Pascale Casanova, quand le handicap mène à l'excellence

  • Pascale Casanova avec plusieurs de ses médailles olympiques et son autobiographie, parue en 2015. À droite, le même livre mais traduit en braille.
    Pascale Casanova avec plusieurs de ses médailles olympiques et son autobiographie, parue en 2015. À droite, le même livre mais traduit en braille. Photo DDM, Thierry Bordas
Publié le , mis à jour
Cyril Doumergue

«Ils ne savaient pas que c'était impossible, alors ils l'ont fait». La célèbre phrase de l'écrivain Mark Twain est épinglée dans l'entrée de la chaleureuse maison de Pascale Casanova, dans le quartier Rangueil à Toulouse. Comme une rengaine, un leitmotiv. Née déficiente visuelle il y a 42 ans, atteinte d'une malformation cardiaque, la Toulousaine a remporté trois titres de championne paralympique de ski alpin, et onze médailles aux Jeux au total.

Elle distingue les formes mais ne voit pas à 1 mètre. Alors Pascale Casanova a appris, depuis la petite enfance, à faire beaucoup de choses mieux que bien des valides. Plonger à 100 km/h dans une descente olympique derrière un guide, elle sait faire. Faire hypokhâgne/khâgne et Sciences Po, passer l'examen pour devenir secouriste, puis carrément chef d'équipe à la Croix-Rouge, elle a fait. Taper à l'ordinateur aussi vite que la parole humaine, elle le fait depuis le lycée. Écrire un livre sur sa vie et ses expériences, elle y pensait depuis toute petite. Et, évidemment, elle l'a fait.

Dans «On m'avait dit que c'était impossible», paru en 2015 (1), elle raconte comment dès l'école élémentaire, elle se bat pour être considérée comme l'équivalent des valides.

«J'étais une des premières dans la région, en France peut-être, à aller dans une école «normale». À l'époque, il fallait que la maîtresse dise à voix haute tout ce qu'elle écrivait au tableau, pour que j'aie le temps de noter. Plus tard, pour les cours de matchs au lycée, je demandais à un camarade qui écrivait bien, et en grosses lettres, de me prêter ses cours. Ensuite, j'ai eu un ordinateur. C'est là que j'ai appris à taper très vite. Il a toujours fallu que j'en fasse deux fois plus que les autres pour y arriver.»

À force de persévérance, les résultats s'enchaînent. Élève brillante, Pascale réussit sa scolarité. Mais la passion du ski la rattrape. Championnats de France et Mondiaux la mènent naturellement aux Jeux paralympiques, en 1998 à Nagano. Trois olympiades plus tard, elle totalise onze médailles sur douze possibles. Dont trois titres. Pour la petite Pascale, mise sur des skis dès quatre ans par ses parents, l'exploit est de taille.

Dans le sport aussi, elle devra se battre pour tout. Les différences avec les valides sont criantes, à commencer par l'exposition médiatique. «Aujourd'hui, les épreuves sont retransmises sur France 4. Mais à Nagano, il n'y avait quasiment aucune image». Qui se souvient de Pascale Casanova en 2002, remportant l'or paralympique à Salt Lake City, sur la même piste que Carole Montillet, championne olympique quelques jours auparavant ? L'argent, aussi, sépare.

«Pour le même titre, sur la même piste, Carole a dû toucher 8 fois plus d'argent. La somme était déjà énorme pour moi. Mais pourquoi cette différence ?».

Grâce à des athlètes comme Pascale et à leur combat pour l'égalité, depuis 2006, les primes d'état pour une médaille sont les mêmes entre Jeux Olympiques et Jeux Paralympiques. Encore une victoire.

Aujourd'hui, le ski n'est plus au centre de la vie de Pascale. «Depuis 2006, j'ai dû remonter cinq fois sur des skis», sourit-elle.

Aujourd'hui, le combat de Pascale Casanova passe par son livre — «pour donner aux jeunes handicapés un modèle, leur dire que c'est possible» — mais aussi par son engagement au sein du Centre régional de ressources Culture et Handicap, créé fin 2014, qui propose notamment une plateforme numérique qui recense tous les événements, les musées, les parcs, les ressources audio et vidéo accessibles aux personnes handicapées.

«Quand on sait qu'il y a près de 10 % de personnes handicapées en France, il y a une vraie attente.» Pour améliorer le quotidien des personnes handicapées aussi, il reste du chemin à parcourir.

«Soyons honnêtes, beaucoup de choses sont faites. Mais la marge de progression reste énorme. Dans mon cas, l'acceptation de mon chien guide dans tous les lieux publics reste un problème. Récemment, dans un hôtel, quatre employés différents lui ont refusé l'accès. Il ne pouvait aller nulle part : ni dans la chambre, ni au restaurant, ni dans le hall… Il fallait à chaque fois sortir les textes de la loi, pour se justifier.»

Prévention, information, le chemin à parcourir reste long. «Mais on va y arriver. Pour qu'un jour, la société s'adapte au maximum à tous les types de handicap.» Qui a dit que c'était impossible ?

(1) « On m'avait dit que c'était impossible », Pascale Casanova, éditions Loubatières

Le Petit Prince de Saint-Exupéry, et notamment la rencontre avec le renard, qui lui apprend comment naît l'amitié. «On ne voit bien qu'avec le cœur. L'essentiel est invisible pour les yeux». Je fais un parallèle avec la relation avec mon guide en compétition, si profonde et en même temps, qui peut être si facilement brisée. C'est un de mes personnages préférés.

Tugan Sokhiev, le chef de l'orchestre du Capitole. Je ne le connais pas personnellement, mais à ce que je perçois de lui en concert, il semble se donner à fond dans ce qu'il aime. Par contre, un peu comme moi, quand il n'apprécie pas, il le montre et ça se voit.

Naissance à Toulouse, annonce de sa déficience visuelle et de sa malformation cardiaque

Intègre une école maternelle classique, malgré son handicap

Baccalauréat, série B (économique et sociale)

«Prépa» littéraire au lycée Saint-Sernin, puis Sciences-Po Toulouse, licence de droit, DESS à l'IAE de Toulouse

intègre l'équipe de France de ski alpin handisport

onze médailles aux Jeux paralympiques en ski alpin, dont trois titres.

devient secouriste pour la Croix-Rouge, puis chef d'équipe en 2007

sortie du livre «On m'avait dit que c'était impossible»

Pascale Casanova est Chevalier de la Légion d'Honneur et Officier dans l'Ordre national du Mérite

Ma sensation préférée est celle de skier sur une neige fraîche, alors que les flocons continuent à tomber. Les bruits sont étouffés, on se retrouve comme dans une bulle, avec le froid qui fouette le visage. C'est une sensation décuplée pour une malvoyante, que j'ai ressentie très jeune, et qui m'a guidée toute ma carrière.


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