Le Christ Mort – Hans Holbein le Jeune – 1521

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 Le Christ mort au tombeau – Hans Holbein, dit Le Jeune – 1521 – huile sur panneau – 0,3x2 – Kunstmuseum de Bâle

Le Christ mort au tombeau – Hans Holbein, dit Le Jeune – 1521 – huile sur panneau – 0,3×2 – Kunstmuseum de Bâle

L’oeuvre dans son ensemble

   Le Christ mort au tombeau, également appelé Le corps du Christ mort au tombeau est une oeuvre de Hans Holbein le Jeune peinte en 1521 et actuellement conservée au musée d’art de Bâle, en Suisse. D’un format paysage orienté horizontalement, cette œuvre mesure 30 centimètres de hauteur sur 2 mètres de longueur. Ce format assez peu commun montre que l’œuvre était initialement prévue pour être la prédelle d’un triptyque. Le corps d’un homme est représenté de façon réaliste depuis la tête jusqu’aux pieds. Le spectateur observe le profil droit du corps, la tête étant placée à droite du panneau et les pieds à gauche. L’homme repose sur un drap blanc, légèrement plissé, entièrement nu en dehors d’un léger tissu blanc dissimulant son sexe.

Le corps semble particulièrement musclé ; Hans Holbein a pris soin de marquer une musculature assez importante, notamment sur les bras et les jambes. La carnation est plutôt pâle, mis à part sur les mains, les pieds et le visage de l’homme. L’arrière plan, d’un brun clair, semble très proche du corps, ce qui permet de mieux faire ressortir les teintes beiges du corps.

La composition du tableau confronte brutalement le spectateur à l’aspect du corps. En effet, l’espace est majoritairement occupé par le cadavre, le reste de l’œuvre étant constitué presque exclusivement de deux couleurs : le brun clair, et un brun très sombre proche du noir. Le corps est placé dans un espace très réduit dans lequel le regard du spectateur ne peut pas se perdre. La main droite, qui permet d’identifier le personnage représenté au premier coup d’œil, se détache sur le tissu blanc qui dissimule sa nudité, et est placée au milieu du tableau : elle ne peut donc pas échapper au spectateur. Les pieds, qui, comme la main, permettent d’identifier le corps, ressortent également sur un fond noir. Le visage, particulièrement expressif, est effrayant par la souffrance qui semble en émaner.

 L’aspect d’un corps en décomposition

   Certaines caractéristiques de ce corps le désignent comme celui d’un homme mort, et ce depuis un certain temps. La tête, les pieds et la main sont bleuis, les blessures ne saignent plus. La tête est abandonnée, les yeux, entre-ouverts, presque retournés, semblent vides de toute vie.

Les blessures de ce corps sont celles communément associées aux stigmates du Christ. Les mains et les pieds transpercés de clous, le flanc percé d’une lance : ce sont les marques de son supplice sur la croix. Dans ce tableau, Holbein tire parti du format caractéristique d’une prédelle pour recréer l’espace du tombeau dans lequel le Christ est supposé être enseveli. Le Christ repose sur le fond dur de son tombeau, la présence du drap blanc ne parvenant pas à en atténuer la dureté.

Holbein choisit de représenter le corps du Christ comme celui d’un homme athlétique, mais à la différence du corps victorieux que représentera Michel-Ange dans Le Jugement Dernier qu’il peint pour la chapelle Sixtine (1546/1556), celui-ci est émacié, très proche d’un corps réel. Il est même possible que Holbein ait pris pour modèle le corps d’un réel crucifié, afin d’y trouver tout les détails qui rendent son œuvre autant réaliste.

L’aspect de la mort est rendu jusque dans les moindres détails. Les doigts de la main droite sont crispés,la blessure qui marque le dos de la main montre la chair détruite, de la même façon que sur les pieds. Le visage est émacié, la peau bleuie, presque verdâtre. Holbein peint jusqu’aux ongles du Christ, et n’hésite pas à attirer le regard du spectateur vers les détails les plus morbides, qu’il peint avec la plus grande précision.

Les réaction suscitées

   Le Christ de Holbein est terrifiant par le réalisme du corps mort.

Le Christ est supposé ressusciter trois jours après avoir succombé sur la croix, mais l’état du corps représenté par Holbein empêche cette possibilité : voire un tel corps se lever et marcher serait uniquement horrible. Le peintre ne présente que la vision d’un Christ mort, et ne laisse rien supposer de la résurrection.

La précision avec laquelle sont peint les stigmates et le visage du Christ invite le spectateur à scruter sans discrétion le corps d’un homme qui n’a plus rien de divin. Cette précision évoque sans concession les souffrances que le Christ a éprouvé sur la croix. L’espace étouffant du tombeau ne laisse aucune échappatoire, ni pour le regard du Christ ni pour celui du spectateur, qui se retrouve placé en position de voyeur.

Dostoïevski, en voyant cette œuvre à Bâle, trois siècles plus tard, dira « Ce tableau peut faire perdre la foi. », tellement il avait été marqué par l’aspect du corps du Christ de Holbein.

 Inspiration

   Le retable d’Issenheim, qui présente un corps du Christ marqué par toutes les tortures qu’il a subies, a inspiré Holbein pour son tableau.

Otto Dix utilisera le même concept de prédelle-tombeau dans son triptyque La Guerre.

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