Stéphane Charbonnier dit Charb présente la Une de Charlie Hebdo du 19 septembre 2012 dans les locaux du journal à Paris

Stéphane Charbonnier dit Charb présente la Une de Charlie Hebdo du 19 septembre 2012 dans les locaux du journal à Paris

afp.com/FRED DUFOUR

Les responsables du spectacle, le comédien et metteur en scène lillois Gérald Dumont et la directrice des ressources humaines de Charlie Hebdo Marika Bret, ont dénoncé une "censure sécuritaire" rejoints par la Licra mardi.

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Gérald Dumont a déjà présenté une quinzaine de fois en public la "Lettre aux escrocs de l'islamophobie qui font le jeu des racistes", publiée après la mort de Charb dans la tuerie qui a fait 12 morts au siège de Charlie Hebdo le 7 janvier 2015. Dans cet ouvrage, Charb répondait à ceux qui accusaient son journal de provocations répétées à l'encontre des musulmans.

Une représentation prévue à Lille le 2 mai dans des locaux utilisés par la Ligue des droits de l'homme a été annulée à la demande de la section locale, une annulation "clairement politique" selon Gérald Dumont.

Contacté, le représentant de la LDH locale n'était pas joignable mardi, mais la LDH nationale a indiqué dans un communiqué qu'elle condamnait "toute censure" et notamment "le fait que le texte de Charb n'ait pu être lu".

La représentation devrait finalement avoir lieu mais dans un autre endroit près de Lille, ont indiqué les organisateurs.

La lecture devait aussi être présentée le mardi 21 mars dans une salle qui appartient à l'université Lille 2, avec la participation de Marika Bret, à l'origine de la publication du livre.

La Licra a condamné mardi ces annulations représentant "un acte de censure, de lâcheté et de trahison de nos valeurs", selon l'ONG.

"Courage, fuyons! Ou comment réduire les morts au silence", s'est insurgé le philosophe Raphaël Glucksmann sur Twitter, tandis que Bernard-Henri Lévy lançait sur le réseau social: "Charb assassiné en 2015, censuré en 2017".

"Ma philosophie c'est d'ouvrir les portes", s'est défendu le président de Lille 2 Xavier Vandendriessche dans La Voix du Nord. "Mais j'ai craint les débordements, le climat et l'ambiance sont si lourds". Une autre date a été proposée aux organisateurs à l'automne, selon eux.

- "Censure sécuritaire" -

Marika Bret espérait également fêter les 25 ans de Charlie Hebdo en Avignon avec ce spectacle et des débats, à l'occasion du Festival cet été, a-t-elle indiqué à l'AFP. L'événement a été proposé à deux théâtres, l'Entrepôt et la Manufacture, qui ne l'ont pas retenu.

Dans une lettre envoyée à la ministre de la Culture, Audrey Azoulay, aux élus des régions Hauts de France et Paca, ainsi qu'à plusieurs directeurs de théâtres, Marika Bret et le metteur en scène dénoncent une "censure sécuritaire".

Xavier Bertrand, le président (Les Républicains) de la Région Hauts-de-France, a répondu à M. Dumont en affirmant que sa région était "une terre d'accueil et de liberté culturelle" et que "son souhait était de lutter contre toute forme de censure".

"Si le Président de l'Université maintient qu'il n'est pas en mesure d'assurer la diffusion de votre spectacle, la Région est prête à mettre à disposition une des salles lui appartenant afin que vous puissiez jouer votre pièce", a-t-il ajouté dans une lettre dont l'AFP a obtenu copie.

"Nous taxer d'autocensure est indigne. Nous n'avons aucune leçon à recevoir en termes de prise de risque", a déclaré à l'AFP Pascal Keiser, directeur de La Manufacture à Avignon, qui programme cette année un spectacle sur l'affaire Merah et un autre sur la radicalisation islamique.

"Ce spectacle n'a pas été déprogrammé, il n'a tout simplement pas été retenu. Nous recevons 200 propositions chaque année", explique-t-il. "Le dossier du spectacle était très succinct, trois pages, pas de vidéo, et nous n'avions pas de possibilité d'aller le voir. Nous avions des doutes sur la qualité artistique du spectacle".

Même explication du côté de L'Entrepôt. "Nos choix sont à la fois poétiques et politiques, la proposition ne nous convenait pas", a répondu la directrice Michèle Addala.

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