L’interview « Comme un garçon »

de MARIE-PAULE BELLE

C’est la meilleure nouvelle de cette fin d’année ! L’irrésistible et culte Marie-Paule Belle est de retour, au meilleur de sa forme, avec une double actualité : tout d’abord, un sublime et copieux album piano-voix « Un soir entre mille », quintessence de son style inclassable entre douce mélancolie et subtile fantaisie, décliné ici en 15 chansons imaginées avec Françoise Mallet-Joris, Serge Lama, Michel Grisolia et Isabelle Mayereau, le tout habillé d’un superbe portrait d’Olivier Coulon. Ensuite, une série de concerts très attendue au théâtre de Passy à Paris, du 4 au 14 janvier 2024, où elle célèbrera 50 ans de chanson ! Pour l’occasion, et en attendant de retrouver « La parisienne » la plus attachante à son piano, nous avons rencontré celle qui n’a jamais fait secret de ses préférences amoureuses et de ses engagements féministes. Elle a accepté de se raconter en filigranes, avec humour, élégance et nostalgie, le temps d’une interview « Comme un garçon ».

– Étiez-vous « Garçon manqué » (La Maison Tellier) dans votre enfance ?

Absolument ! J’avais horreur de jouer à la poupée. On m’a offert une fois un baigneur, avec lequel je n’ai jamais joué. En revanche, j’avais un petit frère, qui me suivait d’assez près, et auquel on offrait des jeux de garçon, des Meccano, des voitures, si bien que je jouais surtout avec lui. J’aimais aussi beaucoup jouer au foot, et à tous les jeux de garçon en général. Quand j’étais petite,je voulais aussi avoir mon Meccano comme lui, mais on ne me l’a jamais offert. Ce n’est que vers l’âge de 23 ou 24 ans, que ma compagne Françoise Mallet-Joris à laquelle j’avais raconté cette histoire, m’a offert mon premier Meccano (rires).

– Pourtant vous faisiez très petite fille modèle sur la pochette de votre premier album ? C’est vrai,

J’avais choisi cette photo de classe sur laquelle je faisais très petite fille rangée, bien comme il faut !

–  Du coup, j’imagine que vous jouiez plutôt à « Toi le Cowboy, moi l’indien » (Zazie) qu’à « Barbie, tu pleures » (Lio) …

Oui, j’aimais beaucoup jouer aux cowboys et aux indiens. D’ailleurs, avant l’âge de 8 ans, quand on me demandait le métier que je voulais exercer plus tard, je disais clown ou shérif, car le shérif est celui qui commande. Finalement, j’ai un peu réalisé mon rêve d’enfant en devenant artiste : je fais le clown, tout en commandant un petit peu…

– Vous-arrive-t-il de vous dire «Si j’étais un homme» (Diane Tell) dans votre métier de chanteuse ? Dans quelles circonstances ?

Je n’ai jamais voulu être un homme, ni regretté d’être une femme dans ma vie personnelle. Après, c’est vrai que quand j’ai commencé dans le milieu de la chanson, j’ai pu constater que les choses étaient moins faciles pour une femme… Il y avait beaucoup plus de garçons que de filles dans ce métier, mais au final, c’est aussi devenu une chance pour moi. Quand j’ai commencé à auditionner dans les cabarets parisiens, à l’Écluse et à l’Échelle de Jacob, je m’accompagnais alors à la guitare, et peu de filles chantaient comme ça des chansons, humoristiques en plus. Je pense que c’est pour cette raison que j’ai été choisie immédiatement. Je n’étais pas du tout dans le format des chanteuses de variété de l’époque. Même par la suite, on n’a jamais su me caser nulle part. C’est peut-être pour cela que j’ai duré… Je n’étais ni Yéyé, ni Rock, ni Pop, encore moins Rap aujourd’hui. On ne sait pas où me mettre, alors on m’a laissée tracer mon chemin au milieu de tout cela. 

