Méréville : Jean-Louis Bory, voix mythique du Masque et la Plume

Méréville : Jean-Louis Bory, voix mythique du Masque et la Plume

    C'était l'une des plus belles plumes du « Masque ». L'une des voix emblématiques de l'émission culturelle de France Inter qui fête ce week-end ses 60 ans. Dimanche, à l'occasion d'une soirée spéciale, le nom de Jean-Louis Bory va de nouveau chatouiller les oreilles des auditeurs du Masque et la Plume habitués aux savoureuses joutes verbales entre critiques. Un nom qui a fait la gloire de la doyenne des émissions de radio dans les années 1960 et 70 mais qui, depuis, est un peu passé dans l'oubli.A Méréville, le village beauceron où cet écrivain et critique de cinéma est né en 1919 et où il s'est donné la mort près de six décennies plus tard, le souvenir de Jean-Louis Bory résonne encore. La bibliothèque porte son nom. Une rue de la commune aussi. Mais c'est surtout la voix espiègle de ce « sacré personnage » qui reste en mémoire. Ici, plus qu'ailleurs, « on écoutait tout le temps le Masque et la Plumeâ?¦ quand y avait Bory », sourit Bernard Binvel, historien local qui a bien connu l'écrivain qui revenait « presque tous les week-endsà Méréville ». Plus précisément à la Calife, une maison de famille bordant la Juine, « aujourd'hui en vente », précise le maire, Guy Desmurs (SE).Prix Goncourt à 26 ansS'il vivait la semaine à Paris où il était notamment professeur au lycée Henri IV, Jean-Louis Bory n'a jamais oublié son village natal situé aux confins de l'Ile-de-France. Son premier roman, « Mon village à l'heure allemande », lui vaut en 1945 un Goncourt à l'âge de 26 ans (un record) et quelques remarques de ses voisins. Car si l'action se déroule dans la ville imaginaire de Jumainville, beaucoup d'habitants de Méréville se sont reconnus au fil des pages. « Certains lui en ont voulu longtemps », note Bernard Binvel. Jean-Louis Bory â?? qui a été parmi les premiers intellectuels à assumer son homosexualité â?? parlera de Méréville dans de nombreux autres ouvrages qui ne connurent cependant pas le même succès que ce premier coup de maître.

    Jean-Louis Bory. (AFP.) Très impliqué au village â?? il était notamment membre de la société historique et du comité des écoles â?? il lui était arrivé de prêter sa plume et son alacrité au bulletin municipal.Aujourd'hui, ses romans sont difficiles à trouver en librairie. « Bory s'est suicidé, l'édition l'a enterré », assène Jérome Garcin*, l'actuel chef d'orchestre du Masque et la Plume. Ce qui n'empêche pas la société historique locale de travailler d'arrache-pied pour constituer le fonds le plus complet comprenant ses ouvrages, les préfaces qu'il a rédigées, de nombreuses coupures de presse mais aussi, complète Bernard Binvel, « un manuscrit qu'il nous a donnés de son vivant ».De quoi continuer à faire la promotion d'une plume qui avait coutume de se cacher derrière un masque le dimanche soir.On lui doit le générique de l'émission Vous connaissez sûrement cet air, peut-être moins son nom : La Fileuse, de Mendelssohn. Chaque dimanche, peu après 20 heures, c'est par cette petite cascade de piano que débute l'émission le Masque et la Plume sur France Inter. Une ritournelle choisie en 1978 par François-Régis Bastide, alors présentateur de l'émission, pour remonter le moral de son chroniqueur Jean-Louis Bory, frappé d'une violente dépression. « A François-Régis Bastide, l'alacrité de ce morceau [â?¦] évoquait en effet le parler enjoué et précipité du critique de cinéma du Nouvel Obs », rapporte l'actuel animateur de l'émission, Jérôme Garcin*. Mais huit mois plus tard, Bory met fin à ses jours à Méréville.* « Nos dimanches soirs », de Jérôme Garcin, 299 pages, 19 â?¬, Ed. Grasset.

    Jean-Louis Bory (à gauche) aux côtés de l'animateur de l'époque du Masque et la Plume, François-Régis Bastide. * « Nos dimanches soirs », de Jérôme Garcin, 299 pages, 19 â?¬, Ed. Grasset.