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Gérard Rinaldi, “Quelqu’un de bien”

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Gérard Rinaldi et son épouse, Ginette, le soir de la Saint Valentin, en 2009.

Gérard Rinaldi et son épouse, Ginette, le soir de la Saint Valentin, en 2009.
© Edouard Bernaux/News Pictures
Jean-Pierre Bouyxou

Cet éternel saltimbanque  n’avait qu’un seul credo : l’amitié.

Sa première ambition était d’être aviateur, mais Gérard Rinaldi opta pour d’autres façons d’atteindre le firmament. Au moment de passer son bac philo, cet élève du lycée Charlemagne gagne son argent de poche en jouant du saxophone sur les tournages d’«Intervilles», pour faire patienter le public entre deux lâchers de vachettes. Un accident de la route sans gravité l’empêche de renter à Paris assez tôt pour se présenter à l’épreuve d’histoire-géo. Il n’aura pas son diplôme, mais son sort est scellé. Il sera musicien.

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Rien ne l’y disposait. Issu d’un milieu très modeste, il s’est initié au saxophone en reprenant des standards du jazz avec des copains du lycée. L’un d’eux a un frère qui gratte la guitare basse dans un groupe yé-yé, les Rebelles, et cherche un saxophoniste. «Je me souviens encore de notre première rencontre, raconte Jean Sarrus, l’apprenti bassiste. Comment imaginer que ce jeune homme à l’allure si respectable contient une bombe à neutrons? Comment imaginer que notre vie vient de basculer?» On est en 1963. Jean a 17 ans, Gérard en a 20.

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Rebaptisé les Tarés, puis les Problèmes, le groupe prend forme. Autour de Jean et Gérard, Luis Rego assure la guitare rythmique, Gérard Filipelli (alias Phil) la guitare solo et Donald Rieubon la batterie. Sur suggestion de leur impresario, Christian Fechner, les Problèmes accompagnent un chanteur contestataire qui fait sensation avec ses cheveux longs, Antoine. En route pour la gloire! Avec lui, les Problèmes font même, en tournée, la première partie des Rolling Stones. «Ils savaient à peine qu'on existait, racontera Gérard. Nous avions “Satisfaction“ à notre répertoire et l’en avions retiré pour cette tournée. Mais un soir, nous l’avons quand même chanté et ça a fait un tabac. C'est un très beau souvenir. Je suis le mec qui a osé chanter “Satisfaction“ juste avant Mike Jagger!»

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Son unique contrariété sera que le film dans lequel les Charlots devaient être dirigés par Bertrand Blier ne se soit finalement jamais fait

 Tout bascule le jour où, par jeu, les cinq potes détournent une chanson d’Antoine, «Je dis ce que je pense, je vis comme je veux», transformée en «Je dis n’importe quoi, je fais tout ce qu’on me dit». C’est Gérard qui se colle au chant, en prenant l’accent berrichon. Fechner décide d’enregistrer la parodie, mais les Problèmes sont de purs rockers: pas question de mettre leur nom sur un disque comique. Ces calembredaines sont bonnes pour des charlots! Les Charlots? Après tout, pourquoi pas… Le 45-tours est un succès. Exit les Problèmes, vivent les Charlots. Seul changement, le frère cadet de Fechner, Jean-Guy, remplacera Donald Rieubon parti au service militaire. Gérard, lui, n’effectuera pas le sien: une maladie vénérienne bénigne, contractée au moment opportun, l’en dispensera.

 De «Paulette la reine des paupiettes» à «Merci patron», les Charlots enchaînent les tubes. Quand ils ne reprennent pas des chansons de la Belle Epoque ou des années 1930, c’est Luis Rego qui compose la musique. Gérard, chanteur et âme du groupe, se charge des paroles. Mais c’est au cinéma, à partir de 1971, que les Charlots connaissent leurs plus retentissants triomphes. Leur deuxième film, «Les bidasses en folie», de Claude Zidi, attire près de 12 millions de spectateurs. Gérard ne regrettera aucune de ces pochades parfois lourdes. Son unique contrariété sera que le film dans lequel les Charlots devaient être dirigés par Bertrand Blier ne se soit finalement jamais fait. «Ça aurait pu changer complètement notre trajectoire», disait-il, songeur.

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 Puis vinrent le départ de Rego, la brouille avec Christian et Jean-Guy Fechner. A son tour, Gérard quittera les Charlots en 1986. Malgré son remplacement par Richard Bonnot, c’en sera bientôt fini du groupe. Gérard entame une nouvelle carrière, en solo, dont le point culminant sera la série télé «Marc et Sophie», sur TF1, avec Julie Arnold (220 épisodes entre 1987 et 1991). On le reverra aussi beaucoup au théâtre, et, surtout, on l’entendra souvent: il sera la voix de Dingo dans les dernières productions Disney et doublera en français d’innombrables acteurs américains, notamment John Malkovich en Dr Jekyll et Mr Hyde dans «Mary Reilly».

 «Etre un jeune con est amusant, être un vieux con l’est moins», aimait-il répéter pour justifier son refus de reformer le groupe d’antan. Cela ne l’avait pas empêché de remonter sur scène avec Jean Sarrus, en 2009, pour chanter quelques-uns des anciens succès des Charlots. Et il n’a pu s’empêcher d’avoir yeux humides quand, la veille de sa mort, son ex-complice Luis Rego lui a envoyé un texto pour l’assurer de son amitié toujours intacte.

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