– Si vous étiez un homme justement, quel chanteur français serait votre modèle ?

Charles Aznavour ou Charles Trenet, qui sont d’immenses auteurs et compositeurs.

– Quel chanteur international ?

A mes débuts, j’aurais bien aimé être Paul Mc Cartney ou John Lennon, je pense. Je n’ai pas encore écouté la nouvelle chanson des Beatles, mais je suis impatiente de le faire…

– Feriez-vous un style de musique différent ?

Oui, certainement, je ferais du Rock. Pour le côté rebelle, pour la rythmique, mais du Rock dans la descendance des Beatles, avec des mélodies. C’est ce que j’ai toujours aimé chez eux, c’étaient de grands mélodistes, avec des harmonies sublimes. En même temps, ça y allait sur scène… Petite, alors que j’habitais Nice, je suis allée les voir au Palais des Expositions. Je n’ai rien entendu, tellement tout le monde hurlait autour de moi, mais j’en garde un souvenir extraordinaire.

– Dans les 60’s, auriez-vous été davantage séduite par la sexy Sylvie (comme Johnny), ou la cérébrale Françoise (comme Jacques) ? 

Les deux, je pense. J’aurais voulu être sexy comme Sylvie, car je ne m’aimais pas physiquement et j’avais beaucoup de complexes. Mais j’aimais bien aussi le côté cérébral de Françoise. Elle est capricorne et je suis ascendant capricorne. Elle était assez terrienne, et j’aimais bien sa façon d’être, en plus d’être très belle, très grande, alors que moi j’étais petite. En fait, j’ai toujours aimé les deux. D’ailleurs, pour une émission des Carpentier, j’ai écrit une chanson pour Sylvie, et on s’est beaucoup marré. C’est ce que j’aimais dans ces shows, faire des choses invraisemblables, pour une seule émission. J’étais censée être la copine de chambrée de Sylvie et on chantait « y’a deux jours que je suis à Paris », une chanson un peu sur la rythmique de « La parisienne » qui était mon succès du moment. La dernière fois que j’ai vu Sylvie sur scène à l’Olympia, j’ai adoré sa façon de chanter « Mon enfance » de Barbara. C’était très émouvant. C’est une fille qui aurait pu montrer d’autres facettes de son talent, que ceux qu’elle a montrés jusqu’ici. Elle est très gentille en plus. Françoise, je ne l’ai rencontrée qu’une ou deux fois. On ne s’est pas vraiment parlé. C’était l’époque où elle faisait des thèmes astraux pour Radio France. On n’a pas vraiment pu avoir de discussion sur la chanson, et je le regrette vraiment.

– Avec quelle chanteuse aimeriez-vous enregistrer un duo d’amour sulfureux comme «Je t’aime, moi non plus » (Gainsbourg / Birkin) ?  

Ca ne me branche pas tellement comme idée… Mais disons alors que j’aurais bien aimé chanter avec Catherine Deneuve ou Isabelle Adjani qu’il a faites chanter.

– Et dans la peau de Gainsbourg toujours, quelles actrices actuelles aimeriez-vous faire chanter ?

Virginie Efira et Juliette Binoche.

– Regrettez-vous d’avoir si peu écrit pour les autres finalement ?

