Architecture et histoire

Architecture et histoire

 

Architecture

A la fin du XIIème siècle on comptait environ 600 églises romanes dans l’actuel département du Puy de. Aujourd’hui, une comptabilité scrupuleuse permet d’atteindre le nombre de 250 églises (ou ruines d’églises). Cinq de ces églises sont appelées “majeures”; ce sont les plus grandes. Il s’agit de l’abbatiale St Austremoine d’Issoire, de Notre-Dame du Port à Clermont-Ferrand, de Notre-Dame d’Orcival, de l’église de St Nectaire et de l’église de St Saturnin.

Quels sont les caractères de l’architecture romane en Auvergne?Résultat de recherche d'images pour "basilique orcival"

La caractéristique essentielle est l’existence d’un plan au sol très développé.

  • A l’extérieur (où commencent toujours les visites) il faut d’abord remarquer que les masses et les proportions annoncent la distribution intérieure des parties et leurs rapports dans les 3 dimensions (c’est l’une des définitions de l’art roman). Ainsi, à Orcival, aux 4 arcs en plein cintre qui jalonnent le mur extérieur de l’église correspondent les 4 travées de la nef. Ensuite, il faut insister sur le chevet (merveille de l’art roman en Auvergne). La “pyramide auvergnate” (forme pyramidale du chevet) contient de nombreux éléments caractéristiques de l’art roman auvergnat. Ce chevet est toujours très équilibré et s’inscrit dans des formes géométriques “parfaites” : il en résulte une très grande harmonie. Par exemple, les chapelles s’inscrivent dans des cylindres et leurs toitures dans des cônes aplatis. Une autre caractéristique des chevets romans auvergnats est le “barlong”, ensemble rectangulaire assez massif qui sert d’assise au clocher.
  • à l’intérieur, on peut distinguer 4 parties différentes :
    • le narthex à l’ouest, d’une seule travée avec un étage formant tribune. Les murs y sont en général plus épais et moins ajourés que dans le reste de l’édifice.
    • 3 nefs, une principale et deux bas-côtés. Le nombre des travées y est variable. Les deux bas-côtés sont couverts de tribunes dont le rôle architectural est essentiel. En effet, la voûte en demi berceau  (quart de cercle) qui recouvre les tribunes permet de neutraliser la poussée de la voûte centrale en exerçant une contre-poussée au niveau où s’exerce la poussée de la grande voûte (berceau plein cintre lisse).
    • Un transept débordant avec arc en mitre au centre sur les murs du fond du transept. Les arcs en mitres sont une signature du “roman auvergnat”
    • Un chœur flanqué d’un déambulatoire et chapelles rayonnantes. Le déambulatoire est couvert d’un berceau annulaire découpé en arêtes. Les chapelles rayonnantes circulaires sont recouvertes d’un cul-de-four. Ce type de chœur, au plan très développé est caractéristique des églises de pèlerinage (il facilite les processions).

Pour terminer la présentation des caractères principaux de l’architecture romane auvergnate, on peut insister sur la très grande homogénéité architecturale des édifices qui s’explique par la rapidité de leur construction.

 

Histoire

Une dévotion mariale plus que millénaire

Historique : Un pèlerinage ancien existait en ce lieu, semble-t-il, antérieur au IXème siècle parce que cité par Grégoire de Tours au VIème siècle, enfant d’Auvergne et considéré comme le premier historien de La France par son livre « Histoire des Francs ». La dévotion à la Vierge Marie et le pèlerinage sont les raisons premières de la présence de cette grande basilique dans ce petit bourg… Pour permettre l’implantation et l’orientation de la basilique (tournée vers l’est, le soleil levant, symbole du Christ ressuscité) il a fallu entamer la montagne et détourner le cours de la rivière. Elle a été bâtie d’un seul jet, en pierres volcaniques.

