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De Coudenhove-Kalergi ou l’illustre inconnu du Jardin du Luxembourg

A l’occasion de l’exposition photographique «  Identités européennes » (1), des prochaines élections au « Parlement » européen (?) et de la Journée de l’Europe (?), le Sénat a mis à l’honneur l’un des « pères » fondateurs de la construction européenne que nous subissons…M. le comte Richard Nikolaus de Coudenhove-Kalergi.

 Ce personnage, en comparaison du banquier Jean Monnet, est totalement inconnu en France. Et pourtant son "œuvre" pour cette "Europe" est, on peut le dire, considérable.
 
En effet…
 
 Dès 1922, il écrivit un manifeste européen avec cette vision : "Soit l’Europe continentale du Portugal à la Pologne se constituera en un super-Etat, soit elle sera réduite à néant sur le plan politique, économique et culturel encore au cours de ce siècle" (d’après la Fondation qui porte son nom )(2).
 
 En 1923 , il créa l’Union Paneuropéenne. D’après l’association Paneurope France, membre de l’Union PanEuropéenne internationale, "l’objectif de Coudenhove est d’unir l’Europe afin que celle-ci conserve un rôle important face aux grands États (ndlr : Empires !) que sont les États-Unis, l’URSS et le Royaume-Uni qui constitue à lui seul un grand ensemble régional grâce à son Empire" (3). Aujourd’hui, le président d’honneur de l’Union Paneuropéenne internationale est l’archiduc Otto de Habsbourg (4). Dans les principes fondamentaux de l’Union Paneuropéenne (5), on peut lire que "L’Union Paneuropéenne reconnaît l’auto-détermination des peuples et le droit des groupes ethniques au développement culturel, économique et politique".
Pendant la Seconde guerre mondiale, notre Richard émigra aux U.S.A. Le 25 mars 1944, le comité juridique du mouvement Paneurope et le Research Seminar for Post-War European Federation, adoptèrent à New York un projet de Constitution de type fédéral pour l’Europe unie (6).
 
 En 1947, il fonda à Gstaad l’Union Parlementaire européenne et lors de son congrès à Interlaken un an plus tard, cette dernière "s’est donc efforcée d’élaborer un projet de Fédération européenne.[…]. La Fédération européenne, qui serait ouverte à tous, mais comprendrait pour commencer les pays adhérant au plan Marshall (l’Allemagne occidentale incluse), aurait un gouvernement et un Parlement composé de deux Chambres. Ce serait donc un véritable super-Etat, dont les pouvoirs s’étendraient au contrôle des finances, des affaires étrangères et de la défense nationale ou plutôt européenne"(7).
 
 En 1948, le congrès de l’Union Parlementaire européenne a voulu "s’ériger en un « Parlement préliminaire des Etats-Unis d’Europe ». Ce Parlement, puisque c’est déjà ainsi que M. Coudenhove-Kalergi, secrétaire général, qualifie ce congrès comprendra des délégués de tous les pays situés entre les Pyrénées et le Rideau de fer. Chaque Parlement national représenté disposera d’un nombre de suffrages proportionnel à sa population (une voix par million). [...]. Cette vaste assemblée où, à l’exception des communistes, tous les partis et toutes les tendances politiques sont représentés, se propose la réalisation de deux grands buts : provoquer dans la plus brève échéance, la convocation rapide d’une Constituante européenne, élue par les Parlements nationaux, et tracer les grandes lignes de la constitution que devra adopter cette assemblée constituante, dont l’idée remonte, rappelons-le, au premier Congrès parlementaire européen tenu à Gstaad, au mois de septembre 1947 " (8).
 
 En 1949, l’Union Parlementaire européenne contribua à la création du Conseil de l’Europe. Dans un film d’archive, de Coudenhove-Kalergi est cité à cette occasion (voir ce film à 00:00:17). Il obtint que le Conseil de l’Europe ne consista pas seulement en un Conseil des ministres, mais soit complété par un second organe, une Assemblée parlementaire consultative. Ce fut le début de l’histoire du parlementarisme européen (9).
 
 Le 18 mai 1950, de Coudenhove-Kalergi est le premier, avant Monnet et Schuman, à recevoir le prix Charlemagne pour sa contribution à l’idéal européen. Ce jour-là, dans son discours, il se livre : Union atlantique, nouvel Empire mondial, Turquie, Constitution fédérale,…Il recommencera le 8 novembre 1950 dans un mémorandum présenté aux Gouvernements de l’Allemagne, de la Belgique, de la France, de l’Italie, du Luxembourg, des Pays-Bas et de la Sarre.
 
