« C'est une farce, un roman d'anticipation, qui se déroule dans une dizaine d'années. Aujourd'hui, j'ai le sentiment que ce n'est pas tant de l'anticipation que ça, que je suis rattrapé par la réalité et les événements.
Tout commence pour mon héros dans un dîner où il glisse, il chute : il dit une phrase un peu sexiste, complètement idiote, complètement sotte et à partir de là, tout son quotidien, sa vie, vont être chamboulés... » Ilan Duran Cohen
Plus d'informations sur le roman : https://rentree.actes-sud.fr/
Une vache errante a failli m'écraser. Depuis la loi sur le respect du libre arbitre animal, elles se baladent à leur guise dans Paris, seuls les chiens sauvages ont le droit de les mordre. Les vieilles dames ne sortent plus pour effectuer leur promenade quotidienne, voir du monde, s'élargir l'horizon, prendre l'air tout simplement. Trop dangereux. On préfère le bien-être des chiens à celui de nos vieillards qui ont fait tant de mal à la planète.
Je croise un groupe de jeunes gens magnifiques qui chantent leur joie. La loi interdisant la construction de cuisines et de salles de bains privées dans tous les appartements neufs vient de passer. Comme leurs parents, comme nos vaillants députés trentenaires, ces jeunes n'ont connu que la colocarion. Ils ont toujours partagé leurs dépendances. Les nouveaux immeubles auront donc en sous-sol des salles de bains, des WC et des cuisines communes, chaque citoyen est encouragé à éduquer avec amabilité mais responsabilité son voisin en cas d'attitude non appropriée à la vérité écologique. Il paraît qu'ils feront bientôt passer la loi interdisant les appartements de plus de cinquante mètres carrés, il faut répartir équitablement les surfaces habitables autorisées. Le prix de l'ancien va encore augmenter.
La méthode Alain Conlang (...)
Dix commandements pour survivre à une séparation. (...)
1. N'établir aucun contact avec la personne aimée ou désaimée.
2. Brûler toutes les photos, de préférence dans un évier. Ne pas laisser de traces. Regarder les cendres s'écouler par le trou d'évacuation.
(...)
3. Ne jamais se retenir de pleurer. Au contraire, toujours essayer de hurler à la mort et noter soigneusement l'heure des crises (...)
5. Etablir en première page de ce cahier la liste des points négatifs de l'autre personne. Ne pas essayer d'enjoliver ou mythifier la réalité.(...) Ne jamais établir la liste des points positifs.
6. Abstinence sexuelle totale pendant la période de sevrage.
7. Souffrir jusqu'à l'écoeurement, l'épuisement, l'élévation. (...)
9. Rencontrer de nouvelles personnes. Eviter de fréquenter des lieux ou des personnes générant la nostalgie. Privilégier l'inconnu. Attention ne jamais enfreindre la règle 6.
10. Enfreindre la règle 6 le jour où vous réalisez que vous vous êtes réveillé le matin sans avoir pensé à l'autre personne. Cette certitude doit se faire d'elle-même et naturellement.
La diffusion de cette méthode est gratuite et n'est pas assujettie aux lois du copyright. (p.93).
Nous étions une trentaine de polémistes asser-mentés par l’État, reconnus d’utilité publique, on nous donnait une carte, une licence pour exercer, il ne fallait pas la perdre, elle était difficile à récu-pérer. La perdre était perçu comme une négligence et un irrespect de la fonction sacrée, nous servions la démocratie, notre carte en était la preuve irréfutable..
Oui, j’ai bien dit « nous les jeunes » parce que je sais qu’elle déteste cette expression. Tout son quotidien, sa pensée, sont tendus vers un seul but : nous satisfaire, nous les jeunes. Nous dirigeons sa vie, celle de cette agence et celle du monde. Nous sommes des leaders éphémères puisque nous vieillissons. Elle dit que notre « insolente jeunesse », des mots de vieux, nous en profitons et la faisons payer cher. Nous avons des âmes de pute.
Mes faiblesses sont nombreuses et je souhaite devenir un meilleur homme. Le problème, c'est que je déteste les premiers de la classe, les forts en thème, les experts en tout, les tout à l'expertise, les donneurs de leçons, les "rationalisateurs à tout prix", les prix de rationalisation, les trophées de la compréhension. Chez moi, c'est une négociation permanente entre le progrès, le changement et l'inertie totale, c'est encore cette histoire de murs qui me harcèle, je n'aime pas lever la jambe pour les escalader. Je ferais un prisonnier idéal, pas de révolte tant qu'on me nourrit, me loge et me blanchit. (p.20)
J'ai toujours cru que je t'avais raté. Les premiers de classe sont des crétins séparés du monde, tellement obsédés par eux-mêmes, par leurs concours qu'ils aiment réussir et par ces ascensions sans fin qui les enivrent et les obsèdent. J'ai mis soixante-deux ans à réaliser que la bonté est la seule vraie beauté.
Bébé cactus, tu es mon soleil, tu es notre homme.
Prends le relais.
Je t'aime.
Je crains qu'à mon contact, ma nièce ne sombre dans une incapacité chronique à s'adapter à son environnement, celui dans lequel elle est née et qui me fait tant horreur Elle est quand même la petite-fille d'un mannequin intellectuellement limité qui a plaqué la société car elle lui interdisait de conduire ses Mercedes à moteur à explosion qu'il adorait plus que nous. Une nièce à explosion.
C'est bon l'amitié, on ne sait jamais quand ça vous tombe dessus. L'amour ça doit être pareil en plus dangereux.
Je devais jouer la mélodie de mon bonheur impérissable. Ensemble, la vie nous avait toujours souri et rien ne pouvait résister à notre volonté. Nous étions les rois de cette ville. Nous les nourrissions tous. Nous pouvions les affamer si tel était notre désir.