Dans un entretien au journal El Pais en 2000, il disait : "J'ai été de tout sauf de droite." José Luis de Vilallonga, chroniqueur, acteur, écrivain et Grand d'Espagne, est mort à Majorque, aux îles Baléares, jeudi 30 août, à l'âge de 87 ans. Agnostique, il a été selon sa volonté incinéré à Barcelone.
Après une vie digne d'un roman picaresque, ce personnage aux multiples facettes est mort ruiné, veillé par sa deuxième ex-femme (il s'est marié trois fois) et le mari de celle-ci.
Il était né à Madrid dans une famille très aristocratique qu'il a décrite souvent, dans ses Mémoires non autorisées ou les anecdotes qu'il aimait raconter, comme une famille rigide, élitiste (son père portait monocle en toutes circonstances), sans idéologie, fossilisée dans le passé.
Ses parents s'étaient exilés en France, à Biarritz, lorsque fut proclamée la deuxième République en Espagne (1931), mais ils y retournèrent six mois plus tard. Il était toutefois élève au collège des dominicains de Saint-Elme d'Arcachon, quand il retourna en Espagne, sur injonction paternelle, pour participer à la guerre civile. Il fit alors partie d'un peloton d'exécution, à l'âge de 16 ans, du côté des troupes franquistes, un traumatisme dont il ne se remit jamais.
Il fut diplomate pendant quatre ans en Angleterre puis partit, en 1945, élever des chevaux en Argentine. Il s'exila de nouveau en France, en 1950, mais cette fois par opposition à la dictature du général Franco et resta en exil jusqu'à la mort du Caudillo.
Après la publication de son premier roman Les Ramblas se terminent dans la mer, en 1954, il était interdit de séjour dans son pays. Il eut droit toutefois à un exil plutôt pailleté si l'on compare avec les autres expatriés de la même époque : il côtoyait les grands de ce monde et ce que l'on appelait la jet-société, toujours entouré de jolies femmes, le sourire séducteur, les cheveux un peu trop longs, et habillé à la perfection.
Il vécut de nouveau en Espagne jusqu'à la fin des années 1980, revint en France puis s'installa à Barcelone.
Mais il ne fut pas seulement un dandy aristocrate. Il aurait pu devenir diplomate, mais il commença à écrire pour la presse dans la Barcelone de l'après-guerre civile et ce goût de l'écriture ne le quitta jamais. Il travailla pour différents magazines, en France et en Espagne, de Paris Match à Marie-Claire ou à Vogue ou encore la version espagnole de Playboy, dont il fut le directeur.
Il est également l'auteur d'une trentaine de livres dont le plus connu est sans doute sa biographie du roi Juan Carlos, intitulée sobrement Le Roi, publiée en France en 1993, par Bernard Fixot, et qui, traduite en espagnol, fut un grand succès.
Il avait pu profiter non seulement de sa condition et des liens de sa famille avec la famille royale mais aussi du fait que Juan Carlos était alors immobilisé à la suite d'un accident de ski et avait pu lui consacrer quelque vingt-sept heures de conversations.
Il écrivit ensuite deux autres tomes de cette trilogie consacrée à la monarchie (Franco et le roi et Le Sabre du Caudillo) mais aussi un livre d'entretiens avec Federico Fellini, trois tomes de Mémoires, différents ouvrages relatant ses rencontres avec les personnalités de son entourage.
Ses écrits souvent ironiques et provocateurs lui valurent des complications, comme un procès en diffamation qui l'opposa en 1985 au duc de Cadiz, dont il avait relaté les déboires conjugaux, ou un livre jamais écrit avec le baron Thyssen qui mit fin à leur amitié.
PLUS DE 70 FILMS À SON PALMARÈS
Il devint acteur pour Louis Malle, en 1958, dans Les Amants et, en 1961, il tourna dans Cléo de 5 à 7, d'Agnès Varda, et Diamants sur canapé, avec Audrey Hepburn, pour Blake Edwards. On le verra dans des films aussi différents que Mélodie en sous-sol, d'Henri Verneuil, aux côtés de Jean Gabin et d'Alain Delon, Juliette des esprits, de Federico Fellini, ou Le Corniaud, de Gérard Oury, entre Bourvil et Louis de Funès. Plus de 70 films figurent à son palmarès.
Monarchiste à la fin de sa vie, il avait de la sympathie pour les communistes et adhéra au Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) après le coup d'Etat manqué du colonel de la Guardia Civil Antonio Tejero, le 23 février 1981. Mais il abandonna ses activités militantes en 1994, après les différents scandales liés à la corruption du dernier gouvernement de Felipe Gonzalez.
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