Patrice Pellerin. Une vie à la barre de l'Épervier

Le retour de l'Épervier, c'est aujourd'hui dans Le Télégramme. Après trois années d'attente, nous retrouvons, avec impatience, les aventures du corsaire breton de Louis XV, embarqué sur sa Méduse, en route pour le Canada et pourchassé par une flotte anglaise.

Patrice Pellerin consacre deux à trois ans à la réalisation d'un album.
Patrice Pellerin consacre deux à trois ans à la réalisation d'un album. (Photo Steven Lecornu)

Missionné par Louis XV et son ministre Maurepas pour intervenir outre-Atlantique en soutien aux troupes françaises, l'Épervier se retrouve pris au piège d'un vaste complot fomenté à Versailles, à l'aube du déclenchement des guerres indiennes et du conflit entre la France et l'Angleterre.

Pour ce 9e album des aventures de son héros fétiche, Patrice Pellerin se trouvait confronté à une unité de lieu pouvant se révéler ennuyeuse : la traversée de l'Atlantique. Mais pour pimenter ce voyage au long cours, l'auteur a su agrémenter la vie de son héros avec un conflit naval contre une escadre anglaise, un complot à la cour du Roi et des intrigues amoureuses concomitantes dans les manoirs bretons. De quoi muscler le rythme de cet album palpitant, où l'on retrouve bien évidemment toutes les qualités des ouvrages de Patrice Pellerin.

Un véritable historien


L'histoire de ce cycle se situe en 1742, sous le règne de Louis XV, à un moment où la France doit se positionner sur l'avenir incertain de son immense empire colonial en Amérique du Nord, face aux intérêts contraires des Anglais. Au fil de ses albums, Patrice Pellerin est devenu plus qu'un dessinateur, un véritable historien hyperspécialisé sur cette période, sur cette année 1742. Il en connaît aujourd'hui toutes les facettes : les enjeux de politique intérieure, les relations extérieures, la vie quotidienne à la cour, le fonctionnement au quotidien du pouvoir royal, les costumes, les décors, les reconstitutions architecturales et intérieures...

Des centaines d'heures sont nécessaires à l'auteur pour rassembler la documentation qui permettra à chaque album d'être historiquement crédible, inattaquable.

Mais lui seul, grâce à la magie de sa plume et de ses pinceaux, a le pouvoir de restituer fidèlement l'univers disparu d'une telle période. Lui seul peut reconstituer, à l'identique, des pièces qui ont disparu en les décorant avec les meubles d'origine qui sont à présent disséminés aux quatre coins du monde.

« Les belles Indiennes »


À travers son récit, qui n'est pas simplement de cape et d'épée, il cherche aussi à faire revivre des sensibilités différentes entre pays comme sur la colonisation. « Les Anglais étaient avant tout pour le business. Ils étaient donc pragmatiques, efficaces. Les Français, c'était d'abord pour éduquer, pour partager leur culture mais aussi pour les jolies femmes, pour les belles Indiennes ». Alors, l'approche était différente et c'est sans doute pour cela que la France a perdu son influence en Amérique du Nord.

Au fil des années, Patrice Pellerin est devenu un dessinateur de BD à l'ancienne. Il occupe une place à part, comme Jean-Pierre Gibrat (Le Sursis, Mattéo...). Ils sont rares ceux qui, comme eux, peuvent se permettre de ne livrer un album que tous les deux ou trois ans, sans subir les foudres de leurs éditeurs et de leurs lecteurs.

Formé par son grand maître, Jean-Michel Charlier (Barbe Rouge), Patrice Pellerin réalise tout, tout seul. Du scénario au dessin au noir, en finissant par les couleurs à la main, il ne partage pas son talent avec un collaborateur ou avec la palette graphique d'un ordinateur.

400 dessins par albums


Et, de fait, chaque album nécessite deux ou trois années de travail. C'est une véritable vie de bénédictin qu'il s'impose pour livrer, à chaque fois, un album de 46 pages comprenant près de 400 dessins. Son temps de labeur rendrait fou toute inspection du travail. Qu'on en juge. Cinq à 6 heures quotidiennes quand il est sur le scénario. Dix à 12 heures par jour quand il en est à la phase du dessin. Quatorze, 15 ou 16 heures au quotidien quand il passe à la mise en couleur, la dernière étape, la plus éprouvante. « C'est épuisant ! C'est du genre lever à 6 h 30 du matin et fin du travail vers minuit ». Seule distraction qu'il s'autorise : la course à pied dans la campagne de Lampaul-Guimiliau (29) où il demeure. Rares sont, aujourd'hui, les dessinateurs suffisamment connus pour que des éditeurs acceptent un tel rythme artisanal et de tels délais entre deux albums. Mais la rareté de leurs publications est la preuve de leur immense talent et de la somme de travail qu'ils s'imposent. Il faut dire qu'avec de telles reconstitutions historiques et des scènes de batailles navales, Patrice Pellerin ne se facilite pas la tâche.

Heureusement qu'il s'offre, de temps en temps, des scènes plus légères, voire légèrement vêtues, pour se distraire, ainsi que des visites dans les manoirs bretons, dont celui de Tronjoly près de Cléder, dans le Nord-Finistère, qui lui sert de modèle. À ce propos, les fans de la série se réjouiront de découvrir, dans cet album, un flash-back éclairant sur le premier tome de la série, avec une Agnès de Kermellec qui découvre, enfin, la vérité sur la mort de son père.

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Mais le tome 9 étant à peine livré et présenté à partir d'aujourd'hui dans le Télégramme, que le suivant est déjà en préparation. L'action se déroulera, cette fois, au Canada dans la ville française de Louisbourg dont Patrice Pellerin travaille déjà à la reconstitution de forteresse pour y accueillir son fameux Épervier. Mais que les Bretons se rassurent. Leur héros a laissé son coeur en Bretagne et il y reviendra...

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