La maladie du sommeil est en recul. Même si l’objectif de l’Organisation mondiale de la santé de l’éradiquer d’ici à 2020 a fait long feu, le nombre d’infections humaines par le trypanosome, le parasite porté par la mouche tsé-tsé, est passé sous les 1 000 cas depuis 2018. Les campagnes de santé publique, notamment la multiplication des pièges, ont porté leurs fruits. Elle est loin la triste décennie 1896-1906, où la maladie aurait tué près de 1 million de personnes dans le bassin du Congo.
Pourtant, le mot tsetse en langue tswana signifie « mouche qui tue le bétail ». Et du côté animal, Glossina morsitans continue de faire des ravages. On estime à 3 millions le nombre de vaches et de chevaux victimes chaque année du parasite. Le poids économique du fléau pour l’agriculture africaine a été évalué à 4,5 milliards d’euros par an.
Un article paru dans la revue Science le 17 février pourrait annoncer de bonnes nouvelles. Une équipe de l’université Yale, aux Etats-Unis, vient de découvrir des phéromones sexuelles volatiles chez la mouche tsé-tsé. Que celles-ci existent, peu en doutaient. L’invite à la copulation par voie aérienne a déjà été mise en évidence chez des abeilles, des bourdons, des papillons, et même chez quelques espèces de mouches dont la drosophile. « Mais chez les tsé-tsé, ces phéromones volatiles n’avaient pas été trouvées, malgré cent ans de recherche », souligne John Carlson, professeur de biologie à Yale et coordinateur de la recherche.
Une cible prometteuse
Une étude au design minutieux leur a permis d’y parvenir. D’abord, ils ont fait mariner des mouches dans un liquide pendant vingt-quatre heures, puis ont analysé celui-ci par spectrographie de masse en phase gazeuse. Ils y ont découvert six composés déjà identifiés comme phéromones chez d’autres insectes. Ils les ont ensuite testés en plaçant une goutte de chacun d’entre eux sur un leurre ou sur une mouche d’une autre espèce, des appâts habituellement boudés par les glossines. Les femelles sont restées insensibles aux doux parfums. En revanche, trois des composés ont séduit les mâles. L’un d’entre eux, le palmitoléate de méthyle (MPO), s’est montré particulièrement efficace, non seulement pour les attirer, mais pour les immobiliser sur le leurre.
Les scientifiques ont enfin étudié les antennes. D’abord en les retirant : sans surprise, les mâles sont restés sans réaction face au MPO. Puis les chercheurs y ont analysé les neurones et ont isolé une sous-population particulièrement réactive face au composé chimique. Pour l’équipe américaine, l’ensemble de ces résultats laisse entrevoir une cible prometteuse pour la conception de pièges spécifiques – le but du jeu étant de ne pas attirer d’insectes inoffensifs.
Il vous reste 31.09% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.