Canaletto à Aix, entre rigueur et fantaisie

Canaletto à Aix, entre rigueur et fantaisie
Canaletto, Rome : L'Arc de Septime Sévère, 1720, huile sur toile, 102 x 129 cm (coll. part. © toutes photos culturespaces).

On croit tout savoir sur Canaletto, sur la veduta à Venise, sur le voyage du peintre à Londres ou sur ses rivalités avec son neveu Belotto et son successeur Guardi.

Pourtant, aucune rétrospective n’a été organisée en France sur Giovanni Antonio Canal, dit Canaletto (1697-1768). En 2012, le musée Maillol avait présenté « Canaletto à Venise » tandis que le musée Jacquemart-André confrontait Canaletto à Guardi, donc uniquement des approches thématiques. Grâce au Dr Bozena Anna Kowalczyk, spécialiste de la peinture vénitienne du XVIIIe siècle, l’exposition aixoise, montée par Culturespaces dans l’Hôtel de Caumont fraîchement restauré (« Connaissance des Arts » n° 729, pp. 74-75), va permettre de faire le point sur cet artiste si séduisant. Elle va poser la question de son passage de la scénographie, au côté de son père Bernardo Canal, à la peinture de paysage urbain. En effet, dans les grands décors des Bibiena pour les opéras baroques des années 1710 et dans les vues peintes de la Sérénissime du début du siècle des Lumières, le travail rigoureux sur la perspective est le dénominateur commun de ces deux genres artistiques. Ce rassemblement de plus de cinquante œuvres de Canaletto va souligner également ses talents d’inventeur et sa liberté d’exécution, car c’est une Venise recomposée que propose Canaletto dans ses toiles de la place San Marco ou du palais des Doges, et non un strict relevé topographique. Dans sa monographie sur Canaletto publiée en 1994, J. G. Links explique que « pour composer une image, il se servait de points de vue non seulement à droite et à gauche de l’original, mais plus ou moins près ou loin de son sujet. Il renversait les bâtiments, en ajoutait d’autres, invisibles depuis son point de vue, réorganisait à sa guise les courbes du Grand Canal, rapprochait ou éloignait l’arrièreplan comme cela l’arrangeait, changeait la vue des toits, et simplifiait l’architecture. Il ouvrait une vue de côté pour montrer un bâtiment sous un angle qui lui convenait ». Même constat pour ses tableaux des rives de la Tamise réalisés lors de sa décennie passée en Angleterre, de 1746 à 1755. Mais cette fantaisie apparaît dans toute son élégance dans les Caprices, que Canaletto pratique dès ses débuts. Dans ces extravagances construites, la spontanéité de la nature perturbe la rigueur de l’architecture, la mise en scène vient flirter avec le goût des ruines. Ici Canaletto, tel un magicien de théâtre, rompt les chaînes de l’ordonnancement classique et fait souffler un vent libérateur de fantaisie.

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