Rubaiyat
Toile de Willy Pogany
Am I a wine-bibber? What if I am?
Gueber or infidel? Suppose I am?
Each sect miscalls me, but I heed them not,
I am my own, and, what I am, I am.
Omar Khayyam/Fitzgerald
Suis-je un ivrogne ? Et pourquoi non ?
Guèbre ou païen ? Rien que des noms ;
Des pieux l’opprobre est sans objet,
Je suis moi-même, et rien, sinon.
Whether at Naishapur or Babylon,
Whether the Cup with sweet or bitter run,
The Wine of Life keeps oozing drop by drop,
The Leaves of Life keep falling one by one.
Omar Khayyam/Fitzgerald
À Naïshapur ou bien à Babylone,
L’amertume ou la saveur douce et bonne
Va, goutte à goutte, épuiser les amphores ;
Et Vie tomber comme feuilles d’automne.
Up from Earth’s Center through the Seventh Gate
I rose, and on the Throne of Saturn sate,
And many a Knot unravel’d by the Road;
But not the Master-knot of Human Fate.
Du centre de la Terre ai sept portails franchis,
Au trône saturnien m’élevant, je m’assis ;
Tout au long du chemin, bien des noeuds j’ai défait,
Non celui du destin, c’est un trop grand défi.
With them the seed of Wisdom did I sow,
And with mine own hand wrought to make it grow;
And this was all the Harvest that I reap’d–
“I came like Water, and like Wind I go.”
De sagesse en mon champ j’ai semé la semence,
Et de ma propre main j’ai permis sa croissance.
Or, que me dit le fruit que je vais récoltant ?
“Survenu comme l’eau, comme l’air en partance”.
Think, in this batter’d Caravanserai
Whose Portals are alternate Night and Day,
How Sultan after Sultan with his Pomp
Abode his destined Hour, and went his way.
Pense, en voyant cette auberge sur cour
Dont les portes ne sont que les nuits et les jours,
Combien ont de sultans ici, en leur splendeur,
Séjourné, pour partir, à la fin, sans retour.
And David’s lips are lockt; but in divine
High-piping Pehlevi, with “Wine! Wine! Wine!
“Red Wine!”–the Nightingale cries to the Rose
That sallow cheek of hers to’ incarnadine.
De David, pas un mot, mais les accents divins
Du rossignol qui crie : Du vin, du vin, du vin,
Il nous faut du vin rouge… Et la rose à l’entendre
Éprouva de la joie, et rouge elle devint.
Heaven is incomplete without a heavenly romance
Let a glass of wine be my present circumstance
Take what is here now, let go of a promised chance
A drumbeat is best heard from a distance.
Le ciel est incomplet s’il n’est d’amours célestes ;
Je bois un coup de vin sans demander mon reste.
Plus qu’un grand bien promis, j’aime un modeste acquis,
Et les tambours, de loin, ont un son moins funeste.
Voir
https://paysdepoesie.wordpress.com/2013/09/25/diogene-de-sa-lampe-eclairait-en-plein-jour/
ainsi que
https://paysdepoesie.wordpress.com/category/rubaiyat/
sans oublier
https://paysdepoesie.wordpress.com/2016/06/29/fontainebleau/
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The Magical Arabian Nights tales, the post is abeautiful reflection of the golden era.
jalal
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Omar Khayyam and wine – what a great composition to spend a night with
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Reblogged this on By the Mighty Mumford and commented:
TRIPLE WOW!!!
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Pingback: Rubaiyat – Héraldie, seconde fondation: 13 mars 2017. (Héraldique et Poésie)
Khayyam et E’Tessam Zadeh === 1931 (louphole.com)
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Dès l’aube, à la taverne une voix me convie,
Disant : « Folle nature au plaisir asservie,
Lève-toi, remplissons notre coupe de vin,
Avant qu’on ait rempli la coupe de la vie ! »
—=*=—
Dans ce Monde, qui fut notre asile d’un jour,
Nous n’avons eu que maux et chagrins tout à tour.
Hélas ! nous n’avons pu résoudre un seul problème ;
Avec mille regrets nous partons sans retour.
—=*=—
Nous lisons le Coran – car c’est le Mot suprême –
De temps en temps, non pas sans cesse, tout de même.
Sur le bord de la coupe il est un verset clair,
Qu’on lit toujours, partout, comme un divin poème.
—=*=—
Au canard le poisson disait en son langage :
« Au ruisseau desséché viendra-t-il quelque orage ? »
Le canard dit : « Qu’importe, et vous et moi grillés,
Que le monde après nous soit mer ou bien mirage.»
—=*=—
Puisque la vie est courte, il faut boire sans cesse,
Car on ne peut jamais retrouver la jeunesse.
Du moment qu’ici-bas tout s’écroule un beau jour,
Il vaut mieux que l’on tombe écroulé dans l’ivresse.
—=*=—
Au palais où régnait Bahram, le grand monarque,
Le lion se prélasse et la gazelle parque.