Oui, j’aurais adoré, mais c’est drôle, parce qu’étant donné que j’ai travaillé avec les mêmes auteurs, et dans un univers très particulier, on me l’a très peu demandé, alors que j’adorais me projeter dans l’univers d’un autre artiste. Le peu de chansons que j’ai écrites pour d’autres ont été chantées par Bibie, ou par des chanteuses québécoises comme Pauline Julien et Edith Butler. J’ai aussi écrit avec Françoise une chanson pour Nicole Croisille, qu’elle a bien enregistrée, mais mais qu’elle n’a jamais sortie sur disque ni même chantée, parce qu’elle avait une étendue assez grande. Nicole a pourtant une très belle tessiture. J’en ai oublié le titre, pardonnez-moi, mais j’ai tendance à oublier les dates, etc. Ce sont les autres, comme mon frère, qui me rappellent parfois certains évènements que j’ai oubliés de ma carrière, dont je ne suis pas du tout comptable… Il arrive aussi que des fans postent des archives sur les réseaux sociaux, que je ne connais pas du tout. Il faut dire qu’à la grande époque, il n’y avait que trois chaines de télé, donc on nous voyait tout le temps, partout. Je donnais plus de deux cents concerts par an… D’abord avec Serge Lama, qui m’a propulsée dans un créneau très populaire, puis toute seule. Impossible de me rappeler de tout.

– Accepteriez-vous de changer de sexe pour les besoins d’une pochette d’album, comme Gainsbarre sur « Love on The Beat », sans vous soucier de votre image ?

Oui, mais je n’en vois pas trop l’utilité. Cela dit, j’aime assez le côté androgyne chez une femme comme chez Marlène Dietrich. J’ai beaucoup aimé quand Saint-Laurent a habillé les femmes en smoking. Je trouve ça très beau. Le côté androgyne suggère beaucoup de fantasmes chez les deux sexes. D’ailleurs, pour la pochette de « Berlin des années 20 », j’ai posé en smoking, assise sur une chaise, le tout dans un décor dessiné.

– Si vous deviez faire une reprise jouant sur l’androgynie aujourd’hui, plutôt « Comme un garçon » (Sylvie Vartan) ou « Sans contrefaçon » (Mylène Farmer) ?

« Comme un garçon ».

– Et dans la peau d’un séducteur, plutôt « Femme des années 80 » (Michel Sardou) ou « Femmes, femmes, femmes » (Serge Lama) ?

Ni l’une, ni l’autre. J’ai beau être très proche de Serge Lama, je ne peux m’empêcher de voir en cette chanson une caricature de ce qu’il est vraiment, comme lorsqu’il chante « Superman ». C’est vrai qu’à l’époque, il avait des côtés machos qui m’énervaient énormément. On se disputait souvent là-dessus, parce que j’étais et je suis toujours féministe. Il aimait bien me charrier pour rigoler, mais pour moi Serge Lama, c’est « D’aventures en aventures », « Le 15 juillet, à cinq heures », et toutes ces chansons très subtiles, ou pour certaines, plus toniques comme « Les glycines ». Pour le côté séducteur, je penserais plutôt à des chansons de Gainsbourg, des chefs d’oeuvres comme « La Javanaise ».

– Serge Lama a contribué à votre nouvel album…

Oui, il a écrit « L’ombre de son chien », une chanson sur la solitude, qui est complètement désespérante. Cet album est très nostalgique dans son ensemble… 

– Plutôt « Un homme heureux » (William Sheller) ou « Un homme debout » (Claudio Capéo) ?

« Un homme heureux » bien sûr. William Sheller est mon deuxième frangin, complètement, et même à l’opposé total de Serge. Cela dit, ils ont en commun d’avoir un côté très féminin dans leur sensibilité. La musique de William est extraordinaire : c’est la contraction de la musique contemporaine, de Stravinsky, mêlée au Rock, à des instruments acoustiques, des guitares électriques et des instruments symphoniques. J’adore son imaginaire et sa façon d’écrire les mots. Ce sont des mots de tous les jours, très simples. Et puis c’est un grand ami, on a fait des tas de fêtes ensemble. On a chanté pour des bandes originales de films, et il a écrit beaucoup d’arrangements de mes chansons. Ce sont des chansons qui ne sont jamais trop passées en radio, mais que mon public connait bien. C’est aussi William qui m’a poussée à faire du piano-voix. A l’occasion de ces fêtes, on jouait à quatre mains, des musiques que Schubert avait écrites, pour être jouées dans les bordels. Il me criait les accords parce que je ne lis pas la musique, n’ayant pas assez travaillé mon piano quand j’étais petite. Je jouais ma partie à gauche, et lui à droite. Les copains dansaient. Et puis, chacun jouait les chansons qu’il venait d’écrire, et il me disait toujours : pourquoi ne n’accompagnes-tu pas au piano ? Tu verras que ça n’a rien à voir, ce n’est pas le même climat qu’avec les musiciens. Il a tellement insisté, que quand on m’a proposé de faire une rentrée au Théâtre de Dix-Heures à Paris, seule au piano, j’ai dit oui. Et puis, il m’a dit une phrase qui m’est toujours restée : tu éprouveras la plus grande trouille et la plus grande liberté de ta vie. Et c’est la vérité… Je fais ce que je veux : c’est mon côté leader, numéro 1 en numérologie (rires) ! 

