Frédéric Carbonne : « Vin Scully, c’est vraiment un type qui me fascine »

Il y a mille façons de tomber amoureux du baseball : un voyage aux États-Unis (ou au Japon, en Corée du Sud, en République Dominicaine…), visiter un stade, adorer le logo et le nom d’une franchise, soutenir une ville, s’attacher à un joueur, un manager ou un commentateur… Piochez plusieurs ingrédients de cette liste et vous obtenez la recette de la passion de Frédéric Carbonne pour notre sport chéri. Le journaliste de France Info nous dévoile son histoire d’amour avec les Dodgers… et Vin Scully.

Frédéric Carbonne affiche ses couleurs pour les Dodgers – Photo personnelle

The Strike Out : Frédéric, sur votre bio Twitter il est écrit « Baseball forever ». D’où vous vient cette passion ?

Frédéric Carbonne : Elle vient d’un séjour aux États-Unis avant même que je ne sois amené à aller travailler là-bas, même si ça a entretenu ensuite le fait que j’y vive. C’était San Francisco il y a 12 ans je crois. Mon fils avait une dizaine d’années et comme ce qu’il y a  de plus classique aux États-Unis à propos du baseball, on a voulu faire ce truc de s’envoyer une balle, ce moment père-fils. On est allé acheter un gant et une balle et on est allé jouer dans un parc. Il a bien accroché et il se trouve qu’il y avait un match à San Francisco ces jours-là. Donc on est allé dans l’un des plus beaux stades MLB. Et voilà j’attrape le virus de ce sport qui est l’un des plus lents, l’un des plus incompréhensibles mais aussi l’un des plus fascinants.

TSO : Et vous avez ramené ce virus en France…

F.C : Oui! En rentrant mon fils m’a demandé s’il pouvait joueur au baseball. Alors on a cherché des clubs en région parisienne et il a pris sa licence au PUC. Ma fille a suivi peu de temps après d’ailleurs, entre l’envie de faire comme son frère mais aussi parce que ça lui plaisait. Nous voilà donc partis dans cette passion familiale. Ma femme – qui n’est pourtant pas une amatrice de sport – a aussi chopé le virus et on est devenu grands rivaux car elle soutient les Giants et moi les Dodgers ! Pas facile tous les jours à la maison ! Et puis le fait d’aller vivre pendant 4 ans aux États-Unis pour le travail a renforcé tout ça.

TSO : Votre passion pour les Dodgers, elle a une origine ?

F.C : Même si ce n’est pas forcément parce que je suis journaliste, ça vient en grande partie du commentateur Vin Scully [note : commentateur officiel des Brooklyn Dodgers puis des LA Dodgers de 1950 à 2016]. J’ai découvert les matchs de baseball à travers lui et c’était incroyable de pouvoir le faire depuis la France grâce à MLBtv. Cet homme-là, cette voix-là, avait une capacité à transmettre, à raconter le match tout seul sans consultant, pour la radio ou la télévision, alors qu’il avait presque 90 ans. Il y avait quelque chose de magique. On était embarqué dans des histoires, dans de la vie et hop… Scully, c’est vraiment un type qui me fascine. J’ai un immense respect pour lui.

TSO : Quand vous découvrez le baseball, est-ce que vous vous plongez dans son histoire qui est aussi très intégrée à l’Histoire des États-Unis ?

F.C : Oui forcément un peu, surtout via le documentaire exceptionnel de Ken Burns « Baseball« , ces 9 épisodes comme 9 manches, un par ère de l’histoire du baseball. Mais en fait ce qui m’intéresse le plus c’est maintenant, chaque saison, les stats, les joueurs, les pitchers. J’ai une connaissance globale et historique avec les grandes vedettes, les grandes équipes, les grandes rivalités… mais autant je suis un accro de la stat d’aujourd’hui, je ne suis pas un accro de l’histoire du baseball. En tout cas pas de l’histoire sportive du baseball, plutôt de ce que représente le baseball aux États-Unis avec ce côté « national pastime« . Mais avec mon côté « Rain Man » [film Oscarisé de 1988 qui met en scène le personnage de Raymond – joué par Dustin Hoffman – atteint du syndrome de l’autiste savant] : je suis capable de vous citer toutes les stats des joueurs de Los Angeles…

TSO : Incollable sur celles de Clayton Kershaw ?!

F.C : Sur lui et sur d’autres… mais c’est vrai que Kershaw c’est un peu mon héros ! Avoir vu son no-hitter en direct, c’était quelque chose de formidable… même si c’était à la télé. Je n’ai jamais assisté à des choses exceptionnelles depuis les gradins malheureusement. Le match avec le plus fort enjeu c’était un Game 5 décisif à Washington  là où je travaillais, entre les Nationals et les Dodgers [NLDS en 2016], et c’était vraiment pas mal !

TSO : Alors les Dodgers cette saison, ça va donner quoi ? Il y a toujours une grosse équipe, mais à part la saison 2020…

F.C : La vraie-fausse saison oui je sais… avec le vrai-faux titre, comme pour les Lakers d’ailleurs! [Les LA Lakers champions NBA en septembre 2020 à l’issue d’une saison interrompue puis redémarrée sous un format inédit].

Les Dodgers, champions 2000 d’une saison écourtée par le covid  – Photo Twitter

TSO : Je ne vous contredirai pas sur cette analyse… et cette année alors ils nous réservent quoi ?