Orcival veut dire source en celte  : Le sanctuaire d’Orcival aurait-il succédé à un lieu de culte druidique ? L’Eglise en suivant les recommandations de St Augustin de Cantorbéry (Augustin est un moine bénédictin mort entre 604 et 609. Chef de la mission envoyée pour convertir les Anglo-Saxons, il devient le premier archevêque de Cantorbéry en 597) prit le parti de construire ses lieux de culte sur des lieux de culte païens.
« Ne détruisez pas les temples, baptisez-les d’eau bénite, dressez-y des autels ; là où le peuple a coutume d’offrir des sacrifices aux idoles, permettez de célébrer à la même date des festivités chrétiennes. »
L’eau symbole de vie nous rappelle vraisemblablement l’étymologie d’Orcival. L’eau coule toujours dans la Chapelle de la Source.

Histoire du pèlerinage :
Il semblerait qu’Orcival ait été évangélisée très tôt et le pèlerinage lui serait concomitant.
Je cite l’abbé Quinty : curé doyen de Notre Dame d’Orcival
« Le pèlerinage était donc en pleine prospérité au IXe. Il faut remonter plus haut pour en découvrir l’origine.
Une chronique provençale du XIIIe parle de reliques de la Vierge Marie qui, de « Pont l’Abei », auraient été portées partie à Rocamadour, partie à « Orcivaus in Auvergna », vers l’an 878. Quelle est la nature de ces reliques ? La chronique ne le dit pas, mais il ne semble pas téméraire de conclure que notre pèlerinage, comme celui de Rocamadour, était alors connu. Que sont-elles devenues ?
Jacques Branches, prieur de l’abbaye de Pébrac, qui publiait en 1652 sa « Vie des Saints et Saintes d’Auvergne et du Velay », se fait l’écho d’une naïve légende, d’ailleurs conservée dans les familles du pays d’après laquelle la Vierge d’Orcival aurait été sculptée par Saint Luc, comme celle de Sainte Marie Majeure à Rome, du Mont de la Garde prés de Bologne, et les trois de l’île de Mélite. Saint Luc était médecin, était-il Peintre et sculpteur ? Certains le nient, d’autres l’affirment. Qui le saura jamais ? » (P.7, ND d’Orcival par l’abbé QUINTY, 6éme édition conférence donnée le 29 novembre 1920, et imprimée dés juillet 1936, réédition de 1945 par imprimerie RACLOT)
Le jour du pèlerinage fixé à la fête de l’Ascension (Pourquoi à l’Ascension qui est une fête du Christ ? Les fêtes relatives à Marie n’étaient pas encore établies). Ou comme le suggère l’abbé Quinty, il aurait remplacé une fête païenne : Beltaine ? Dans un même ordre d’idée, plus tard l’église n’aurait-t-elle pas été dédicacée à la sortie de l’hiver, car dans cette région de moyenne montagne, les hivers étaient rudes et les populations paysannes aimaient se retrouver pour fêter le printemps ?
La fête de l’Ascension semblait la date la plus appropriée.
(Beltaine ou Belotepnia – les « feux de Bel » –, aux alentours du 1er mai, est une fête sacerdotale en rapport avec Belenos et de sa parèdre Belisama, et marque le passage de la saison sombre à la saison claire, avec le changement d’activités que cela implique. Les druides allument de grands feux pour protéger le bétail, essence même de la richesse. C’est la deuxième date la plus importante du calendrier)

La procession :
Après la construction de la basilique, dit encore la légende d’après l’abbé Quinty, « La statue, préservée de la destruction (de quelle statue s’agit il ? -ce n’est pas précisé -) vint y prendre place, mais dit encore la légende, elle ne put se résoudre à y demeurer. Elle revenait sans cesse à son ancien séjour. C’est alors que la résolution fut prise de la porter chaque année, en une procession triomphale, à l’emplacement de son « Tombeau ». Ou une hypothèse plus vraisemblable, au Moyen-Âge ont avait à cœur de garder en mémoire les lieux fondateurs.
Cette procession a eu des hauts et des bas au cours des siècles mais a montré une fidélité exemplaire si bien quand 1893, Monseigneur Belmont, nouvellement nommé évêque de Clermont fut impressionné par l’ampleur du pèlerinage et la ferveur de la dévotion mariale qu’il demanda au pape Léon XIII, d’élever l’église en basilique et le couronnement de la statue de Marie. Ce qui fut fait en 1894, il avait du être très convaincant.
La coutume est attachée aussi à ce que l’évêque de Clermont soit présent lors du pèlerinage.