– Au registre gay friendly, plutôt « Comme ils disent » (Charles Aznavour) ou «Kid » (Eddy de Pretto) ?

« Comme ils disent » est une chanson sublime. À sa sortie, Charles a été très agressé, tout le monde se demandait s’il était homosexuel… Je trouve extraordinaire sur scène, ce moment précis où l’éclairage se resserre sur lui, figé devant le micro, et où il se contente d’un geste de la main. C’est une trouvaille formidable qui suffit à installer le personnage. Il force ainsi le public à écouter chaque mot.

– Si vous deviez chanter « Je suis un homme », ce serait la chanson de Polnareff ou celle, homonyme, de Zazie ?

Peut-être celle de Polnareff, là encore parce qu’elle évoque ma jeunesse. Il a été très précurseur, très rebelle… J’ai adoré toute cette période, il avait un univers très à part. Etrangement, je ne l’ai jamais rencontré, même pas sur un plateau télé. Les gens que j’ai rencontrés quand j’étais jeune sont essentiellement Souchon, Duteil, Catherine Lara, Voulzy… On s’aimait bien et on se retrouvait chez les Carpentier, contents d’être là, de partager. On ne faisait ce métier ni pour être célèbres, ni pour être riches, comme c’est parfois le cas aujourd’hui. On aimait avant tout être ensemble et parler de musique. Jamais d’argent. On s’entourait juste d’un attaché de presse, et pas de dix personnes, comme c’est le cas des jeunes artistes. C’était tranquille… En tournée, on se contentait d’une bouteille d’eau dans sa loge. Si bien qu’on est encore surpris quand dans mes contrats, je demande une bouteille d’eau, un savon et une serviette éponge. Je n’ai jamais usé de ma célébrité pour obtenir des choses. Elles viennent naturellement avec le succès. Enfin, quand on a du succès, parce que quand on est au creux de la vague, il n’y a plus beaucoup de monde… (rires).

– Quelles seraient les qualités de la femme idéale selon vous ? Plutôt « Je serai douce » (Barbara) ou « Libertine » (Mylène Farmer) ?

Les deux ! Libertine, je n’ai plus l’âge de dire ça, mais on va dire que j’ai bien profité de la vie (sourire). Quant à la douceur, ou plutôt la retenue et la subtilité, c’est ce qui attire chez une femme. Je préfère quand les choses sont suggérées, plutôt qu’affichées au premier degré.

– Aviez-vous chanté cette chanson de Barbara dans le spectacle et l’album que vous lui aviez dédiés ?

