Il est tôt, je me rends à la gare Montparnasse, qui sonne comme une promesse. Un gage d’évasion vers l’Ouest, le grand air, l’Océan. Personnellement, point de TGV qui foncerait vers le Cap Ferret ou Biarritz, je préfère le TER qui m’emmène déjeuner chez Stéphane Bern, le roi de cœur des Français. Le Perche, ça se mérite à vitesse réduite. Deux heures plus tard, on arrive à Nogent-le-Rotrou, s’imaginant déjà reprendre l’hostellerie de la gare dont le panneau « à vendre » ne devrait pas faire long feu tant le coin est pris d’assaut par les Parisiens. L’avantage avec notre hôte, c’est que tout le monde le connaît… et l’aime ! Il suffit de prononcer son patronyme, désormais synonyme de patrimoine, pour que le chauffeur de taxi s’engage sur les petites routes euréliennes avec le sourire et sans demander l’adresse finale. C’est vallonné, vert à souhait, très français, comme une affiche de campagne qui dégagerait une force tranquille. 

La maison d’une vie

« Ma thébaïde » comme il dit, dont le musée et l’église annexes furent inaugurés en 2016 par Emmanuel Macron. À peine a-t-on passé le portail que l’on est accueilli par les teckels puis par Yori Bailleres, le compagnon de Stéphane, un jeune entrepreneur aussi sympathique que drôle, comme le prouve son compte Instagram sur lequel il moque son illustre fiancé. Le maître des lieux est encore aux mains d’une équipe qui est venue le photographier et le filmer dans cet endroit chargé d’histoire, aujourd’hui sa résidence principale. « Paris est devenu une poubelle où les gens se débarrassent de tout, n’importe où et n’importe comment. Où est passée la Ville Lumière ? », s’émouvait-il y a plus d'un an dans les colonnes du Parisien. Sa lumière, c’est ici qu’il l’a trouvé, se dit-on en le voyant arriver la mine superbe. Reposé, rajeuni, à la fois pétaradant et apaisé. Pourtant, la vie ne l’a pas épargné l'an dernier en lui retirant, à quelques mois d’intervalle, son père et son frère. Mais Stéphane a un moteur de Ferrari dans une carlingue de DS ! Ça va vite, sous ses airs de sénateur. On fait le tour du propriétaire fissa : la maison, le jardin, le potager, l’orangerie, l’église, le musée… Il faut dire que les lieux sont ouverts au public et que le citoyen Bern n’a pas demandé un euro de subvention à l’État pour la rénovation des lieux. « Une coquetterie », dit-il…

À la bonne franquette

Avant de passer à table sans traîner, se rappelant que nous partageons un point commun : on a toujours faim et on est au régime pour la vie ! Ça tombe bien, le menu, préparé avec l’aide d’Hélène, une merveilleuse cuisinière percheronne, est simple et généreux. Un pain de poisson, des escalopes de poulet accompagnées de courgettes du jardin, un gâteau aux pommes. Pas de fromage, malheureux ! À table, ça rigole, exit les secrets d’histoire au profit de joyeux clabaudages parisiens. Il est temps de sortir les teckels et d’entamer dans le magnifique parc, repensé par le célèbre paysagiste Louis Benech, une marche postprandiale bien utile. L’après-midi file, Yori propose de me raccompagner jusqu’à la gare. C’était bien, c’était chouette. L’impression d’être allé déjeuner chez mes grands-parents ? Non, plutôt d’avoir pris le temps de visiter un copain qui vous veut toujours du bien.

« La vie retrouvée d’un collège royal », aux éditions Albin Michel.

Les dimanches 20 et 27 août, sur France 3, à 15h15 et 16h15, Stéphane Bern présentera l'émission inédite "Ma maison, mon histoire", où il partira à la rencontre des propriétaires des maisons de caractère de nos régions.