Bahram prenait l’onagre au moyen d’un lacet ;
Vois donc comme il fut pris lui-même par la Parque !
—=*=—
Qu’est-ce donc que ce Monde ? un séjour provisoire
Où sans cesse le jour succède à la nuit noire.
Cent rois comme Djemchid y vinrent tour à tour,
On y vit cent Bahram mourir en pleine gloire.
—=*=—
D’avoir péché, Khayyam, ta peur est incroyable.
Pourquoi donc te trouvé-je un air si pitoyable ?
Qui n’a jamais péché, n’aura point de pardon ;
Sans pécheurs, à quoi sert tant de pardon, que diable !
—=*=—
Le printemps, une amante au galbe gracieux ;
Une prairie ; un pot de vin délicieux ;
Voilà l’Eden. Je veux être – quoiqu’on en dise, –
Moins qu’un chien si je songe au paradis des Cieux !
—=*=—
Ce Monde n’est pas bon, sans vin, sans échanson,
Sans la flûte qui joue une douce chanson ;
Car j’ai beau regarder les choses de ce monde,
Je ne vois rien, hormis la joie et la boisson.
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Ma raison ne sait pas prouver l’Etre suprême.
Mais ma dévotion reste toujours extrême.
Comment puis-je savoir ton être exactement ?
O mon Dieu, nul ne peut le savoir que toi-même.
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La vérité semble être un pauvre arbre sans fruit.
Car pour la discerner nul n’est assez instruit.
Et chacun tend la main vers une branche faible.
Et l’homme reste ainsi dans l’éternelle Nuit.
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À boire du bon vin sois donc habitué.
Il réconfortera ton corps exténué.
Quand tu verras venir un déluge de peines,
Prends des outres de vin comme Arche de Noé.
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Ceux qui furent doués de toutes les vertus
Et léguèrent leur flamme aux amis qu’ils ont eus,
Ne sont jamais sortis de cette nuit profonde :
Ils ont dit quelque fable, et puis, ils se sont tus.
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Avec des fleurs, du vin, une belle maîtresse,
Je goûte, autant qu’on peut, d’amour et d’allégresse.
Et depuis que je vis, et tant que je vivrai
J’ai bu, je bois toujours et je boirai sans cesse.
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L’intelligence est chose inutile en ce Monde.
Ce n’est que pour les sots qu’ici-bas tout abonde.
Verse donc la liqueur qui détruit la raison,
Pour que la Destinée un peu mieux nous réponde !
—=*=—
Seul un buveur comprend le langage des roses,
Et non les pauvres gens pleins de pensers moroses.
Ceux-là ne savent pas ; il leur faut pardonner :
Car les ivrognes seuls goûtent les bonnes choses.
—=*=—
Le soleil a dressé l’échelle du matin.
Le roi du jour a mis dans sa coupe du vin.
Bois donc : tel un héraut, l’aube, à travers le Monde,
Répète ces deux mots comme un ordre divin.
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Qu’il fait bon ! point de froid ni de lourdes chaleurs
Dans le parc, un nuage époussette les fleurs.
Et le rossignol dit aux pâles roses jaunes :
« Il faut boire du vin aux charmantes couleurs ! »
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On nous promet au Ciel des bonheurs grandioses,
Du miel, du sucre, un vin de la couleur des roses.
Allons, remplis la coupe et mets-la dans ma main :
Un rien, comptant, vaut mieux qu’à crédit bien des choses.
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Vidant avidement la cruche, j’ai tenté
D’apprendre les secrets de la longévité.
Et la cruche m’a dit : « Bois donc du vin sans cesse.
Nul ne revient au Monde après l’avoir quitté. »
—=*=—
Hier au cabaret, je rencontrai soudain
Un vieux qui sur son dos portait un pot tout plein.
Je lui dis : « O vieillard, songe à Dieu : quelle honte !
Il répondit : « Espère en Dieu, va, bois du vin ! »
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Ils ont soixante-douze espèces d’évangiles ;
J’aime mieux ton amour que ces choses fragiles.
Que m’importent l’Islam, le culte et le péché ?
C’est Toi le but ; assez de détours inutiles.
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De la Terre à Saturne et beaucoup plus loin même,
J’ai pu résoudre enfin n’importe quel problème.
J’ai paré tous les coups et défait tous les nœuds
Hors le nœud de la Mort, cette énigme suprême.
—=*=—
Le vin rend fort modeste un homme autoritaire,
On défait, grâce au vin, tous les nœuds du mystère.
Satan, s’il avait bu du vin, eût sûrement,
Deux mille fois, devant Adam, baisé la Terre.
—=*=—
Puisque tout est mortel, voici donc ma réponse :
Dans l’orgie et le vin nuit et jour je m’enfonce.
On me dit : « Puisse Dieu t’y faire renoncer. »
Que Dieu le veuille ou non, jamais je n’y renonce.
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Voilà que j’ai soudainement terriblement soif. Suivons la sagesse des maîtres ! 🙏🍻😇🍻
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🙂
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