VIDÉO. Décès de Jacques Vergès : entre admiration et réprobation

La disparition de l'avocat s'est accompagnée d'une vague de louange quasi unanime de ses confrères, même si certains pointent ses méthodes peu académiques.

Source AFP

L'avocat Jacques Vergès le 25 novembre 2002 dans les couloirs du palais de justice de Bastia.
L'avocat Jacques Vergès le 25 novembre 2002 dans les couloirs du palais de justice de Bastia. © AFP

Temps de lecture : 3 min

"Immense avocat, courageux et indépendant", Jacques Vergès, décédé jeudi soir à Paris à 88 ans, a reçu un hommage quasi unanime de ses confrères, certains d'entre eux dénonçant tout de même l'attitude de l'ex-avocat de Klaus Barbie lors de son procès. Me Vergès est décédé en début de soirée chez des amis, dans un appartement au premier étage d'un immeuble construit au début du XVIIe siècle, à l'angle du quai Voltaire et de la rue de Beaune (7e) où l'écrivain mourut en 1778. Le décès du défenseur des militants du FLN pendant la guerre d'Algérie a été constaté par les pompiers à 21 h 20, selon une source proche du dossier.

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Selon les éditions Pierre-Guillaume de Roux, qui avaient publié les mémoires de l'avocat en février (De mon propre aveu - Souvenir et rêveries), Me Vergès est mort dans la chambre de Voltaire, située dans l'immeuble où il résidait épisodiquement chez des amis depuis une "mauvaise chute" à la fin de l'année 2012. La date de ses obsèques n'était pas connue vendredi en fin de matinée. Le président du Conseil national des barreaux, Christian Charrière-Bournazel, a salué un "très brillant avocat", "courageux" et "indépendant". "Un avocat, ce n'est pas un mercenaire, c'est un chevalier, et Jacques Vergès était un chevalier", a-t-il assuré.

"Un immense avocat" (Me Olivier)

Me Olivier Morice a décrit Jacques Vergès comme un "immense avocat qui n'a jamais manqué de courage et qui restera dans l'histoire". Avocate de Carlos, Isabelle Coutant-Peyre avait débuté en 1981 à son côté. "Cela a été une chance incroyable", a-t-elle déclaré, "il avait une vision politique exemplaire du métier d'avocat et une expérience unique dans les grandes luttes du XXe siècle." "Quand il défendait Klaus Barbie, j'étais du côté des parties civiles. J'étais du bon côté, il était du mauvais, mais c'est ce qui fait la démocratie", a réagi le député FN Gilbert Collard.

"Il n'y a pas beaucoup de géants au barreau, mais lui incontestablement en était un", avec "une période glorieuse quand il défendait le FLN algérien et une moins glorieuse quand il a commencé à défendre des mouvances terroristes comme la bande à Baader", a jugé l'avocat Georges Kiejman. Ce concert de louanges a pourtant connu vendredi matin quelques bémols. Me Alain Jakubowicz, qui représentait le Consistoire israélite de France devant la cour d'assises de Lyon lors du procès Barbie en 1987, a affirmé que, pour lui, Jacques Vergès "n'a jamais été un modèle d'avocat", estimant qu'il avait "tenu des propos inqualifiables" lors de ce procès.

"Des méthodes très controversées (Me Klugman)

"Il est plus exact de qualifier Jacques Vergès de personnage que d'avocat, compte tenu des méthodes de défense très controversées qu'il avait adoptées depuis le procès Barbie", a expliqué Me Patrick Klugman, parlant d'un "immense acteur qui s'est servi de sa robe d'avocat pour illustrer les rôles qu'il s'était lui-même distribués". Me Alain Lévy, avocat de la Fédération nationale des déportés et internés, s'est "étonné des louanges entendues ce matin".

"Il y a quelque chose que je n'entends pas : il s'est servi des procès comme une tribune politique pour défendre ses idées. Il s'est servi du procès Barbie pour faire le procès de la colonisation", a estimé Me Lévy. Me Serge Klarsfeld avait mis en cause en termes virulents Jacques Vergès à l'occasion du procès de l'ancien chef de la Gestapo de Lyon, en déclarant notamment : "Barbie est un tueur de Juifs, Vergès défend les tueurs de Juifs." Interrogé vendredi, il s'est contenté de dire : "J'ai dit suffisamment mon hostilité à Jacques Vergès de son vivant et je m'abstiendrai de parler au moment de sa mort."

EN 2007, le cinéaste Barbet Schroeder avait consacré un documentaire à la vie de l'avocat sulfureux. Intitulé l'avocat de la terreur, le film dévoilait l'itinéraire trouble d'un homme finalement fourvoyé, au nom du tiers-mondisme, auprès des pires génocidaires du siècle.

REGARDEZ la bande-annonce de l'avocat de la terreur


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Commentaires (18)

  • v@lerie

    Je suis d'accord que tout individu à droit à une défense. Mais ce sont ses arguments de defense qui sont insupportable. Il avait une façon d'intellectualiser les débats comme si le commun des mortels était un sombre idiot.
    Un criminel poseur de bombes ? : posons nous la question "quel est la part de responsabilité de l'Etat dans son geste" ? Voila Verges...

  • mh44

    Réprobation ! Il ne traitait une affaire que contre 100000 francs d'avance à l'époque et sans garantie de finalité : il aimait l'argent et faire parler de lui.
    personnage sans intérêt si ce n'est des plaidoiries médiatiques. Il avait compris le filon médiatico-émotionnel.

  • Fredus

    Vergès a défendu des clients fort peu recommandables. Tout accusé a droit à une défense, et c'est à juste titre l'honneur de toute une profession qu'un avocat se lève toujours pour défendre le pire criminel devant ses juges. Mais je persiste à penser que l'avocat le plus avisé est celui qui laisse à un confrère le soin d'assurer une telle défense. Nombreux sont les avocats avisés au barreau, et rares sont ceux qui acceptent d'assurer une telle défense. Au demeurant, si Vergès a souvent accepté de défendre des clients dont la cause était de toute façon perdue d'avance, ce n'était pas seulement pour l'honneur du barreau de Paris, dont il a été secrétaire de la Conférence, ou en raison de convictions politiques assez personnelles, mais c'était aussi pour l'argent et la renommée médiatique. Fermez micros et caméras, et le personnage fabriqué par Vergès s'évapore. Quant à sa stratégie de défense dite de rupture, elle est aussi ambiguë que le personnage : Vergès n'a jamais refusé de se présenter devant une juridiction pour présenter une défense en respectant les règles du code. Il existe des révolutionnaires et des rebelles plus audacieux... Bref, Vergès s'est déshonoré en défendant les pires criminels, même s'il a honoré son barreau d'appartenance.