« Notre-Dame des fers » : Sur la façade du transept sud on voit des chaînes, boulets et entraves : ceux sont des ex-voto qui représentent en remerciement la libération de prisonniers qui ont imploré Notre Dame d’Orcival pour être libérés et qui ont obtenu cette grâce.
Cette coutume remonte à la guerre de 100 ans, (XIV –XVe) lorsque en 1375, des bandes anglaises grossies d’aventuriers venus de toutes provinces sont cantonnées à 6kms d’Orcival, sur un rocher, appelé Roche Sanadoire (il y avait un château), qui était une place non prenable d’après Froissart un chroniqueur de l’époque « si ce n’est par la grâce de Dieu. » ; il y a là 700 hommes d’armes, 80 capitaines et un commandant redoutable, l’Anglais Robert Canol ou Channel, fils du maire de Londres. Les campagnes environnantes sont sans cesse dévastées par ces pillards qu’aucune armée, pas même celle du Duc de Berry, n’a pu réduire. Au secours du Duc, le roi de France envoie son propre frère, Louis II de Bourbon (apparenté à la famille ducale d’Auvergne). Ce petit fils de Saint louis, prince très pieux, met sa troupe sous la protection de Notre Dame, et promet, s’il est vainqueur, de venir déposer son pennon, dans le sanctuaire de Marie. Trois semaines après, il exécutait sa promesse, car la forteresse était prise et le pays délivré.
D’après l’Abbé QUINTY, chanoine honoraire de la basilique, conférence donnée le 29 novembre 1920 dans la salle du Bon Pasteur à Clermont Ferrand, et éditée par imprimatur le 22 juillet 1936 par A. Chassaigne. , page 21. La scène se trouve représentée sur un ancien vitrail de la basilique à qui les gens d’Aurières ont donné une autre vie après la déposition des vitraux dans les années 1970. Il a remplacé un vitrail du chœur de leur église qui était cassé. Il est classé Monuments Historiques qui voudraient bien le remettre à sa place originale dans le Narthex. On peut le voir en allant visiter l’église qui possède un autre trésor, un magnifique autel du XVIIe plaqué à la feuille d’or.
Après cet épisode et d’autres tout aussi spectaculaires, il a été rajouté au XVIe en mémoire de l’événement, un empâtement représentant une Vierge appelée Notre Dame des Fers, située entre les 2 ouvertures de la façade. Au dessous, se trouve un personnage en supplication, mains levées, enchaîné aux poignets et à la taille : le prisonnier de toutes les époques.
Marie est encore très invoquée aujourd’hui sous ce vocable de Notre-Dame des Fers pour libérer nos cœurs de tous ce qui peut les enchaîner (peur, égoïsme, addiction, tristesse, pouvoir et avoir idolâtrés…).
En conclusion, pour comprendre ce qui se vit à Orcival, je vais citer l’abbé Craplet, dans un texte paru sous le titre « Le Silence d’Orcival », aux éditions du Zodiaque, trimestriel n°28Bis, dés la première page.
« C’est l’un des caractères propre de l’art roman, et très particulièrement de l’art roman d’Auvergne, que cette propension au calme et comme cet attrait vers le silence. Aucune recherche d’ « effets », de grandeur inconsidérée, de virtuosité apparente parce qu’extérieure. Cet art est recueilli. Il sait enfermer l’âme en des murs pleins, en sorte que le silence y soit aisé, le silence profond : celui du cœur. Afin que la prière jaillisse comme naturellement, sans peine. Afin, encore que la communion se fasse plus étroite, plus totale, entre le fidèle et Notre Dame, Mère du grand silence. 

