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Avec « La Mer à l’envers », Marie Darrieussecq parie sur l’humanité

Rose, la quarantaine en crise, vient en aide à un migrant, Younès. Le nouveau roman de l’auteure d’« Il faut beaucoup aimer les hommes » (prix Médicis) est un texte subtil et grave, vivant et drôle.

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Publié le 28 août 2019 à 16h00, modifié le 01 septembre 2019 à 06h40

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L’écrivaine Marie Darrieussecq, à Paris, en 2017.

« La Mer à l’envers », de Marie Darrieussecq, P.O.L, 250 p., 18,50 €.

Rose tangue, bercée par la houle. Sur un paquebot de croisière gigantesque – « Douze étages, trois cents mètres de long, quatre cents êtres humains » –, voguant en Méditerranée, Rose titube un peu, sous l’effet des vagues et, parfois, des boissons du bar. Cette psychologue quadragénaire et parisienne hésite à quitter son mari ou à rester avec lui pour partir s’installer, comme ils l’ont prévu, dans son village natal de Clèves ; elle ne sait pas s’il faut profiter de l’irréelle douceur de l’air ou se laisser gagner par « l’angoisse climatique » que cette anomalie, en plein hiver, fait naître.

Sur le bateau, mais plus encore après, de retour à Paris, puis après avoir (finalement) déménagé à Clèves, Rose, surtout, hésite à propos de la conduite à tenir avec Younès, le garçon nigérien recueilli par le navire touristique avec d’autres migrants croisés une nuit alors qu’ils faisaient naufrage. Elle lui a laissé le téléphone de son fils, grâce auquel il la contactera arrivé à Paris, puis à Calais, d’où il espère passer en Angleterre. Avec lui, elle hésite entre passivité et engagement, inaction et héroïsme ordinaire.

Apparitions et les disparitions

Ou plutôt, la protagoniste de La Mer à l’envers oscille de l’une à l’autre, et c’est ce qui rend le nouveau livre de Marie ­Darrieussecq si intéressant à tous les ­niveaux : littérairement riche, politiquement ni dans le surplomb ni dans la résignation – aussi tâtonnant que Rose, et nombre de lecteurs avec elle. L’oscillation est du reste le grand mouvement à l’œuvre chez l’écrivaine depuis Truismes (publié, comme tous ses livres, chez P.O.L, 1996) : ce premier roman dépeignait moins la métamorphose de la narratrice en truie, ainsi qu’on le résume si souvent, que son aller-retour entre les états humain et porcin. Le deuxième, Naissance des fantômes (1998), se construisait sur l’alternance entre absence et présence, appelée à devenir un motif central de ce travail hanté par les apparitions et les disparitions, où la mer et son ressac sont omniprésents et impulsent leur tempo (Le Mal de mer, 1999 ; Précisions sur les vagues, 2008).

Marie Darrieussecq parvient à dire en quelques mots les pensées de son personnage et à faire entendre dans le même mouvement le bruit de fond de l’époque

Ainsi, Rose va d’élans en moments d’accablement, de grandes bouffées de courage en instants de pusillanimité. Elle s’admoneste : « Du nerf. » C’était aussi ce que se répétait Viviane, la narratrice du dystopique Notre vie dans les forêts (2017), empruntant l’expression à un ­titre de Robert Pinget (Minuit, 1990), où un personnage peinait à écrire – « Recommence, renonce, recommence. »

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