Contre le maintien du candidat fantôme Bouteflika, des foules immenses marchent à travers tout le pays. Cet élan historique d'une nouvelle génération, s'il n'est pas freiné dans le sang, pose les jalons d'une renaissance confisquée par le FLN en 1962.
« C'est un fleuve détourné » disait de son pays le grand Rachid Mimouni, écrivain algérien mort en exil en 1995, à 49 ans, pendant la décennie barbare. Le flot humain veut aujourd'hui retrouver son cours. La génération qui s'est levée depuis deux semaines, d'Alger à Constantine, d'Oran à Tlemcen, d'Annaba à Bejaia, de Tiaret à Guelma, et jusque dans les plus petites villes de cet immense pays, n'a vécu ni l'aube de l'indépendance ni la guerre civile des années quatre-vingt-dix. La jeunesse algérienne a l'âge de ce siècle mais connaît sa leçon d'histoire. Elle lui a été pesamment transmise par des maîtres qui s'appuyaient sur des pages endeuillées pour régner. À vie, pensaient-ils, puisque Bouteflika, le fantôme médicalisé, a été consacré candidat à sa succession, par directeur de campagne interposé, au mépris de la Constitution qui exigeait une présentation « physique ».