Des mœurs des Gaulois.
Presque tous les Gaulois sont de très haute taille, ils ont la peau blanche et la chevelure rousse ; ils inspirent la crainte par leur regard sauvage, ils ont le goût des querelles et sont présomptueux à l'excès. Si l'un d'eux, au cours d'une rixe, a fait appel à sa femme, qui est beaucoup plus vigoureuse que lui et qui a les yeux pers, une troupe d'étrangers ne pourra lui tenir tête, surtout quand celle-ci, le cou gonflé et grinçant des dents, balançant d'énormes bras blancs, commence à décocher, en y mêlant des coups de pied, des coups de poing semblables à des projectiles de catapultes lancés par la torsion de leurs cordes. Leur voix est généralement effrayante et menaçante, qu'ils soient paisibles ou en colère. Tous cependant sont d'une propreté et d'une élégance également soignées et, dans ces régions, surtout chez les Aquitains, on ne pourra jamais voir ni homme ni femme, si pauvres soient-ils, couverts de haillons malpropres comme ailleurs. Tous les âges y sont aussi bons pour faire la guerre, et le vieillard comme l'adulte marchent au combat avec une égale force d'âme, le corps endurci par le froid et par un entraînement incessant, prêts à braver bien des dangers redoutables. Jamais parmi eux un homme, comme cela arrive en Italie, ne s'est, par crainte du service militaire, coupé le pouce et n'a mérité le surnom de « murcus », comme on dit dans le pays. C'est une race portée sur le vin, raffolant de multiples boissons qui ressemblent au vin, et parmi eux des gens de basse condition, l'intelligence affaiblie par cette ivresse continuelle qu'un mot de Caton a définie « une espèce de folie volontaire », se laissent entraîner à rôder au hasard et donnent raison à ce que dit Cicéron dans la défense de Fontéius : « les Gaulois après cela boiront leur vin plus trempé, ce qu'ils redoutaient comme un poison ».
Des étrangers qui liront peut-être ces pages, par une heureuse fortune pour moi, pourront, je pense, s'étonner, alors que mon histoire en est venue à exposer les affaires de Rome, de n'entendre parler que d'émeutes, de tavernes et autres misères de ce genre : aussi vais-je brièvement en mentionner les causes, étant résolu à ne m'écarter nulle part de la vérité de mon propre chef.
Et quoniam mirari posse quosdam peregrinos existimo, haec lecturos forsitan, si contigerit, quam ob rem, cum oratio ad ea demonstranda deflexerit quae Romae geruntur, nihil praeter seditiones narratur et tabernas et vilitates harum similis alias, summatim causas perstringam, nusquam a veritate sponte propria digressurus.
XIV-6-2, p. 72