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Liban : deux ans après l'explosion de Beyrouth, la population est toujours traumatisée

TÉMOIGNAGE - Il y a deux ans, la catastrophe avait fait plus de 200 morts et causé d'énormes dégâts dans la capitale où une crise économique et politique profonde affecte le quotidien des Libanais.

Le port de Beyrouth au Liban le 2 août 2022.
Le port de Beyrouth au Liban le 2 août 2022.
Crédit : IBRAHIM AMRO / AFP
Liban : deux ans après l'explosion de Beyrouth, la population est toujours traumatisée
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Monique Younès
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C'était il y a deux ans jour pour jour, le 4 août 2020 : l'explosion d'un hangar sur le port de Beyrouth au Liban. La catastrophe avait fait plus de 200 morts, près de 7.000 blessés et causé d'énormes dégâts dans la capitale. Le traumatisme reste toujours très présent dans le pays, amplifié par une crise économique et politique profonde. 

Les Libanais peinent à reconstruire les maisons détruites par le souffle. C'est le cas de la famille de Monique Younès, journaliste au service culture de RTL et originaire du Liban, qui préfère se réfugier à la montagne chez des proches en attendant des jours meilleurs car les prix ont été multipliés par dix, sinon plus. Il n’y a aucune aide de l’État. Pas d’assurance. Aucune indemnité. Même si certaines ONG ont aidé les familles les plus démunies. 

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Alors, pour bien comprendre la situation au Liban, Monique Younès donne l’exemple de sa tante, qui était enseignante. Elle touchait il y a deux ans une retraite mensuelle de 3 millions de livres libanaises, ce qui correspondait à 2.000 dollars, soit 1.800 euros. Aujourd’hui, à cause de l’inflation, ces 3 millions de livres libanaises ne valent plus que 100 dollars. Un plein d’essence, c’est 600.000 livres, un paquet de pain 30.000. 

La classe moyenne a disparu

Avant le drame, la plupart des familles de la classe moyenne employaient une domestique, une jeune africaine ou asiatique. Elle était payée en dollars, 300 par mois. Et malgré la dévaluation, son salaire par contrat était toujours 300 dollars, ce qui fait qu’elle gagne plus d'argent que sa patronne. Autant dire que tous les contrats ont été résiliés.
   
De plus, si vous n’avez pas un enfant, un oncle une sœur ou une cousine qui travaille à l’étranger et qui peut envoyer 200 euros par-ci, 500 euros par-là, vous êtes réduits à la mendicité. Beaucoup dépendent aujourd’hui des associations caritatives ou religieuses, d’ONG, ou pire, ils vivent aux crochets des partis politiques qui trouvent là l’occasion d’avoir encore plus la mainmise sur les citoyens, pour que le jour des votes, ils mettent le bon bulletin dans l’urne. 

Le Liban est un cas d'école tellement il cumule les faillites

Monique Younès, journaliste à RTL

La crise économique majeure est doublée de la faillite de l’état. Le Liban est aujourd’hui un cas d’école tellement il cumule les faillites : économique, humanitaire, politique, écologique, et migratoire. Il y a un million et demi de Syriens réfugiés au Liban. Depuis deux ans, le Liban n’a pas de gouvernement. L'État assure deux heures d'électricité par jour. 

L’enquête sur l’explosion du port de Beyrouth est au point mort. Le juge d’instruction a beau convoquer les ministres impliqués dans l’explosion, aucun ne répond aux convocations. Le juge reçoit même des menaces, tout comme les présidents des associations des victimes dont certains ont jeté l’éponge tellement ils ont eu peur pour leur sécurité et celle de leurs familles. 

Donc deux ans après la catastrophe qui a fait 215 morts, il n’y a ni coupable, ni responsable, et les 6.500 blessés n’ont eu aucune aide de l’État pour se faire soigner. La consultation chez le médecin c’est un million de livres libanaises.

Un système de santé défaillant

Les médicaments manquent ou sont à des prix exorbitants. Les personnes en France passent leur temps à chercher des amis qui vont au Liban pour leur confier des sacs de médicaments pour la famille. Quand c’est leur tour de voyager, l’essentiel de leurs bagages sont des médicaments. 

Concernant l'armée et la police, c’est aussi un cauchemar. La plupart des fonctionnaires se rendent à leur bureau deux jours par semaine, le reste du temps, ils travaillent au noir, comme maçon, garçon de café, employé d'épicerie, pour pouvoir survivre. Même les policiers sont obligés de faire ça. Les prisons sont aujourd’hui gardées par la moitié des effectifs.

Le pays de tous les paradoxes

Le Liban est le pays de tous les paradoxes. Il y a un deuxième Liban, une petite frange de la population ultra riche. Des hommes d’affaires dont les entreprises travaillent avec l’étranger, qui ont des comptes en banque à l’étranger et qui n’ont pas de problème de liquidité… Carlos Ghosn en fait partie. Des gens comme lui ne sentent pas la crise, vous pouvez le croiser dans des restaurants huppés à 150 dollars le couvert, il continue de mener grand train. 

Il y aussi les touristes qui viennent passer les vacances et fort de leurs dollars ou de leurs euros, dépensent à tout-va. Mais 98% de la population ne peut même pas retirer son argent de la banque, puisque les banques sont en faillite et donnent de l’argent au compte-goutte.

Ce jeudi après-midi, une grande manifestation va avoir lieu, comme celles qu'il y a eu après l’explosion, d'ailleurs tous les 4 du mois, les gens se rassemblent. Mais ça n’attire plus grand monde parce que les gens sont découragés, ils ont compris qu’ils ne sauront jamais la vérité sur la chaîne des corruptions, à l’origine de l’explosion.

À vrai dire, tout le monde est fatigué. Les gens passent leur temps à chercher le moyen de survivre. C’est épuisant. Tous ceux qui peuvent émigrer le font. Infirmières, médecins, ingénieurs, ils préfèrent être sous-payés en Europe ou aux États-Unis que de rester dans un pays où il n’y a plus aucun espoir. Il y a ceux qui étaient partis en Ukraine. Ceux-là ont vraiment bouclé la boucle de l’absurde. La nouvelle définition de l'avenir : on ne sait pas. 

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