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Marie Drucker : retour à la nature

Marie, la Provençale, a découvert le côté sauvage du Caf-Ferret. Ses attaches ont longtemps été dans les Alpilles où son père avait une propriété.
Marie, la Provençale, a découvert le côté sauvage du Caf-Ferret. Ses attaches ont longtemps été dans les Alpilles où son père avait une propriété. © François Darmigny
Caroline Mangez

L'amour de Mathias et l'arrivée de leur fils Jean l'ont totalement libérée.

Un sac trop rempli dans une main, son téléphone dans l’autre, en veste de velours vert émeraude et jean taille haute, et surtout de guêpe, Marie Drucker déboule au bar comme une toupie. En pleine forme. Guidée par l’appli Waze, elle a cru ne jamais parvenir à rejoindre cet hôtel près de la place de l’Etoile. « Conduire en ce moment, avec tous ces travaux, c’est vraiment une très mauvaise idée », lâche la Parisienne en s’écroulant sur un bout de canapé. Marie au « naturel » est arrivée, loin de l’image austère qu’elle dégageait à l’époque révolue où elle officiait en tant que grande prêtresse du JT de 20 heures. Elle ne nie pas s’être longtemps planquée derrière le « nécessaire devoir de réserve » qui allait, selon elle, de pair avec cette fonction : « Entretenir le malentendu arrangeait ma pudeur. »

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A 44 ans, elle se sent mieux dans sa peau qu’à 25

Plus sûre d’elle, elle prétend donc être aussi plus encline à se dévoiler. La preuve en images : cette séance photo accordée à Paris Match sur les plages du Cap-Ferret. Jamais on ne l’a vue ainsi libérée. Avoir renoncé aux feux de la rampe et à l’actualité brûlante lui va bien au teint. En lançant No School, sa société de production, puis en passant derrière la caméra pour filmer les autres « en toute liberté et en toute subjectivité », elle est redevenue maîtresse de son agenda. Ça lisse les traits. Même si elle a « aimé chaque âge traversé », à 44 ans, elle se sent mieux dans sa peau qu’à 25. « Je suis, dit-elle, exactement à la place dont je rêve, sans regret ni frustration, sans doute parce que la notoriété n’a été pour moi qu’un outil, jamais une fin en soi. » Rien ne l’exaspère davantage, du reste, que cette sempiternelle question sur la difficulté – ou non – d’être retournée vivre dans l’ombre. Pour elle, c’était un choix. Depuis qu’elle a rendu sa carte de presse, Marie mène sa barque discrètement. Et fait ce qui lui plaît, au rythme qu’elle juge bon. Un vrai luxe ! « Conquis à force d’énormément de travail », tient-elle à préciser, toujours hantée par l’idée de passer pour une enfant gâtée alors qu’elle est une vraie bûcheuse.

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Sur son portable, bientôt à court de batterie, apparaît en fond d’écran le visage de son fils de 4 ans et demi. C’est fou ce qu’il ressemble à un autre Jean, le père de Marie, ancien patron de M6, qu’il n’aura pas la chance de connaître mais dont il porte le prénom. Elle acquiesce d’un sourire, hèle un serveur pour commander « un thé vert, avec citron s’il vous plaît ». Alors que l’on s’est déjà jetée sur deux macarons pleins de sucre, elle ajoute qu’elle aimerait, si possible, deux toasts de pain complet, juste avec un peu de beurre « sans sel ». Est-ce vrai qu’elle n’en consomme plus depuis dix ans ? « Absolument ! Je ne sale rien quand je cuisine et, au restaurant, je n’en ajoute dans rien. Sel rimant avec cellulite, rétention d’eau, peau d’orange, ce petit effort en vaut la peine ! » Marie Drucker est ce genre de veinarde que l’on pourrait facilement détester si elle n’était aussi sympa.

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A l’origine de sa métamorphose, sûrement sa rencontre avec Mathias Vicherat, énarque canon au nom sonnant comme celui d’un demi-dieu indien. Depuis qu’elle partage sa vie et un enfant avec lui, tout a changé ! « Devenir mère est d’une très grande banalité, mais, pour celles qui le vivent, cela reste le plus grand des bouleversements. On porte ensuite un regard différent sur le monde, son passé... » Même sa relation au téléphone portable a évolué, ce portable qui, pourtant, lui tient quasiment lieu de bureau depuis qu’elle est professionnellement indépendante. Pour Marie, la révolution au quotidien a consisté à apprendre à dire « stop ». « Cela n’a pas été de soi au départ, mais, à présent, je sais m’arrêter si j’ai envie de faire une heure de danse ou d’aller chercher mon enfant à l’école », glisse-t-elle. Elle y parvient deux ou trois fois par semaine, arrive même à se mettre au diapason d’interminables congés scolaires. L’enfance, les enseignants et, plus largement, la construction de l’être sont devenus ses sujets de prédilection en tant que productrice, réalisatrice et même auteure. Prosélyte de rien, mais « partie du constat que même en ayant consulté tous les manuels consacrés au sujet je me retrouvais trop souvent sous ma couette, à minuit, en train de chercher des réponses sur des forums de discussion », elle avait publié « Maman, pour le meilleur et pour le reste » avec sa complice Sidonie Bonnec. C’était il y a trois ans.

