Légale mais décriée : quatre questions sur la manifestation d'extrême droite qui a eu lieu samedi à Paris

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Légale mais décriée : quatre questions sur la manifestation d'extrême droite qui a eu lieu samedi à Paris

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Le 6 mai à Paris, des membres du groupe d'extrême droite ''Comité du 9 mai'' se sont réunis pour commémorer le 29e anniversaire de la mort de Sébastien Deyzieu.
Le 6 mai à Paris, des membres du groupe d'extrême droite ''Comité du 9 mai'' se sont réunis pour commémorer le 29e anniversaire de la mort de Sébastien Deyzieu.
© AFP - Adnan Farzat / NurPhoto

Autorisée par la préfecture de police, vilipendée par plusieurs élus de gauche, une manifestation de militants d'extrême droite a eu lieu samedi à Paris. Qui étaient les participants ? Pourquoi se sont-ils rassemblés ? Eléments de réponse.

C'est un rassemblement qui fait beaucoup réagir. Samedi, des militants d'ultradroite, environ 550 selon la préfecture de police de Paris, se sont réunis et ont manifesté dans le VIème arrondissement de la capitale. De nombreuses images et vidéos circulent depuis sur les réseaux sociaux. Ils célébraient le 29e anniversaire de la mort, en 1994, d'un militant d'extrême droite. Voici tout ce qu'il faut savoir sur cette manifestation.

Environ 550 militants d'extrême droite ont manifesté samedi dans les rues de Paris.
Environ 550 militants d'extrême droite ont manifesté samedi dans les rues de Paris.
© Radio France - Emmanuel DUNAND

Qui sont les militants qui ont manifesté samedi ?

Il s'agit de membres du groupe d'extrême droite "Comité du 9 mai". Ces manifestants, des jeunes hommes pour la plupart, habillés de noir et souvent masqués, exhibaient des drapeaux noirs marqués de la croix celtique et quelques fumigènes rouges. Ils sont restés silencieux, sauf pour clamer parfois le slogan du GUD : "Europe jeunesse révolution".

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Le Groupe Union Défense, une organisation principalement étudiante connue pour ses actions violentes, est née en 1968 à l'université parisienne d'Assas. Elle revient de temps à autre sous les feux de l'actualité. Loïk Le Priol, ancien gudard et ex-militaire, est le principal suspect dans le meurtre en mars 2022 de l'ex-international de rugby argentin Federico Martin Aramburu. Des militants avaient quitté le navire pour fonder le Bastion social (2017-2019) ou les Zouaves Paris (2018-2022), dissous depuis par les autorités. Le retour du GUD serait à l'initiative de ces anciens militants, à l'instar de Marc de Caqueray-Valmenier, chef présumé des Zouaves, déjà condamné et incarcéré ces dernières années.

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Médiapart révèle que samedi "deux anciens trésoriers du micro parti de Marine Le Pen, Jeanne" étaient présents "en marge de ce défilé". Il s'agit d'Axel Loustau et Olivier Duguet. Le média d'investigation ajoute que "les deux acolytes ont milité ensemble au Groupe union défense (GUD) dans les années 1990, sous la houlette de Frédéric Chatillon, un vieil ami de Marine Le Pen." Il est également précisé que "reconvertis respectivement en chef d’entreprise et comptable, ils ont été, via le micro parti Jeanne, les piliers de l’organisation financière du Front national et de ses campagnes."

Pourquoi se sont-ils rassemblés ?

Ces quelques centaines de personnes se sont rassemblées pour célébrer le 29e anniversaire de la mort, d'un jeune militant d'extrême droite. Cette manifestation a lieu chaque année en mémoire de Sébastien Deyzieu, proche de l'ex-GUD, décédé en 1994 après avoir glissé d'un toit rue des Chartreux, lors d'une manifestation "contre l'impérialisme américain" qui avait été interdite par la préfecture de police. Quelque 400 personnes s'étaient à l'époque rassemblées à l'appel des groupes d'extrême droite "Union des étudiants d'Assas" et "Jeunesses nationalistes révolutionnaires".

