Daniel Prévost écrivain, l’adoucisseur de douleurs

Célèbre pour ses talents de comédiens, Daniel Prévost, 78 ans, est aussi un prolifique écrivain. Dans «Tu ne sauras jamais combien je t’aime», il dit les apaisements de l’amour.

 Daniel Prévost publie son seizième livre, dans lequel il aborde la perte de l’être aimé, le deuil et la reconstruction.
Daniel Prévost publie son seizième livre, dans lequel il aborde la perte de l’être aimé, le deuil et la reconstruction. Tony Tricanh

    En 1985, il publiait « Coco Belles Nattes » dans lequel il racontait son enfance cassée. En 1995, dans « Le Pont de la Révolte », il creusait à nouveau ses origines de petit Kabyle ignorant tout de son père et bientôt sans mère. Et comme rien n'est jamais suffisamment dit quand il s'agit de désarroi, il y revenait, en 1998, dans « Le Passé sous silence ».

    En 2005, « Lettres d'adieu ». En 2012, une éclaircie : « Madame B., ma seconde mère ». Ces titres, mais d'autres aussi, bien différents : de la galéjade dans le grave. Retour du pitre dans les chapitres. Seize livres en tout.

    Eh oui : on ne le sait pas toujours, mais l'acteur Daniel Prévost, 78 ans, invité ce week-end de la Fête du Livre de Talloires (Haute-Savoie) n'est pas seulement comédien. Il aime aussi se faire un sang d'encre, stylo en main, pour raconter ce qu'a été sa vie, avec ses « aspérités » dit-il.

    «Je ne crois pas qu'on efface tout et qu'on recommence»

    La lumière en est une aussi. À l'image de celle qui surgit dans ce nouveau livre en embrasant son titre : « Tu ne sauras jamais combien je t'aime ». Qui ? « La main tendue », écrit-il, alias Muriel. L'amour retrouvé.

    Et comme un bonheur n'arrive jamais seul, le lien renoué avec Jonathan, son fils à son tour devenu père. Ce roman vrai, comme tous les autres, adoucit le drame qu'a vécu Daniel en 2007 lorsqu'il a perdu la femme de sa vie, Yette, sur le tournage de « Monsieur Joseph », d'Olivier Langlois.

    Dans son livre, Daniel Prévost parle notamment du décès de sa femme. LP/Frédéric DUGIT
    Dans son livre, Daniel Prévost parle notamment du décès de sa femme. LP/Frédéric DUGIT Tony Tricanh

    Mais n'allez pas imaginer que le deuil soit recouvert d'un voile. « Je ne suis pas du genre à croire qu'on efface tout et qu'on recommence », dit-il. D'ailleurs, tout au long du récit, Kirsten -c'est ainsi qu'il nomme Yette dans le livre- est présente entre les lignes, qui se faufile, qui conseille, qui converse. Bref, qui suit le dossier.

    Des vers libres écrits dès 14 ans

    Chez l'ancienne figure de l'émission de Jacques Martin « Le Petit Rapporteur », mythique intervieweur du maire de Montcuq – « Je suis heureux de vous montrer Montcuq à la télévision » - écrire a toujours été une seconde nature.

    A 14 ans, ce libertaire de l'humour écrivait des vers libres. Bien plus tard, confie-t-il, l'écriture l'a non seulement aidé « à (me) libérer », mais aussi à rendre hommage aux anges de passage qui l'ont aidé à sortir de l'ornière.

    « La question que je me pose, c'est pourquoi les gens qu'on aime meurent-ils ? Et dans ce cas, y a-t-il une loi de compensation ? C'est ce qu'on dit. J'ai tendance à y croire même si je reste un peu dubitatif ». Il n'empêche. « Ecrire sur ces âmes bienveillantes, c'est ma façon de leur redonner une seconde vie. »

    «Le seul truc auquel je n'ai pas touché, c'est la peinture»

    Dans celle qu'il a traversée jusqu'ici, Daniel Prévost a fait rire les gens, les a fait pleurer, a donné des conférences sur l'identité et ses livres sont utilisés à l'université dans des cours d'introduction à la culture berbère.

    « Le seul truc auquel je n'ai pas touché, s'amuse-t-il, c'est la peinture. J'étais trop nul ! » Mais dans ce livre encore, dans lequel il ne se prive pas de repartir du début, ses amis, ses emmerdes, ses amours, histoire de refaire le point, de se « reconstruire » à l'aune de son nouveau bonheur, Prévost joue les pointillistes, n'ellipse rien, repasse chaque détail à la pointe fine.

    « Ça vient d'un professeur de français qui, quand il nous donnait une rédaction à faire, nous disait : Décrivez, décrivez, décrivez ! » A Talloires, Daniel pourra vérifier combien il est aimé.

    NOTE DE LA RÉDACTION : 5/5

    « Tu ne sauras jamais combien je t'aime », de Daniel Prévost, éditions Le Cherche midi, 181 pages, 17 euros.

    BIO EXPRESS