select
Recherche avancée
S'identifier | Mon Compte | Aide
Vous n'êtes pas identifié
Recherche  >   >   >   >   >  Les guerres balkaniques 1912-1913

Les guerres balkaniques 1912-1913

Editeur: Science Marxiste

Collection: Classiques

Parution: mai 2002

Format: Grand format

Dimensions:21 x 15 x 2.4 cm

Pages:544 pages

EAN13:9782912639103

Chroniques Presse

Le Temps

Avec Trotski sur le front

Jean-Arnault Dérens, samedi 21 septembre 2002


Un classique longtemps oublié est enfin republié en français. Lev Davidovitch Bronstein, dit Trotski, fut en effet journaliste et il couvrit les guerres balkaniques de 1912-1913. Dans un premier temps, la Serbie, le Monténégro, la Grèce et la Bulgarie s'étaient alliés pour libérer les derniers territoires européens encore sous domination turque. Dans un second temps, tous les pays des Balkans se liguèrent contre les ambitions hégémonistes de la Bulgarie. Les lignes de fracture dessinées au cours de ces guerres demeurèrent grosso modo pertinentes durant les deux conflits mondiaux et déterminent certains axes géopolitiques des Balkans contemporains.
Trotski avait été envoyé comme correspondant de guerre par la Kievskaia Mysl, même s'il publia aussi des textes dans d'autres journaux comme Proletaryi, l'organe du Parti bolchevique russe. Certains des textes ont une vocation analytique. Trotski décrypte ainsi le changement radical causé par l'irruption des nationalismes balkaniques: «Dans le passé, les diplomates européens traçaient les frontières, avec leurs griffes, sur les cartes géographiques des pays balkaniques, et ainsi décidaient, selon leur bon plaisir, du destin des nations. A présent, c'est au tour des peuples balkaniques de faire irruption dans l'histoire et de se saisir de cette question.» Militant révolutionnaire, Trotski s'intéresse naturellement au développement des social-démocraties serbe et bulgare, mais le militant laisse souvent la première place au journaliste. «Un homme de 70 ans au crâne fracassé, des milliers de femmes et d'enfants morts de faim, des tchétniks révolutionnaires devenus des brigands, un surintendant de la police protecteur des voleurs: tel est le tableau de la vie sociale dans les provinces libérées», écrit-il à propos de la Macédoine que l'armée bulgare vient de reprendre aux Turcs.
C'est dans les Balkans que Trotski est confronté pour la première fois de sa vie à l'aberration de la guerre: «Je n'arrive pas à concilier la vie de tous les jours, les poulets, les cigares, les enfants aux pieds nus et la morve au nez, avec la réalité tragique et incroyable de la guerre», avoue-t-il. Il se révèle un journaliste plein de finesse, par exemple lorsqu'il fait parler les soldats serbes de retour du front. Et un observateur caustique, lorsqu'il décrit ses collègues journalistes réunis au bar de l'hôtel Moskva de Belgrade, qui était déjà à l'époque le quartier général de la presse étrangère en Serbie: «Trois stylos à plume mordent frénétiquement les feuilles de papier. Les correspondants autrichiens sont déprimés: les ministres n'accordent pas d'entretien.» Moins sérieux, Trotski décrit un autre journaliste, semble-t-il français: «Mon cher collègue, Don-qui-blague (qui ne ressemble en rien à Don Quichotte), chapeau melon sur la tête et serviette à la main, passe de table en table comme un possédé, arrache les journaux à l'encre encore fraîche des mains de ses confrères et s'empare des bribes de nouvelles, comme un chien qui attrape les mouches au vol.» On a envie de voir Albert Londres dans ce portrait.
Trotski s'impose comme l'un des observateurs les plus pertinents du grand déchirement balkanique, prélude à la Première Guerre mondiale. Le livre révèle une facette inattendue de la personnalité du terrible organisateur de l'Armée rouge, et représente un classique absolu pour qui veut comprendre l'histoire contemporaine des Balkans.

Envoyé dans les Balkans en 1912, en tant que correspondant de guerre, par le grand quotidien radical-démocrate ukrainien Kievskaja Mysl' et pour le compte d'autres journaux, Trotsky a pu connaître directement, et ainsi décrire de sa plume inégalable, les scénarios, les protagonistes et les figurants de la tragédie qui était en train de se dérouler dans ce théâtre. Trotsky apprit le déclenchement de la guerre lors d'un voyage qui le menait de Belgrade à Sofia, et il lui fut pénible de voir que tout ce qu'il avait prévu de manière rationnelle était arrivé. La vigueur de ses propos n'a pas besoin d'être réactualisée : " Tout à coup, la guerre nous révèle que nous marchons encore à quatre pattes et que nous ne sommes pas encore sortis de l'ère barbare de notre histoire. " Certes, il n'échappera pas au lecteur attentif que les " enjeux " liés à cette péninsule tourmentée - le problème des Détroits, des débouchés maritimes et ainsi de suite - n'ont plus la même importance aujourd'hui. Son caractère de " champ d'épreuve " pour les nouveaux rapports multipolaires entre les Puissances a pris nettement le dessus, mais de nombreux autres aspects ont survécu ou sont à l'origine des événements contemporains. La magistrale description qu'en fait Trotsky se révèle, à ce titre, plus d'une fois lumineuse. Il suffit de penser à sa description de la bourgeoisie locale " stérile, lâche, incapable et imprégnée de chauvinisme jusqu'à la moelle ", des banquiers et des financiers contraints, à cause du retard économique, à être " des négociateurs politiques de leurs propres intérêts d'affairistes ", de l'effet qu'a eu sur les soldats serbes l'entrée dans la plaine du Kosovo, mille fois chantée et jamais foulée, de l'interminable galerie de personnages de toute nationalité et de toute catégorie sociale - du journaliste anglais au prêtre roumain, du chauffeur de taxi russe de Bucarest au propriétaire terrien hongrois, du volontaire arménien à l'officier turc prisonnier -, chacun saisi dans son rapport matériel avec la guerre et dans la représentation idéale qu'il s'en fait. Fort de cette prise de conscience, Trotsky nous dresse un tableau riche et vivant de la façon dont l'" ethnographie " et la " diplomatie " se rejoignirent au sein du drame balkanique, comment elles furent perçues individuellement et collectivement et comment l'enchevêtrement créé par des legs historiques et des intérêts impérialistes " modernes " ramena les acteurs de ce drame à un degré de barbarie que plus personne ne croyait possible.
Bio de l'auteur
A LA VEILLE DE LA GUERRE La question balkanique Les pays balkaniques et le socialisme La guerre et la social-démocratie LA GUERRE La Serbie en guerre La Bulgarie en guerre : première période La Bulgarie en guerre : deuxième période LA ROUMANIE D'APRES-GUERRE Portrait politique d'un " vainqueur " La social-démocratie roumaine Une visite en Dobrudja.
information eBook
Prix Payot
CHF 28.90

Disponibilité: Généralement expédié sous 3 jours à 4 semaines (selon disponibilité locale)