Publié le 14 septembre 2017 à 06h43, modifié le 14 septembre 2017 à 08h29
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Le massacre des Innocents : l’expression est passée dans la langue commune pour qualifier un carnage de civils, sans que l’on se souvienne qu’elle vient de l’Evangile de Matthieu. Il raconte comment, croyant se prémunir de la venue du Christ, Hérode, roi de Judée, ordonne de tuer tous les enfants de moins de 2 ans à Bethléem. Jésus lui échappe, ses parents étant partis vers l’Egypte. Depuis des siècles, bien au-delà de cet épisode, le massacre des Innocents est celui des victimes civiles de toutes les guerres, qu’elles en meurent ou disparaissent en les fuyant, comme les noyés de la Méditerranée.
En peinture, Le Massacre des Innocents, c’est une œuvre que Nicolas Poussin (1594-1665) peint à Rome vers 1627-1628. Des représentations du sujet, il y en a eu avant et après, mais c’est lui qui s’est inscrit dans les mémoires et dans l’Histoire, cas exceptionnel d’un sujet dont un artiste se saisit d’une manière si puissante qu’il le fait définitivement sien.
Le testament du duc d’Aumale stipule que ses collections ne pourront être prêtées hors de Chantilly
Cette situation justifiait et rendait risqué le projet de le confronter à d’autres versions, antérieures ou postérieures. Qui soutiendrait la comparaison ? Il n’en est pas moins tenté au château de Chantilly (Oise). Pourquoi en ce lieu, le plus impropre qui soit à accueillir une réflexion sur le tragique de l’Histoire tant il est ostensiblement luxueux ? Pour une raison juridique.
La toile, restée à Rome dans la famille de son commanditaire, Vincenzo Giustiniani, est achetée en 1804 par Lucien Bonaparte, frère de Napoléon, auquel il est difficile de refuser de le lui céder alors que la ville est sous occupation française. A la chute de l’Empire, après des pérégrinations, le tableau aboutit chez un marchand londonien où il est acquis en 1854 par le duc d’Aumale, fils de Louis-Philippe exilé en Angleterre en 1848. Rentré en France en 1870, le duc se fait construire son château pseudo-Renaissance à Chantilly et y accroche le Poussin. Avant de mourir, il a une idée détestable : son testament stipule que ses collections ne pourront être prêtées hors de Chantilly.
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L’exposition qui se tient à l’étroit dans la salle du jeu de paume ne pouvait donc avoir lieu ailleurs, au Louvre ou au Grand Palais, où elle aurait eu un espace digne d’elle. C’est d’autant plus regrettable qu’elle s’organise donc autour d’une œuvre majeure de l’histoire de la peinture et dispose autour d’elle une trentaine d’autres, dont Le Charnier, que Picasso a peint en 1944-1945, et Head II, de Francis Bacon, datant de 1949, allégorie monstrueuse de l’inhumanité en l’homme.
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