Chez elle, en arrière toute. Savon noir, bicarbonate de soude et moulinette à légumes...

Elles récidivent avec un second guide « pour prendre soin de soi sans faire de mal à la planète ». « A force d’entendre tellement de choses sur le bien-être, le bio, les régimes végétarien ou végétalien, le véganisme, on a voulu savoir ce qui était vraiment efficace ou relevait de l’outrance totale. » Résultat : une enquête fondée sur leurs expériences respectives, mais aussi des avis et recommandations d’experts. On lui demande si elle ne surfe pas un peu sur la vague. Elle répond qu’elle est dans le sens de l’Histoire. Et depuis longtemps, d’ailleurs. Marie Drucker n’a jamais fumé ni bu, et se vante ne pas savoir ce qu’est un lendemain de cuite. Avec la naissance de Jean, cette tendance a gagné son quotidien, ses placards, sa cuisine. « Je ne fais pas la moitié de ce qui est recommandé dans ce guide, mais j’essaie d’avoir quelques réflexes essentiels, comme de ne plus manger de produits transformés. » L’idée que son enfant respire les détergents utilisés, avant même sa naissance, par les précédents locataires lui a aussi, dit-elle, donné à réfléchir. Sous l’évier, chez elle, on ne trouve plus que trois produits basiques : savon noir, vinaigre blanc et bicarbonate de soude, commandés en quantités industrielles. « C’est d’une simplicité biblique, très économique et extrêmement efficace », assure-t-elle.

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Entre deux livres d’Aharon Appelfed, romancier israélien né comme son grand-père à Czernowitz, en Bucovine, et trois questions à sa grand-mère « extraordinaire » de 93 ans, Marie n’explore pas seulement ses racines. Elle rince, brosse et sèche ses légumes avant de les mouliner à la main, ayant banni les appareils électriques qui détruiraient minéraux et vitamines. Mais, elle le jure, elle n’est pas un « ayatollah » du tout bio. Ne pas compter sur elle pour s’infliger quoi que ce soit pouvant entraver son plaisir ! Ira-t-elle jusqu’au « no poo », cette mode consistant à se passer des shampooings parce qu’ils regorgent de silicone et de tensioactifs ? « Jamais de la vie ! Si on l’évoque dans le livre, c’est juste parce que ça existe… » Elle passe une main dans sa chevelure noir de jais, lavée tous les matins. On apprend, soulagés, que Jean est autorisé à se rassasier de bonbons et biscuits industriels. Mais, précise-t-elle, chez les autres, « rarement chez moi. Je ne lui interdis rien car je ne veux ni le marginaliser ni le frustrer ».

Son prochain bébé : la réalisation d'une fiction

Après avoir lu le chapitre consacré à la contraception naturelle et celui sur les couches « bio » à laver soi-même, on a forcément envie de demander à Marie si elle envisage une seconde maternité. Eclat de rire : « Ah oui, j’aurais un enfant à 50 ans ? Je ne me pose même pas la question ! Je crois que l’on peut être très heureuse avec un enfant unique. » Elle n’a pas souffert de son enfance solitaire, qui lui a même forgé le caractère. « Je suis très indépendante, jalouse de ma liberté, et je n’aime pas les contraintes... ce que certains ont parfois du mal à appréhender, surtout venant d’une femme. » Ado, déjà, elle fuyait le brouhaha des couloirs de lycée dans des salles de cinéma, qui demeurent un de ses refuges de prédilection. Incollable sur le cinéma israélien ou mexicain, elle aime les vieux films de Claude Sautet, la plupart de ceux de Diane Kurys, les comédies d’Yves Robert et le regard du cinéaste Stéphane Brizé sur notre époque.

Lire aussi. Marie Drucker : "Je suis féministe par nature, conviction et éducation"

Son prochain bébé, ce sera donc, plutôt, une fiction qu’elle entend réaliser. « Ce rêve, ce besoin impérieux » explique les renoncements, le choix de vie fait à la naissance de Jean. Deux jours par semaine, Marie s’y attelle, avec une coscénariste. Elle a déjà des producteurs en tête, et même des acteurs, pour cette histoire de couple « nourrie de ce que j’ai lu, vécu, et de ce qu’on m’a raconté ». Ainsi va Marie Drucker, détachée des lieux, rivée aux seuls principes qu’elle se fixe et attachée « aux histoires, à certains objets, notamment les livres, et à des amis choisis ». Elle m’avait, naguère, confié que ceux qui la connaissent réellement répètent souvent : « Si seulement les gens pouvaient imaginer… » Imaginer quoi ? « Que je suis une bonne vivante, capable de beaucoup de fantaisie. » Un jour viendra, peut-être bientôt, où nous le saurons aussi. Oui, mais pas tout de suite, pas trop vite. 

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©

« Naturel, pour le meilleur et pour le reste », par Marie Drucker et Sidonie Bonnec, éd. Fayard.

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