Paysage sans bateaux

Jô a 38 ans et est professeur dans une école primaire. Elle aurait voulu un enfant mais son ami, qui a déjà une fille n'en veut pas. du reste, personne ne sait qu'elle existe dans sa vie. Elle a une amie Paula, plutôt autocentrée, qui ne parle que d'elle, sauf pour lui demander mais à quoi mène ta vie. Sa mère idem. Survient son premier amour, qui avait été envoyé chez un oncle outre Atlantique lorsqu'ils étaient tous deux trop jeunes pour s'aimer comme ils l'auraient voulu. Ah il va enfin arriver quelque chose ? Non.

Roman indolent et pessimiste. Court heureusement. Acheté en compensation partielle du prix d'entrée de la librairie Lello à Porto, où J.K. Rowling aurait trouvé son inspiration pour Poudlard.

Jô n'attend plus rien. Comme si tout ce qui fait partie de l'espoir s'était enlisé il y a bien longtemps. Si longtemps. Et pourtant, Jô n'a pas l'âge de celles qui ont renoncé ou déjà tout vécu de ce que la vie apporte. Tout n'est pas derrière elle. Mais Jô n'y croit pas, n'y croit plus. N'y a peut-être même jamais cru.

À 38 ans, elle a choisi le renoncement. Il ne lui arrivera plus rien. C'est ce qu'elle pressent, ce qu'elle ressent. Ça ne fait pas pas mal, c'est juste un constat. Elle peut vivre avec. Elle vit déjà avec.

Cela, Maria Judite de Carvalho, l'auteure notamment de Tous ces gens, Mariana…, le dépeint avec finesse, sans tomber dans le pathos. Ce petit monde qui entoure Jô. L'homme qu'elle n'épousera pas. L'enfant qu'elle n'aura pas. L'amie qui parle, mais qui n'écoute pas. Celui qui est parti. Ces gens qui se tiennent au bord de sa vie, qui ne la connaissent pas vraiment, parce qu'elle n'a jamais tout à fait accepté qu'ils fassent partie de son intimité. Et aussi avec une certaine tendresse. Car, malgré tout, malgré le fait qu'elle ait abandonné, ou semble l'avoir fait, Jô est attachante. Émouvante.

On peut regarder les bateaux sans vouloir prendre la mer. C'est ce qu'il faut retenir de ce court roman qui fait vibrer en soi des rêves jamais éteints.
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Ma première lecture de Maria Judite de Carvalho, et je ne pouvais espérer mieux. Une histoire très courte qui en moins de cent pages réussit ce que beaucoup d'autres n'accomplissent pas avec bien plus : donner vie à un personnage profondément attachant, habilement caractérisé et défini, qui au delà de la mondanité de ses apparences et de son comportement cache une intelligence et une perspicacité qui font font de la lecture de cette simple histoire un vrai plaisir.