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Taïwan a la solution pour les statues controversées d'un général défait

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Parc Cihu, le 23 août 2017. Plus de 200 statues devenues indésirables de l'ancien leader nationaliste Tchang Kaï-chek, un héros pour certains, un dictateur pour les autres, ont été discrètement retirées des bâtiments officiels pour trouver refuge dans ce parc de Taïwan-AFP/SAM YEH
Parc Cihu, le 23 août 2017. Plus de 200 statues devenues indésirables de l'ancien leader nationaliste Tchang Kaï-chek, un héros pour certains, un dictateur pour les autres, ont été discrètement retirées des bâtiments officiels pour trouver refuge dans ce parc de Taïwan-AFP/SAM YEH

Au moment où la discorde règne aux Etats-Unis à cause de monuments hérités de l'Histoire, Taïwan a peut-être trouvé la solution avec un parc réservé depuis 2000 aux statues d'un personnage controversé de son passé.

Plus de 200 statues devenues indésirables de l'ancien leader nationaliste Tchang Kaï-chek, un héros pour certains, un dictateur pour les autres, ont été discrètement retirées des écoles et des bâtiments officiels de l'île pour trouver refuge dans un parc tranquille bordé par un lac.

Tous les jours, des touristes se promènent parmi les 253 statues de couleur bronze, cuivre ou encore bleue du parc Cihu, ouvert en 2000 à Taoyuan, dans le nord de Taïwan.

La plus grande représente Tchang Kaï-chek assis. Elle trônait jadis dans un bureau des autorités locales de Kaohsiung. Il y en a aussi deux à l'effigie du fils de Tchang, Tchang Ching-kuo.

Les nationalistes du Kuomintang (KMT) avaient fui en 1949 la Chine continentale après leur défaite face aux troupes communistes de Mao Tsé Toung.

Certains admirent le leader nationaliste pour avoir combattu les communistes mais d'autres le voient comme un despote pour son rôle au cours de la période dite de la "Terreur blanche".

Entre 1949 et jusqu'en 1987, date de la levée de la loi martiale, sous le règne de Tchang et de son fils, des milliers de personnes jugées hostiles au gouvernement ont été torturées et tuées.

Parc Cihu, le 23 août. Des touristes se prennent en photo devant la statue de l'ancien leader nationaliste Tchang Kaï-chek. -AFP/SAM YEH
Parc Cihu, le 23 août. Des touristes se prennent en photo devant la statue de l'ancien leader nationaliste Tchang Kaï-chek. -AFP/SAM YEH

"Nous ne considérons pas les statues comme des idoles politiques. Nous les voyons comme un héritage historique et culturel", dit cependant Huang Chao-jin, membre du gouvernement de Taoyuan.

Comme pour Robert E. Lee, ancien général sudiste qui commanda les troupes des Etats esclavagistes durant la Guerre de Sécession en Amérique, le rôle de Tchang Kaï-chek continue de susciter la dissension. Tous deux ont mené et perdu des guerres civiles, tous deux sont aux yeux de leurs admirateurs le symbole d'une histoire noble, mais pour leurs contempteurs celui d'un sombre passé qu'il vaut mieux oublier.

- Une allure de cimetière -

Les Etats-Unis se divisent sur le sort qu'il faudrait réserver aux statues confédérées mais les autorités taïwanaises font valoir que sorties de leur contexte, les statues de Tchang ont perdu de leur aspect controversé et que le parc est apprécié des touristes.

Il n'existe aucune donnée sur le nombre de visiteurs se rendant dans le parc situé à quelques encablures d'un mausolée consacré à l'ancien dirigeant nationaliste. Mais selon les estimations, 2,2 millions de personnes visitent chaque année la région touristique de Cihu.

Beaucoup viennent du continent, comme Dai Yukuan, qui se rend pour la première fois à Taïwan devenue une démocratie.

Taïwan vit depuis 1949 un destin séparé de celui de la Chine qui la considère comme partie intégrante de son territoire susceptible d'être récupéré par la force.

Tous les jours, des touristes se promènent parmi les 253 statues de couleur bronze, cuivre ou encore bleue du parc Cihu, ouvert en 2000 à Taoyuan, dans le nord de Taïwan. -AFP/SAM YEH
Tous les jours, des touristes se promènent parmi les 253 statues de couleur bronze, cuivre ou encore bleue du parc Cihu, ouvert en 2000 à Taoyuan, dans le nord de Taïwan. -AFP/SAM YEH

M. Dai a néanmoins beaucoup d'estime pour Tchang Kaï-chek. "C'était un homme extraordinaire. En Chine, nous sommes reconnaissants pour ce qu'il a fait contre les Japonais pendant la guerre", explique-t-il à l'AFP. "Après tout, tout ça c'est du passé. Ce que nous voulons vraiment nous les Chinois, c'est la paix entre les deux rives du détroit de Formose".

Ma Chaohong, touriste chinoise de 44 ans, renchérit. "Il a combattu les Japonais, et ça suffit pour obtenir notre respect et notre admiration", dit-elle.

Discours tranquilles qui tranchent nettement avec les violences de Charlottesville, en Virginie, où une manifestante opposée aux partisans de la suprématie blanche a été tuée.

Les débats sur l'histoire se poursuivent à Taïwan mais sont plus apaisés.

Parc Cihu le 23 août 2017. Une statue représentant l'ancien leader Chiang Kai-shek.-AFP/SAM YEH
Parc Cihu le 23 août 2017. Une statue représentant l'ancien leader Chiang Kai-shek.-AFP/SAM YEH

La présidente Tsai Ing-wen, arrivée au pouvoir en mai 2016 après une défaite électorale cinglante du KMT, a promis la transparence sur la période de la "Terreur blanche" pour aider l'île à tourner la page.

Aux yeux de la Taïwanaise Lin Hui-chun, 33 ans, le parc Cihu ressemble de toute façon un peu à un cimetière.

"On ne dirait pas que les statues ont été mises là délibérément, pour être célébrées. Il y a un plus un sentiment d'abandon".

Ailleurs dans le monde, d'autres pays ont également choisi de créer des parcs pour héberger des statues historiques controversées, afin d'essayer de satisfaire à la fois les partisans de leur déboulonnage et ceux voulant à tout prix les conserver. C'est notamment le cas en Lituanie et en Hongrie, avec les statues de Lénine et d'anciens dirigeants communistes.

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