Non, je m’étais limitée à la première période de Barbara, sa période Bobino des années 60, à des chansons comme « Le bel âge », « Attendez que ma joie revienne », « Drouot », et toute cette époque-là. Ensuite, je trouve qu’elle est plus devenue un personnage qu’une personne. A ses débuts à la sortie de l’Écluse, elle était complètement offerte, mais après, elle est devenue un peu une caricature d’elle-même et je l’ai moins aimée. Je l’ai chantée au Théâtre de Dix Heures, puis à l’Alhambra, où j’ai scindé mon récital en deux, entre son répertoire et le mien. Auparavant, je lui avais rendu hommage au Casino de Paris. C’est un répertoire que je connais bien, et que je ne voulais absolument pas déformer, comme c’est souvent le cas maintenant quand quelqu’un fait une reprise. je déteste quand les juges de The Voice disent à un candidat : « c’est bien, vous vous êtes bien approprié la chanson ». Je n’aime pas du tout quand on déforme une mélodie. Quand on ne la reconnait plus, ce n’est plus la même chanson. Bien sûr, quand quelqu’un reprend une de vos chansons en la déformant, c’est difficile de dire qu’on n’aime pas. On se contente de dire : c’est intéressant comme univers ! (rires).

– Vous vous connaissiez avec Barbara ?

On s’appréciait mutuellement, je le sais de Roland Romanelli qui l’a très longtemps accompagnée sur scène, comme il m’a aussi accompagnée. C’était un lien entre nous. On s’appelait de temps en temps. Elle m’envoyait des fax, que j’ai conservés, mais qui se sont un peu effacés avec la lumière du jour.

– Ce n’est pas très surprenant finalement, il y a une sorte de descendance entre vous deux…

Peut-être parce que nous avons fait les mêmes écoles, et avons les mêmes références. J’ai longtemps chanté à l’Écluse, et elle aussi. Nous avons aussi appris le piano classique toutes les deux.

– Quel type de femme n’aurait aucune chance de vous séduire ?

Je n’aime pas du tout quand une femme a un côté masculin trop développé. C’est idiot de vouloir copier les défauts des mecs. Si j’aime une femme, c’est pour sa féminité. Je déteste la brutalité, et surtout la vulgarité. Pas davantage chez un homme d’ailleurs. C’est rédhibitoire pour moi.

– Accepteriez-vous d’être un homme au foyer, si votre compagne était artiste, par exemple  ?

Mais oui, bien sûr !  Si ma femme était artiste, je l’enverrais chanter ses chansons, pendant que je garderais mes petits bambins avec moi !

– Épouseriez-vous sans problème une femme de 20 ans votre cadette, comme beaucoup de Rockstars ?

Mais oui, pourquoi pas ?

– Et de 20 ans votre aînée ?

Aussi ! D’ailleurs, quand j’ai connu Françoise, elle avait 15 ans de plus que moi. Je venais de perdre ma mère, et j’ai fait un transfert maternel sur elle. Je me suis intégrée dans sa famille, au milieu de ses enfants. Elle m’a prise comme une enfant supplémentaire au début. J’étais une amie, on travaillait ensemble, et j’éprouvais un sentiment de protection à ses côtés. Quand je me suis lancée dans ce métier, je n’y connaissais rien. Elle me briefait pour les interviews, parce qu’à l’époque, les journalistes essayaient toujours de nous piéger, de nous déstabiliser… Elle avait un sens de la répartie extraordinaire, et m’apprenait à trouver des réponses en « biaisant » les questions. C’est le cas de le dire (rires) ! Je me rappelle de ma première télé dans une émission présentée Jacqueline Alexandre. Avant de rejoindre mon piano, elle m’avait demandé si je voulais être ceci ou celà : j’ai répondu dans une inconscience totale que j’étais ce qu’elle voulait que je sois, et je suis allée chanter ma chanson (rires). Aujourd’hui, on ne pourrait plus se montrer aussi désinvolte. Avec les réseaux sociaux, tout est rapidement relayé, déformé. D’ailleurs, on ne peut plus rien dire. Regardez les proportions ridicules qu’ont pris les déclarations de Juliette Armanet sur la chanson de Michel Sardou. C’est son droit après tout, de ne pas aimer. Elle a été violemment attaquée de toutes parts, alors que c’est une grande mélodiste, dont personnellement, j’aime beaucoup la façon de jouer du piano.