F.C : C’est assez dingue ce qu’il se passe avec les Dodgers. Ils ont des stats de saison régulière incroyables. Dave Roberts doit être parmi les managers qui ont remporté le plus de victoires en régulière en si peu de temps. Et puis c’est comme avec le PSG en 8e de finale de Ligue des champions quand vont arriver les playoffs ils vont plonger! [Propos prémonitoires car interview réalisée le 10 février, avant l’élimination face au Bayern] Une nuance quand même : je veux bien qu’on parle du faux titre de 2020 mais n’oublions pas que 3 ans avant il y a eu le vol des Astros qui était quand même quelque chose [Les Dodgers battus 4-3 en World Series en 2017 avant que l’on ne découvre la triche électronique et poubellesque de Houston].

TSO : C’est quoi à votre avis le problème pour que chaque saison, sauf 2017 et 2020 dans les conditions qu’on connaît, ça dérape ?

F.C : Ca me fascine ce truc ! Et j’aimerai vraiment savoir ce qu’il se passe dans le dugout et dans les vestiaires dans les moments qui comptent… En plus il y a des joueurs qui sont là depuis 6, 8, 10 ans et qui ont vécu ces choses-là. Y’a un coach [Dave Roberts] qui a vécu ces choses-là, qui est un manager brillant mais… Pour tout dire je pensais en fin de saison dernière qu’il fallait changer de manager même si ça peut paraître injuste. Ce ne sont pas deux ou trois joueurs qui peuvent changer cette culture de la défaite, même si l’expression n’est pas la bonne car leurs saisons régulières sont formidables. Je pense qu’il n’y a qu’un truc qui peut créer un déclic, c’est le changement de manager.

TSO : Ça n’a pas été le cas cet hiver…

F.C : Oui c’est vrai. Je ne sais pas s’ils feront plus tard et je ne sais d’ailleurs même pas si ça marcherait. Mais faut bien le dire, les mois d’octobre sont difficiles !

TSO : Alors vous leur prédisez quoi pour cette saison à vos Dodgers ?

F.C : J’ai adoré un truc cet hiver dans les pronos que font les fadas de MLB pour combler la offseason : ils mettaient les Dodgers deuxièmes de leur Division derrière San Diego qui a une super équipe, mais LA gagnait les World Series ! Et ce scénario me plaît beaucoup ! Qu’ils se qualifient ric-rac, qu’ils passent par les Wild Cards, qu’ils soient un peu les challengers – même s’ils ne le seront jamais vraiment avec leur roster – mais qu’ils fassent des playoffs de grands malades.

Bruce Bochy à Montigny en septembre 2022 – Photo TSO

TSO : Un personnage de MLB que vous aimez particulièrement c’est Bruce Bochy.

F.C : C’est un super mec ! C’est vraiment dommage que l’expérience avec l’équipe de France ait été contrariée par le covid. Maintenant qu’il a repris un poste chez les Rangers, c’est terminé [Retrouvez notre interview avec Monsieur Bochy avant les WBC qualifiers en septembre 2022].

TSO : Nous avons commencé avec San Francisco… d’autres stades que vous aimez?

F.C : Celui des Giants c’est vrai que son emplacement est magnifique. J’adore le Dodgers Stadium, mais je ne dois pas être objectif! Je trouve qu’il se dégage une douceur dans ce quartier et c’est celui où je suis allé le plus [Retrouvez ici l’histoire de la création du stade à LA]. J’aime bien aussi celui des Orioles de Baltimore qui fait partie de ces stades récents mais avec une touche vintage. Je dois reconnaître que je n’ai pas eu une super expérience chez les Cubs. J’y suis allé en arrivant aux États-Unis avec le décalage horaire, mal placé car c’est sans doute le seul stade où il reste des places sans une bonne visibilité. Il faut que j’y retourne! Je ne suis jamais allé aux Yankee Stadium, j’avoue. Je suis allé au Shea Stadium pour voir les Mets mais les Yankees ne jouaient pas à domicile à ce moment-là. Même à Washington qui n’est sans doute pas parmi les préférés de beaucoup, le stade est pas mal. Et je suis aussi allé à Seattle! En réalité, j’ai fait tous les stades de la côte Ouest : San Diego, San Francisco, Los Angeles, Seattle… Côte Est, j’oubliais que j’avais fait Philadelphie mais jamais Fenway… Je suis allé une seule fois à Pittsburgh mais malheureusement il n’y avait pas de match, mais j’aimerai en voir un là-bas avec la vue sur les ponts… Pour l’anecdote, à Pittsburgh, j’ai vu un match de basket de lycée, même pas d’université, et c’était super.

Le PNC Park de Pittsburgh, un des plus beaux stades MLB et l’une des destinations rêvées de Frédéric – Crédit DR

TSO : Vous suivez les autres sports US?

F.C : Un peu mais beaucoup moins que le baseball. C’est quand même quelque chose là-bas, les ambiances… Le souvenir le plus dingue que j’ai c’est un Orange Bowl [playoffs universitaires de foot américain] en Floride. Ça devait être Clemson ou Ohio contre une équipe de Caroline du Nord, je ne me souviens plus mais 80 000 personnes dans le stade, incroyable! Mais même pour mon match de High School à Pittsburgh, il devait y avoir 10 000 ou 12 000 personnes dans la salle!

TSO : On vous souhaite une bonne saison MLB !

F.C : Merci, je vais encore regarder les matchs de mes Dodgers le matin en me levant sans connaître le score avant… et puis aussi ceux des Giants pour faire plaisir à ma femme!

TSO : Merci Frédéric.


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