Une banderole "Sébastien Présent" a été affiché durant la manifestation samedi 6 mai à Paris.
Une banderole "Sébastien Présent" a été affiché durant la manifestation samedi 6 mai à Paris.
© AFP - Emmanuel DUNAND

Les participants ont défilé samedi dans le VIe arrondissement de Paris derrière la banderole noire "Sébastien présent" et la manifestation avait pour point d'arrivée la rue des Chartreux où une gerbe à été déposée. D'après l'AFP, les personnes présentes ont refusé de répondre aux questions de son journaliste, et l'atmosphère était hostile à la presse. Mediapart ajoute également qu'Axel Loustau "a tenté d’intimider" son photographe présent sur place.

La manifestation était-elle autorisée ?

Oui, elle a été autorisée par la préfecture de police, qui s'est d'ailleurs justifiée ce lundi dans un communiqué. Elle indique tout d'abord qu'une "déclaration" a été déposée "le 7 mars 2023, respectant en cela les obligations de l’article L. 211-1 du code de la sécurité intérieure".

La préfecture ajoute que "dans la mesure où cette manifestation n’avait occasionné, les années précédentes, aucun débordement ou trouble à l’ordre public, le préfet de police n’était pas fondé à prendre un arrêté d’interdiction à son encontre." Il est également précisé que cette manifestation "a fait l’objet d’un encadrement adapté par les forces de l’ordre, pour éviter tout risque de débordement ou d’affrontements." Un arrêté du préfet de police de Paris avait autorisé l'enregistrement d'images par drones, lors de cette manifestation, afin de "prévenir les atteintes à la sécurité des personnes et des biens ".

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Quelles sont les réactions suite à cette manifestation ?

La manifestation a donc été autorisée, ce qui provoque sur Twitter la colère d' Aurore Lalucq, eurodéputée du groupe de l'Alliance progressiste des socialistes et démocrates au parlement européen. "Autorisée et protégée ? Quel beau symbole en cette semaine où nous allons nous rappeler - notamment - du courage des résistants et des résistantes. Et du fait qu’ils avaient prévenu bien à l’avance de la montée de l’extrême droite, sans être entendus…"

La tenue de cette manifestation a été vivement critiquée par plusieurs députés et personnalités politiques, notamment à gauche. Olivier Faure, Premier secrétaire du Parti socialiste a estimé sur Twitter que "sous la cagoule ou le masque de respectabilité, l’extrême-droite demeure l’extrême-droite." Il a également dénoncé "la complicité tacite dont elle bénéficie de la part de ceux qui ont décidé d’affronter la gauche par priorité. Le député France Insoumise, Carlos Martens Bilongo, s'est lui étonné qu'en "toute tranquillité un groupuscule de néo nazis se balade dans Paris pour une manifestation avec des visages dissimulés", avant d'ajouter "Que fait la Police ?!". Thomas Portes, député LFI a lui réagi à l'article de Médiapart sur la présence de "deux anciens trésoriers de Marine Le Pen" et déclaré : "On change le nom du parti, on met des cravates mais le naturel revient toujours. Cela nous rappelle que les statuts du FN ont été déposés par un SS."

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Lundi, sur Twitter, le sénateur socialiste de Paris David Assouline a notamment interpellé le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, estimant "inadmissible d'avoir laissé 500 néo-nazis et fascistes parader au coeur de Paris". "Expliquez-vous!", a-t-il sommé dans son tweet. Egalement sur Twitter, le porte-parole du PCF Ian Brossat, élu de Paris, a lui ironisé en milieu de journée, en écrivant : "les casseroles sont manifestement plus dangereuses que les bruits de bottes...". Depuis l'adoption de la loi controversée sur les retraites, les interdictions de manifester se multiplient en France pour éviter des "casserolades" contre le président Emmanuel Macron et les membres du gouvernement.

"Voir l'extrême-droite défiler en plein Paris, arborant tous ses oripeaux symbolisant la haine et la violence, ne doit laisser personne insensible" a de son côté pointé le député Modem Bruno Millienne, ajoutant que "même légal, ce sordide défilé abîme la République et doit être dénoncé avec la plus grande vigueur !"

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