Mexique : le mal-être de Chuy, l'homme "loup-garou" mexicain

À 41 ans, Jesus Aceves, surnommé Chuy et atteint de l'hypertrichose ou "syndrome du loup-garou", est la cible de moqueries et de discriminations en tout genre.

Source AFP

Jesus Aceves, surnommé Chuy, souffre d'une maladie très rare, l'hypertrichose ou
Jesus Aceves, surnommé Chuy, souffre d'une maladie très rare, l'hypertrichose ou "syndrome du loup-garou" : son visage est recouvert de poils. © YURI CORTEZ

Temps de lecture : 3 min

À chaque fois qu'il sort dans la rue, Chuy déclenche la surprise et la peur sur son passage. À 41 ans, il a fini par s'habituer aux regards indiscrets et parfois aux insultes qui jalonnent depuis l'enfance chacun de ses déplacements. Jesus Aceves, surnommé Chuy, souffre d'une maladie très rare, l'hypertrichose ou "syndrome du loup-garou" : son visage est recouvert de poils. "Pourquoi Dieu m'a fait ainsi ? Pourquoi je ne suis pas comme les autres ?" se demande depuis l'enfance ce Mexicain.

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À l'école, il a enduré les moqueries, les coups, certains lui tiraient les poils du visage pour s'amuser. À l'âge de 13 ans, il s'est réfugié dans l'alcool et a commencé à travailler dans un cirque avec deux de ses cousins qui souffrent de cette même mutation génétique. Seulement une cinquantaine de cas d'hypertrichose auraient été répertoriés dans le monde au cours de l'histoire. Treize de ces cas - sept hommes et six femmes - appartiennent à une même famille, originaire de Loreto, dans l'État de Zacatecas (centre du Mexique). Ils ne souffrent d'aucun autre symptôme que cette pilosité qui recouvre leur visage, mais, pour eux, faire les courses, aller au travail, se faire des amis ou trouver l'âme soeur s'avère très difficile. "Cela ne devrait pas être comme ça, mais hélas, c'est la réalité. On ne te donne pas d'opportunités, simplement parce que tu es différent", explique cet homme à la voix chaude.

Exploité dans des cirques

Sans diplôme et avec un visage qui lui fermait les portes, Chuy n'a trouvé d'autre issue que de se faire employer dans des cirques, payé à peine 8 dollars par jour. Il a ainsi notamment travaillé au Cirque des horreurs à Londres. Cette vie de cirque, durant plus de vingt ans, lui a porté préjudice, sapant toute estime de soi, selon lui. "Mais je ne m'en suis rendu compte que plus tard parce qu'au début, c'était bien." C'est là qu'il a rencontré sa femme, qui ne souffre pas de la même maladie, avec laquelle il a eu une fille de 13 ans qui, elle, a hérité de cette hypertrichose. "J'ai eu de la chance, nous sommes bien ensemble", dit Chuy, qui depuis plusieurs mois ramasse des bouteilles et des cartons dans la rue.

Pour les hommes, cette maladie est un problème, mais pour les femmes, c'est encore pire. Sans doute face à la difficulté d'assumer leur paternité, leur conjoint les abandonne lorsqu'elles tombent enceintes, comme le montre le documentaire Chuy, el hombre lobo (Chuy, l'homme-loup) de la réalisatrice mexicaine Eva Aridjis, qui a passé une année et demie à suivre cette famille, espérant ainsi faire évoluer les consciences. Pour les Mexicains, le cas de Chuy rappelle inévitablement la triste histoire de Julia Pastrana, une femme d'une ethnie indigène de Sinaloa (nord) souffrant de cette maladie génétique et aux traits simiesques, qui fut exhibée en Europe au XIXe siècle comme la "femme singe" ou la "femme la plus laide du monde". Son corps fut embaumé et exposé en Norvège dans une exposition de "cas étranges". Ce n'est qu'en 2013 que son corps a pu être enterré dans sa terre natale.

Assis sur un banc dans un quartier à la mode de Mexico, Chuy semble aujourd'hui indifférent aux regards des joggers qui ralentissent pour l'observer. Fatigué des moqueries et de la discrimination, il a décidé d'assumer sa condition et de laisser de côté l'alcool. Il avait pour habitude de marcher en se cachant le visage avec les mains. Aujourd'hui, il affronte les regards, sans complexe. "J'en ai eu assez de me sentir mal. Je suis l'égal des autres et je veux me sentir heureux. Si Dieu nous a faits tous différents, c'est pour une bonne raison", conclut-il.

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Commentaire (1)

  • Clicoeur

    J'ai vu l'autre soir le documentaire sur D8. Je plains les gens atteints de cette maladie rare due à un dérèglement hormonal. À la longue, tous ces poils, ça doit être rasoir.