CALAIS - Son arrestation a ulcéré l'extrême droite. Le général Christian Piquemal, 75 ans, devait comparaître avec quatre autres personnes en comparution immédiate lundi 8 février au tribunal de Boulogne-sur-Mer mais son état de santé a finalement nécessité un report au 12 mai. Ancien patron de la Légion étrangère, il a été interpellé samedi à Calais lors d'un rassemblement anti-migrants à l'appel du mouvement islamophobe Pegida.
Désigné comme ayant eu "le rôle principal" dans cette manifestation interdite qui a réuni une centaine de personnes, le général en retraite sera poursuivi pour "participation à un attroupement qui ne s'est pas dissous après sommation" et les quatre autres personnes pour "port illégal d'armes". Ils risquent une peine allant jusqu'à un an de prison ferme.
"Le général Christian Piquemal ne comparaîtra pas aujourd'hui à cause de son état de santé", a affirmé le procureur Jean-Pierre Valensi lundi, précisant que les quatre autres personnes qui devaient être jugées avec lui, après avoir participé samedi à ce rassemblement hostile aux migrants, passeront comme prévu en comparution immédiate lundi. "Le général s'est plaint, il est allé à l’hôpital de Calais et le médecin légiste qui l'a examiné a indiqué que son état de santé était incompatible avec une comparution immédiate devant le tribunal correctionnel", a ajouté cette source.
Une carrière militaire prestigieuse
Passé par l'école militaire de Saint-Cyr, Christian Piquemal a rejoint les régiments de parachutistes avant de devenir chef de corps du 3e régiment étranger d'infanterie puis de rejoindre les cabinets de plusieurs premiers ministres, relève L'Express. Il a ainsi été adjoint au chef de cabinet militaire des chefs de gouvernement socialistes Michel Rocard, Edith Cresson puis Pierre Bérégovoy entre 1989 et 1992.
Christian Piquemal a ensuite été le commandant de la Légion étrangère, prestigieuse unité de l'armée française, entre 1994 et 1999. Ce qui lui a valu d'être fait officier de la Légion d'honneur et commandeur de l'ordre national du Mérite. Il a été également, après son départ du service actif, président de l'Union nationale des parachutistes, une association d'anciens militaires français.
Comme le note Sud Ouest, Christian Piquemal a aussi été un proche du général Marcel Bigeard. Ancien résistant, militaire français vivant le plus décoré jusqu'à sa mort en 2010, il est accusé d'avoir pratiqué la torture pendant la guerre d'Algérie, ce qu'il a toujours nié. Il a donné son nom à l'expression "crevettes Bigeard", qui désigne les personnes qui auraient été exécutées en étant jetées à la mer depuis un hélicoptère, les pieds dans le ciment.
Christian Piquemal anime aujourd'hui un blog ("Cercle des Citoyens-Patriotes"), où il avait appelé à participer à la manifestation du samedi 6 février Calais, une réunion "apolitique" selon lui. Sur ce blog, il évoque la théorie du "grand remplacement" et dénonce ce qu'il considère comme l'"idéologie bobo‑capitalo‑mondialiste", "le déferlement migratoire", "la décadence de la France" et son "islamisation rampante et progressive".
"L'autorité de l'Etat a été défiée"
Comme le rapporte Libération, Christian Piquemal avait animé, le matin précédant la manifestation, un meeting de "patriotes" près de Calais. A la tribune, il affirmait que "la gangrène a commencé avec le rapprochement familial" et s'en prenait aux familles "musulmanes et polygames".
L'ancien général avait par ailleurs expliqué sa présence à la manifestation anti-migrants à Boulevard Voltaire, que Libération qualifie de "site pilier de la fachosphère". Il justifiait la manifestation par le désir de "défendre la grandeur et l’identité de la France, menacée à Calais".
Peu avant son arrestation, Christian Piquemal critiquait encore les forces de l'ordre présentes en marge de la manifestation, accusant les policiers de s’en prendre à d'"honorables citoyens" et estimant qu'ils auraient dû "se mettre au garde à vous" alors que la Marseillaise était entonnée
"On sait bien que la manifestation a été interdite et que l'autorité de l'Etat a été défiée. Le général, il n'est pas venu à Calais pour faire de la figuration", a déclaré à l'AFP le procureur de Boulogne-sur-Mer, Jean-Pierre Valensi.