– Françoise Mallet-Joris figure aussi au générique de cet album. Avez-vous beaucoup d’inédits dans vos tiroirs ?

Oui, j’ai encore beaucoup de textes de Françoise, et même de chansons finies que nous avions écrites ensemble. Il suffit que j’en lise le texte pour que la musique m’en revienne, même si elles datent de 20 ou 30 ans… Ce fut le cas pour les chansons de cet album. C’était incroyable. « Un soir entre mille » notamment m’est revenue tout de suite. Je me suis souvenue du début de l’intro, avec les accords à la main droite, comme pour « Pays natal ». J’ai aussi inséré dans cet album une chanson écrite toute seule après la mort de ma mère, il y a plus de quarante ans. Il faut avouer que quand on est entourée de paroliers de talent, comme ce fut mon cas, on n’ose pas publier ses propres petits mots, écrits sur une page de cahier. On est en admiration devant eux, on reste silencieuse, avant d’oser un jour se dévoiler un peu plus… (rires).

– Quelle est selon vous la plus belle déclaration d’amour, jamais chantée par un homme à une femme ?

« La chanson des vieux amants » de Brel.

– Hormis Françoise, ou Isabelle Mayereau sur ce nouvel album, vous vous êtes surtout entourée d’hommes de talent…

Oui, mais tous les garçons que j’ai rencontrés, Serge Lama, William Sheller, Roland Romanelli, ont tous une grande sensibilité féminine. C’est ce que j’aime chez un homme. Quand j’ai connu Roland, c’était un vrai macho, mais il avait aussi cette sensibilité italienne. J’adore ce mélange des genres !

– quelle chanson du répertoire masculin est « la chanson de votre  vie » ?

« Avec le temps » de Léo Ferré. Je ne l’ai jamais chantée sur scène, mais seulement pour mes amis, pour lesquels je chantais Brel, Ferré, quand j’étais jeune. J’adorais les chansons à texte. Par la suite, je me suis concentrée sur mes propres chansons, sauf lorsqu’on m’a demandé de faire des reprises dans le cadre des collections Atlas vendues en kiosques. J’ai alors chanté beaucoup de choses, du Rita Mitsouko, du Polnareff, des chansons très éloignées de mon univers, et j’ai adoré cet exercice. Avec Serge sur scène, j’ai aussi chanté « La petite cantate » de Barbara ou « D’aventures en aventures », des chansons dont je me sentais proche.

– À l’inverse, quelle est celle que vous trouvez inchantable par une femme ?

Tout ce qui vient du Rap dur et violent. Je me rappelle d’une phrase d’Orelsan qui m’avait choquée, et qui a fait que pendant très longtemps, je n’ai pas pu l’écouter. elle disait : « tu vas te faire Marie-Trintigner la gueule ». Je ne pourrais jamais chanter ça ! Je me suis dit : Orelsan, jamais ! C’est inadmissible d’écrire ça ! (n.d.l.r : Orelsan a été jugé suite à l’action engagée par des associations féministes qui le poursuivaient pour provocation à la violence envers les femmes). De façon générale, je n’écoute jamais de Rap, donc je ne peux pas trop juger ce style de musique, parce que de mon point de vue, ce n’est pas de la chanson.  

Question subsidiaire : dans la peau d’un garçon, que diriez-vous à Marie-Paule, pour la séduire ?

Ce qui me fait craquer, ce ne sont pas les mots, mais les rires, les sourires, et surtout les silences. Je trouve qu’on dit davantage de choses dans le silence. Si vous me jouez de la musique, si on partage des silences, avant d’aller boire un coup de rosé et déconner, alors là, je suis très vite séduite ! (rires).

Propos recueillis par Eric Chemouny

Photos : F.Pugnet (DR) et photos Archives (DR) / avec Serge Lama : Véronique Séard (DR/ VS COMMUNICATION)

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