A Roubaix, la crainte d'un repli communautaire
L'islam rigoriste est ostentatoire à Roubaix (Nord), la ville la plus pauvre de France. Un rapport pointe l'isolement de certains habitants.
Au supermarché Le Triangle à Roubaix (Nord), les caissières, toutes voilées, alternent entre "Salam" et "Bonjour", en fonction de la clientèle. Partout dans les allées du magasin, le français est traduit en arabe, et à la sortie, une urne invite au don pour la construction d'une nouvelle mosquée. La ville de 96.000 habitants en compte déjà sept, dont une salafiste. Dans la rue aux maisons de briques rouges, les commerces s'appellent L'Aziza, Les Mille Merveilles, Les Délices du Maghreb. Et proposent pâtisseries orientales, voiles, livres en arabe ou viande halal. "Ici, c'est comme au bled!", s'exclame en souriant Hourya, qui flotte dans un jilbab, un voile enveloppant tout son corps.
Ici, en plein quartier de reconquête républicaine, l'islam est ostentatoire. Mais est-ce vraiment un problème? Oui, à en croire un rapport sur l'efficacité des politiques publiques mises en œuvre à Roubaix émanant des services d'inspection de plusieurs ministères. Ce document daté de juin 2019 et commandé par le Premier ministre pointe une "tendance au repli communautaire". "Certains lieux ne sont plus fréquentés par des femmes", "le port du voile a fortement progressé", s'inquiètent les auteurs. Une source policière dépeint, dans certains quartiers, "un laisser-aller total, un non-respect général de la loi française". Stationnement illicite, employés de commerces en situation irrégulière, terrasses de cafés non déclarées : "Ce sont des rues qui se gangrènent."
Des soutiens de Tariq Ramadan
L'ancienne capitale de la filature, désormais ville aux tristes statistiques – la plus pauvre de France avec 45% de la population au dessous du seuil de pauvreté et 13% de chômeurs – est un terreau pour le salafisme, conception rigoriste de l'islam. Ici, Tariq Ramadan, le petit-fils du fondateur des Frères musulmans, a par ailleurs fait salle comble plusieurs fois, à partir des années 1990 et jusqu'en 2013 ; il y compte encore quelques soutiens. De Roubaix est partie, en février 2018, une discrète collecte de fonds pour aider l'islamologue suisse, mis en examen pour viols, à payer ses frais de justice, comme l'avait révélé La Voix du Nord.
Le célèbre prédicateur avait encore, au début des années 2010, "son rond de serviette", écrit le quotidien local, dans les locaux de Pastel FM. Une radio communautaire dont les subventions ont été coupées il y a deux ans par la Région en raison de soupçons de prosélytisme.
"Il y a un gros travail d'éducation à faire sur la laïcité
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Ils sont nombreux, parmi les acteurs du très dense tissu associatif, à se démener pour lutter contre la tentation de repli. Les éducateurs, glisse l'un d'entre eux, s'emploient à convaincre certains jeunes que "voter, ce n'est pas haram", c'est‑à-dire pas contraire aux préceptes du Coran. "Il y a un gros travail d'éducation à faire sur la laïcité", abonde Michel David, ancien directeur général adjoint des services de la ville. Le rapport interministériel de juin 2019 révèle aussi "une hausse des demandes d'enseignement à domicile pour des motifs d'ordre confessionnel".
Les ghettos de riches voisins
Ibrahim Alci, président de l'association franco-turque, passe ses journées à répéter aux enfants : "Je leur dis : 'T'es musulman, mais avant tout t'es un citoyen français. Ce n'est pas évident.'" Et l'homme de se réjouir qu'il n'y ait eu dans sa communauté, forte de quelque 15.000 personnes, aucun départ en Syrie.
Le repli communautaire est tentant pour de nombreux jeunes qui se sentent discriminés dès qu'ils mettent un pied en dehors de leur quartier. Ali Rahni, éducateur spécialisé, pointe avant tout "un communautarisme de classe", le regroupement, souvent subi, de personnes dont le dénominateur commun, outre l'islam, est la pauvreté. À quelques kilomètres, lance le militant associatif, "il y a le même phénomène, mais entre riches". Si Roubaix est une ville ouvrière, ce qu'on appelle ici "le triangle BMW" (Bondues, Marcq-en-Barœul, Wasquehal), les initiales des communes chics voisines, abritent les descendants des patrons des grandes usines.
Pour faire cohabiter les quelque 80 nationalités présentes à Roubaix, André Lazaoui, président de l'association Roubaix Sport Culture, forte de 480 adhérents, organise depuis dix-neuf ans un tournoi de foot international pour enfants en juin. Il promeut le "vivre-ensemble" mais reconnaît que parfois il est gagné par le découragement : "Lorsqu'il y a eu la suppression des contrats aidés, j'avais dit au Premier ministre : 'Vous êtes en train de laisser le terrain à d'autres… Nous, on l'occupe, on lutte pour l'égalité filles-garçons, la laïcité. Aujourd'hui on est à l'agonie, à l'asphyxie.'" Méfiant, mais toujours plein d'espoir, il attend avec impatience les "annonces" du gouvernement contre le communautarisme.
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