Publié le 21 juin 2018 à 08h55, modifié le 21 juin 2018 à 09h57
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Bien que né en Suède de parents suédois et autrichien, Erik Dietman (1937-2002) aimait les jeux de mots en français. Quand il écrit « l’art est au beurre noisette », il faut entendre « la raie au beurre noisette », que les recettes conseillent d’accompagner de câpres. Il n’y a pas de câpres dans l’œuvre, mais une raie d’un beau jaune safran peinte sur une mappemonde pour salle de classe. De ses ailes, tel un vampire planant, elle couvre la planète, de New York à Tokyo. Des noisettes – le fruit –, un rectangle orange rehaussé de vert, un chapeau de clown, une fourchette et un couteau sont aussi disposés sur la carte. Une inscription manuscrite proclame dans un angle « That’s my diet man », ce qui prouve que l’artiste aimait aussi les jeux de mots polyglottes. L’œuvre s’appelle Geograffiti et semble d’abord n’être qu’une plaisanterie visuelle saugrenue. Si ce n’est qu’elle sous-entend que l’art est affaire de recettes ; qu’il peut être riche et gras, comme on le dit de certains plats ; qu’il se consomme partout ; et aussi qu’il y a un côté clownesque dans cette affaire.
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Au long de l’exposition que le Musée des beaux-arts de Lyon lui consacre, ces qualités se vérifient : une inventivité formelle constante et un penchant prononcé pour la dérision et le sacrilège, dont l’art et les artistes sont ici les principales cibles. Il ne s’agit pas d’une rétrospective, mais d’une introduction à l’œuvre, en attendant plus. Il s’agit aussi pour le musée d’annoncer qu’il vient de recevoir des collectionneurs Marc, Dominique et Pascal Robelin une vingtaine d’œuvres de Dietman et qu’il a acquis Tombe, sculpture de 1992, interprétation légère du motif de la stèle funéraire.
A cet ensemble s’ajoutent pour l’occasion des prêts de la même collection Robelin, de la galerie Claudine Papillon et du Musée d’art contemporain de Lyon. Celui-ci conserve l’une des installations majeures de Dietman, intitulée – pardon pour la longueur du titre : L’Art mol et raide ou l’épilepsisme-sismographe pour têtes épilées : mini male head coiffée du grand mal laid comme une aide minimale… Lesdites têtes sont des crânes humains perchés sur des socles cylindriques en ciment, des parallélépipèdes de bronze noir enfoncés dans les os blanchis. Des animaux de bronze un peu abrégés s’ébattent parmi ces vanités ricanantes. L’allusion au minimalisme est claire : preuve de l’ironie dietmanienne. L’élégance des jeux de matériaux et de symboles est tout aussi flagrante. En matière de sculpture et d’assemblage, peu de ses contemporains pourraient lui être comparés sans inconvénient pour eux.
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