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Jean-Edern Hallier l'insaisissable

Jean-Edern Hallier
Jean-Edern Hallier © Bruno Bachelet/Paris Match
La Rédaction

Jean-Claude Lamy lui consacre une biographie dense et passionnante.

Lorsqu'on échoue à devenir auteur, on peut se faire personnage. C'est tout aussi mal payé mais sans conteste plus facile. Longtemps Jean-Edern Hallier a rêvé d'être «LE grand écrivain», c'était même le titre d'un de ses livres. Puis il s'est résigné, préférant faire de sa vie un roman. Dans son ébouriffante biographie, Jean-Claude Lamy , qui a tout vu, tout lu, tout entendu, nous rappelle que l'énigme Hallier se joue peut-être à la naissance. Le forceps du médecin glisse sur l'oeil gauche, et l'enfant voyant le jour perd la moitié de sa vue. «Je suis admirablement normal, dira-t-il, mais blessé de naissance.» Faux. Edern n'est pas normal, il le sait mieux que quiconque et en use. C'est lui qui se composera cette image de dandy flambeur et flamboyant. Son premier mariage lui assurant une solide fortune, Hallier choisit de s'installer place des Vosges, à Paris. Il est alors le «révolutionnaire en Ferrari» pendant les événements de Mai et fondateur l'année suivante du mythique «Idiot international ». Inusable, insupportable, redoutable polémiste, il lui reste, à l'époque, à se choisir un étendard. Ce sera Mitterrand contre Giscard, qu'il brocarde dans une admirable «Lettre ouverte au colin froid».

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En mai 1981, Tonton l'emporte et Jean-Edern croit avoir gagné aussi. Un ministère, une ambassade, n'importe quoi, il attend sur un plateau son hochet. Mais le plateau ne vient pas et l'amitié avec le nouveau président se meut en haine. Hallier, bafoué, devient maître chanteur, menace partout de révéler l'existence d'une fille cachée. Qui s'appellerait, pour l'anecdote, Mazarine. Un nom pareil, personne ne veut y croire. Le 25 avril 1982, Hallier, mis au ban, reprend soudainement la main des médias: il est victime d'un enlèvement. On le sait aujourd'hui, Jean-Edern s'est enlevé lui-même. A reparu huit jours plus tard. Ce n'était sans doute pas là son meilleur coup mais tout de même, qui oserait aujourd'hui? «Personne, répond Anthony Palou, son secrétaire d'alors. Tout comme plastiquer l'appartement de Régis Debray..., ce sont des choses qui ne se font plus!» Avant tout le monde, Jean-Edern avait vu venir la société du spectacle. Adoré, conspué, condamné, saisi, ruiné - il comptait à sa mort plus d'ardoises que les charpentes du Nord-Finistère réunies -, Hallier fut une sorte de martyr qui se serait lui-même crucifié. Montant sur la croix pour mieux se faire entendre. Vingt ans plus tard, grâce à Lamy, on continue d'en causer. D'ici deux millénaires, allez savoir, on lui bâtira peut-être une église.

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«Jean-Edern Hallier, l'idiot insaisissable», de Jean-Claude Lamy, éd. Albin Michel, 600 pages, 26 euros.

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