Régine Chopinot : "Danser est la chose la plus difficile au monde"

Régine Chopinot dans sa création A-DN - Vincent Lappartient
Régine Chopinot dans sa création A-DN - Vincent Lappartient
Régine Chopinot dans sa création A-DN - Vincent Lappartient
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En ces temps de fermeture des salles de spectacle, nous recevons la chorégraphe Régine Chopinot pour évoquer son rapport à la danse et au mouvement, ainsi que la nécessité de la transmission.

Avec

Le spectacle de Régine Chopinot AD-N programmé en janvier dernier à la MC93 sera repris à Uzès en juin, et à la MC93 à une date à définir. Régine Chopinot anime par ailleurs depuis décembre dernier des ateliers de danse dans l'amphithéâtre de l'opéra Bastille, une fois par mois, accueillant des jeunes gens exilés, des personnes en apprentissage de la langue française ou en situation de précarité, dans l'idée de favoriser la prise de conscience du corps et de la langue, et nommer l'espace pour s'y sentir au cœur.

"A D-N" de Régine Chopinot
"A D-N" de Régine Chopinot
- Vincent Lappartient

Apprendre à lire les corps en regardant l’horizon

Quand j’étais enfant, en Algérie, avant d’aller me coucher, ma grand-mère me faisait regarder l’horizon. C’était un rituel que l’on pratiquait, depuis mon plus jeune âge, jusqu’à l’âge de cinq ans, et il est clair que quelqu’un qui vous aime et que vous aimez, vous offre cet espace de silence et d’écoute, ça modifie profondément l’être qui est en devenir. Je pense que si je sais voir, si je sais lire les corps en mouvement, cela vient de ce moment. En fait, c’était une espèce de méditation. Régine Chopinot, danseuse et chorégraphe

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L’origine du spectacle AD-N

Ce qui m’a attiré chez Alexandra David-Néel, c’est la liberté, le fait qu’on ne puisse pas attraper ce petit bout de femme, qu’on ne puisse la mettre dans aucune case. Elle a tenté des choses absolument incroyables : elle est polyglotte, elle étudie, elle écrit, et le nombre d’écrits, de styles, et de catégories de littérature qu’elle traverse, tout cela est délirant et étonnant. J’ai la chance d’être amie avec Nadine Gomez qui est responsable du fond Alexandra David-Néel, dans sa maison à Digne-les-Bains. C’est donc grâce à cette amitié, que j’ai pu avoir accès à ses photos, ses écrits, et tous ses documents, et petit à petit, Alexandra David-Néel a fait sa place dans une sorte de compagnonnage de voyage. Pour moi, le plus important c’est bouger, voyager, et continuer à être touchée, même quand les gens ne sont plus là. Même si actuellement, on ne peut plus se toucher physiquement, il y a beaucoup d’autres manières de se toucher, d’une façon beaucoup plus intime et profonde, que ce soit par une danse, par un regard, un rire ou un rythme. Régine Chopinot, danseuse et chorégraphe

%C3%A0%20lire%20aussi : Alexandra%20David-N%C3%A9el%3A%22J'ai%20v%C3%A9cu%20en%20ermite%20sur%20le%20dernier%20versant%20des%20Himalayas%2C%20ravitaill%C3%A9e%20deux%20fois%20par%20an.%22

Le poids du corps et des mots

Il y a la puissance du poids des mots et aussi La danse qui est un puits de savoir infini, et lorsqu’on reste dans la simplicité des mots, tout devient efficace. Lorsqu’un mot est chargé de sa sensation, de son imaginaire, il va voyager et toucher l’autre. J’habite Toulon, non loin de la frontière italienne, d’où arrive des migrants. Leur situation m’a bouleversée, je me suis rapprochée des centres sociaux et j’ai demandé si je pouvais faire quelque chose, voir si en dansant on pouvait les aider à apprendre le français, mais aussi leur apprendre à se réconcilier avec eux-mêmes, retrouver la verticalité : c’est comme ça que sont nés les ateliers. 

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Dans notre société, on est trop dans la tête, on oublie que la tête, c’est une des cinq extrémités du corps, mais souvent, elle se met au-dessus, comme si elle dirigeait tout le reste : c’est ridicule, une tête ne vaut pas plus qu’un pied ou une main. Lorsque ces cinq extrémités veulent bien travailler ensemble, alors on peut marcher, toucher, rêver, et surtout causer. Ceux qui causent, ce sont des gens qui ont du poids, et le poids c’est l’endroit où on sait qui on est. Ce qui est génial, c’est la gravité et la réaction gravitaire, plus on est lourd, plus on est léger. Régine Chopinot, danseuse et chorégraphe

Archives

Michel Lussault, émission "Hors champs", France Culture, 2015

Jean-Luc Nancy, émission "Studio danse", France Culture, 2001

Références musicales

Nico Morcillo, Musique du spectacle " AD-N" 

Thomas de Pourquery, Love In Outer Space 

Prise de son

Jean-Ghislain Maige

L'équipe