On ne peut contempler Orcival sans se remémorer les mots si vrais de Maurice Zundel :
«  J’ai rêvé d’élever une église au silence…N’est ce pas Marie …, elle dont toutes les puissances résonnent des mystères de clameur qui s’accomplissent dans le silence de Dieu ? … C’est elle en effet le jardin fermé et le parvis solitaire, la nef pacifique et la lampe recueillie, l’abside triomphale et l’autel translucide. Elle enfin, Hâgia Sigê, la basilique du silence. »

LES VIERGES ROMANES /VIERGES EN MAJESTE
GENERALITES
La statue de Notre Dame d’Orcival appartient à la grande famille des vierges reliquaires d’Auvergne dites «Vierges en Majesté », Trône de la Sagesse (Sedes Sapientiae). La restauration a permis la découverte d’une logette ménagée dans le dos de la Vierge et rendue inaccessible par le placage du métal d’origine. La toute première intention a pu être d’en faire un reliquaire. Rien ne permet d’assurer que des reliques y auraient été insérées.
Le sculpteur avait peut être en tête le texte de Jean Damascène :
«  Ses mains porteront l’Eternel et ses genoux seront un trône plus sublime que celui des chérubins. »
C’est le Trône de la Sagesse.
Trône de la sagesse (sedes sapientiae) : comme l’église sert de trône à Marie, à son tour Marie sert de trône à la sagesse « incarnée qu’est le Christ ». D’où cette désignation de Trône de la Sagesse.
La Vierge d’Etienne II, (937-984, évêque de Clermont, lors de la reconstruction de la cathédrale) reste l’archétype des vierges romanes d’Auvergne. Cinq ou six points, que nous retrouvons dans la vierge d’Orcival, caractérisent de manière, plus ou moins marquée, ces statues.
Attitude de la Vierge : Marie s’efface derrière l’enfant qu’elle présente. L’enfant n’est pas blotti contre sa mère. (C’est le sculpteur qui a mis une distance entre elle et l’enfant, puisqu’il ne la touche pas. Les mains de Marie ne touchent pas l’enfant. Nulle trace de tendresse comme dans les vierges gothiques ou baroques. L’amour de Marie n’est pas centré sur la chair de sa chair mais il est ouvert sur le monde. Son amour est pleinement don.
Les vierges en Majesté sont symboles d’offrande, de don, et non d’adoration.
« La Vierge », pleine d’une grave majesté est toujours assise sur une chaise en bois aux arcades cintrées. Sur ses genoux, devant elle, est assis l’enfant Jésus. Elle le présente dans un geste d’offrande à l’adoration des fidèles de sa main droite ouverte.
L’enfant est assis sur les genoux de la Vierge. (Elle sert de trône à l’enfant).
Le visage est noble et fier au port de reine, d’où se dégage toujours une gravité solennelle, attentive, un peu distante, au regard fixe, lointain, plein d’intériorité.
Les mains toujours exagérément allongées et disproportionnées, sont symboles d’action et de puissance car Marie est toujours présente et active dans ce monde.
Ces vierges chargées de symboles semblent toutes sœurs.
Marie est aussi invoquée comme « Vierge de Lumière » car toute « remplie de Grâce », de la Lumière de Dieu, et ce n’est pas un hasard si le jour du 15 août, fête de l’Assomption de la Vierge, par l’ouverture, la plus à droite du chœur, le soleil l’illumine de ses rayons au plus haut de sa course entre 13 h 30 et 14 h de nos jours.
La basilique est dédiée à Marie en son Assomption.

Bernadette OLLIER

Père Jean Marc COUHERT

 

Prière à Notre Dame des fers

O Marie, « Toi qui fais vivre le nom du Seigneur d’âge en âge. » (Ps 44, 18)
Intercède pour nous auprès du Père plein de Tendresse et de Miséricorde
De son Christ, le Fils Bien Aimé, notre Sauveur
Avec son Esprit Consolateur.
En ce moment d’épidémie mondiale,
Que nous trouvions la solidarité humaine fraternelle pour y faire face.
Délivre nous de ce mal,
Soutiens les familles,
Tous ceux qui sont de service et au service de leurs frères,
Qui sans bruit oeuvrent chaque jour,
Et pour tous ceux qui sont seuls : migrants, prisonniers, personnes de la rue,etc…
Nous t’en supplions, ô Notre Dame
Délivre nous de cet enfer-mement.
Merci pour ton intercession.
Avec toi, nous tenons ferme dans l’espérance de la Lumière du Christ.