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Quand les forestiers se sont mués en jardiniers

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Il y a 150?ans, les forêts de Couvet étaient ravagées par le bétail.
Des hêtres, des sapins, des épicéas de toutes tailles, la forêt de l'Envers est proche de l'état idéal de la forêt jardinée.
Le sous-bois, sombre et humide, de la forêt de l'Envers.

Un panneau informatif marque le début des deux sentiers didactiques. Des arbres – hêtres et épicéas – encore jeunes, des repousses qui se dorent au soleil dans un sous-bois clairsemé. La forêt de l'Endroit, sur le versant sud dominant le village de Couvet (NE), présente un visage agréable au promeneur. Il n'en était nullement ainsi il y a quelque 150 ans: à l'époque, la forêt, ou ce qu'il en restait, était livrée au passage et au pâturage du bétail. Une pratique interdite en 1856 par la Commune qui, sans s'en douter, va provoquer un peu plus tard une véritable révolution dans la sylviculture.

En 1881, un jeune inspecteur forestier de 22 ans est nommé. Atterré par les ravages causés par le bétail et la surexploitation du bois, Henri Biolley va appliquer et perfectionner une théorie venant de France et préconisant de favoriser un peuplement équilibré tant sur le plan des essences que de l'âge. Avec le temps, il s'avérera que ces forêts dites jardinées sont plus résistantes aux ouragans et aux épidémies que les forêts exploitées par coupes rases et replantées. Sous l'impulsion de son promoteur, la méthode va se développer dans le canton de Neuchâtel et ailleurs. Aujourd'hui, les forêts jardinées de Couvet sont devenues des stars de la sylviculture, visitées par des professionnels du monde entier.

Mais en ce beau mercredi de juillet, ni professionnels ni promeneurs sur les deux parcours didactiques (parsemés de stations référencées dans les brochures Randonature vivement recommandées) qui sillonnent la forêt de l'Endroit et la forêt de l'Envers, sur le versant nord. Une tranquillité qui permet de jouir du chant des oiseaux, interrompu de temps à autre par un avion-école jaune qui s'exerce depuis le terrain proche de Fleurier, et des mille autres bruits du sous-bois.

Après une heure de marche, le promeneur arrive bientôt au terme du sentier de l'Endroit. Au bord du chemin, la carrière de la Rochettaz ouvre son gouffre béant sur des profondeurs grises. Grâce à cette trouée de lumière, une végétation basse prospère sur les talus. Des papillons blancs ou roux volettent de fleur en fleur.

Deux forêts partagées entre ombres et lumières

Si la forêt de l'Endroit est claire et accueillante, la forêt de l'Envers est plus sombre, presque hostile. Plus nombreux, les sapins et les épicéas s'accrochent au versant nord escarpé. La taille élevée des arbres témoigne de leur âge. A proximité du sentier se trouve le sapin président – le roi de la forêt – âgé de quelque 270 ans et culminant à 57 mètres. Le sous-bois parsemé de rochers couverts de mousse trahit un éboulement ancien sur lequel la forêt a repoussé.

En dépit de cet environnement difficile, l'idéal de la forêt jardinée est plus avancé ici que dans la forêt de l'Endroit, dont l'état initial il y a 150 ans était particulièrement défavorable. Les bois de l'Envers présentaient d'emblée une variété plus grande, tant sur le plan des essences que de l'âge des arbres. A l'issue de ce second parcours de deux heures environ, le promeneur peut désormais apprécier en connaissance de cause les mots d'Henri Biolley: «Si on voulait caractériser la forêt jardinée, on dirait tout d'abord qu'elle est toujours vivante. Elle est composée et mélangée, son matériel, qui est réparti sur toute la surface, ne subit pas de fluctuations. Toute la hauteur occupée est remplie de chlorophylle. Enfin, le processus de régénération est permanent.»