourquoi nous devons trouver les moyens de rendre l'usage du charbon plus durable sur le plan environnemental en veillant à ce que tous les pays qui décident d'utiliser des centrales à charbon ne recourent qu'aux dernières technologies ultra-supercritiques et prévoient des systèmes de captage et stockage de CO2", insiste l'agence énergétique. Sans ces efforts, qui restent insuffisants aujourd'hui, atteindre l'objectif de l'accord de Paris de contenir le réchauffement climatique à 2 degrés est illusoire, prévient-elle.

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