 De Coudenhove-Kalergi a aussi contribué à l’un des symboles de cette Europe-là. L’hymne européen…une idée de Richard (10). En 1930, il avait déjà émis l’idée de célébrer annuellement dans tous les États une Journée de l’Europe (11). Le drapeau européen, une idée de Coudenhove-Kalergi ? Pas tout à fait. Uniquement le bleu. En 1926, il avait choisi comme symbole du mouvement paneuropéen la croix rouge des croisades, symbole le plus ancien d’une union européenne supranationale face à un ennemi commun, sur un soleil d’or, le soleil d’Apollon, qui figure l’esprit européen dont le rayonnement a éclairé le monde entier. Il est intéressant de lire son mémorandum sur cette question du drapeau européen. La croix rouge n’a pas été choisie, mais douze étoiles ayant elles-aussi une signification bien particulière. Pour quelle raison le drapeau de l’Union Paneuropéenne ne fut-il pas choisi ? La Turquie a refusé (12)…C’était pendant les années 1950.
 
Richard Nikolaus de Coudenhove-Kalergi meurt en 1972.
 
 Aujourd’hui, l’influence de l’Union Paneuropéenne reste très importante. Elle avait "remis au Président de la Convention, Valéry Giscard d’Estaing, des propositions concrètes pour l’élaboration du texte de la Constitution Européenne, qui furent reprises, en grande partie, dans le texte constitutionnel (ndlr : donc dans le Traité de Lisbonne)" (13).
 
 Jean-Claude Juncker a reçu le 15 novembre 2007 la Coudenhove-Kalergi-Plakette à Münster. Le discours d’éloge en l’honneur de Jean-Claude Juncker fut prononcé par le député européen, Elmar Brok. Il existe des rencontres Coudenhove-Kalergi comme en atteste ce document.
 
 Le Modem de François Bayrou apprécie beaucoup les idées de Coudenhove-Kalergi et de sa petite-fille Barbara (14). Le 5 juillet 2008, cette dernière a déclaré que "la nationalité, ce ne sera plus que pour le football". La "comtesse rouge" n’a pas lu ni le discours d’Aimé Césaire sur le colonialisme dans lequel celui-ci a recopié "une page de Quinet pour la part non négligeable de vérité qu’elle contient et qui mérite d’être méditée" ni Jean Jaurès sur la nation.
 
 Le sophiste Bruno Le Maire, secrétaire d’Etat aux Affaires européennes, à l’occasion de la Journée de l’Europe et des élections européennes, a rappelé que « l’Union européenne, c’est la paix » et a de nouveau parlé de « l’Europe puissance » dans son interview du 8 mai dernier sur France-Info.
 
 Au XIXe siècle, une personne avait déjà dit " l’Empire, c’est la paix"…C’était Napoléon III (15). Cet Empire porta aussi le nom d’ "Empire libéral". Le 23 janvier 1860, Napoléon III avait d’ailleurs signé un traité de libre-échange (traité réduisant-ou supprimant- les droits de douane entre deux pays) avec l’Angleterre. Cela ne vous rappelle rien ? Le président français Nicolas Sarkozy a déclaré en novembre 2007 devant le Congrès américain : "L’Europe doit maintenant reprendre le dossier majeur de ses capacités militaires... il y a plus de crises qu’il n’y a de capacités pour s’en occuper" (16). Nicolas Sarkozy vient de doubler les commandes d’armement en 2009. La paix se prépare… Le mot « Empire » est devenu « Union ». Les castes du militarisme et les bandes de la finance nous emmènent de nouveau vers le chaos.
 
 
 
 
(6) Projet de Constitution des États-Unis d’Europe (New York, 1944) : http://www.ena.lu/projet-constitution-etats-unis-europe-new-york-1944-010302489.html

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5 réactions à cet article    


  • Pierre-Alexandre Xavier Pierre-Alexandre Xavier 2 juin 2009 17:41

    Coudenhove-Calergi est un personnage singulier et majeur dans la construction d’un esprit européen et sur la fabrication d’un symbolique européenne. Mais je reste perplexe sur votre texte. On dirait une sorte de collection d’anecdotes politiques et je ne vois pas vraiment la ligne directrice proposée par CC sur le projet européen. Les nombreux liens documentent votre sujet mais il n’y a pas de cadre général et je suis tenté de dire que c’est là pourquoi le personnage est si peu connu, même hors de France, sinon dans le milieu confidentiel des mouvements pacifistes.
    Enfin la conclusion semble diverger de l’objectif initial comme nous faire comprendre que le personnage était un doux rêveur et que la réallité brutale et pourrie s’est finalement emparée du discours pour masquer les intérêts les plus cupides et les plus meutriers...
    Votre portrait me laisse donc perplexe... C’est peut-être un bien en soi, non ?


    • Le Canard républicain le canard républicain 2 juin 2009 20:48

      Bonsoir Pierre-Alexandre Xavier.
      Je vous cite : « le personnage était un doux rêveur ».
      Permettez-moi de vous rappeler un article publié le 13 janvier de cette année :
      « La création de l’Union atlantique se précise ».
      Cordialement.
      P.S. : pour ne pas surcharger les commentaires, je vous invite à lire le commentaire que j’ai fait sur l’article suivant « Et la crise sociale a rattrapé le Parlement européen » d’Anne-Cécile Robert.


    • Le Canard républicain le canard républicain 2 juin 2009 21:05

      Deux petites remarques :
       - la note (1) de France Soir ne semble plus disponible. Je vous donne un autre lien pour l’exposition : http://www.senat.fr/evenement/identites_europeennes/index.html
       - initialement le lien de la note (12) était le lien suivant du Conseil de l’Europe :
      http://www.coe.int/t/dgal/dit/ilcd/Fonds/Flags/CoudenhoveProposal_fr.pdf
      Ce dernier a été supprimé il y a quelques jours.

      Un grand merci à agoravox pour la publication de cet article.


      • Le Canard républicain Le Canard Républicain 27 juin 2012 09:15

        Depuis le 2 juin 2009, certains liens hypertextes ne sont plus valables.
        Ces derniers sont disponibles ICI.
        Cordialement.
        J.G.


      • la truie qui file 22 juillet 2009 14:38

        Il y a un personnage et précurseur en matiere d’Europe : Alphonse de Chateaubriant qui avant d’etre condamné par la france pour haute trahison avait clairement affiché une position d’alliance avec l’allemagne qui comme chacun sait à l’époque etait devenue national socialiste ...

        Et pourtant ses livres partent d’un ideal de paix et de prospérité des peuples , c’est finalement sur la base de son admiration d’adolf Hitler que les francais l’ont condamné en pleine periode de nationalisme revanchard en condamnant ainsi l’un des premiers prophetes de l’europe sous cette assimilation sordide de « collaborateur » .

        Et ce jugement à eu bien d’autres répercutions en particulier l’épuration littéraire dans le climat trouble de réglements de comptes d’apres 1945 , simplement pour une sorte de rédistribution des cartes en matière de la nouvelle pensée « correcte » .

        Et pourtant des noms tres connus ont participé au journal « la gerbe » comme romain Rolland , andré castelot, Gide , ecrivains qui n’ont jamais eté faschistes mais juste en reaction de rejet avec le regime d’union sovietique représenté par Staline.

        Mais cela est encore trop récent pour que les ecrivains qui représentent la nouvelle pensée unique dans la lignée de cette épuration comprennent le sens profond et ambigu de toutes les prises de position historiques de l’époque .

         Au moins Chateaubriant ne pouvait pas en toute équité etre qualifié de traitre tout simplement pace qu’on à oublié de preciser qu’a l’exemple d’autres aristocrates europeens , le moitié de ses ancètres etais originaires du Rhin et donc par le fait sa famille etais déja complement européenne. 

        Et cela n’est pas vraiment comparable au modele d’une pensée qui devient une marchandise au service d’un capitalisme libéral europeen sous la forme d’une caricature travaillant contre les peuples et pour augmenter la misère du plus grand nombre !
        Le resultat est cette europe actuelle ou beaucoup de citoyens de l’Union souffrent plus que du temps des états !

        Que se passerai t’il maintenant pour ceux qui ont construit l’Europe actuelle si demain la crise qui sévit la faisait exploser en etats , comme ces royaumes et republique de l’époque ? 
         
        Peut t’on etre pour L’Europe en tant qu’Ideal sans renier son devoir de respect de la dignité des peuples , de l’application effective des libertés quand les résultats effectifs nous montrent beucoup d’effets pervers ?

        Alors pour tenter de regler ce dilemne il faut peut etre comprendre le point de vue d’auteurs aussi vilipendé que ce précurseur oublié qui ne voyait en L’europe à créer que l’ Ideal et non une spéculation de spéculateur .

        La verité navigue quelque part , mais il faudrai en ce moment l’approcher de plus pres bien vite !

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