Certains estiment qu'elle a révolutionné notre rapport aux enfants et changé notre manière de mieux les élever, d'autres l'ont accusée d'être la mère de l'enfant-roi. Assurément, la psychanalyste Françoise Dolto a joué un rôle fondamental dans la manière dont nous concevons l'éducation de nos enfants. La psychanalyste et pédopsychiatre Caroline Eliacheff, auteure de Françoise Dolto, une journée particulière (Flammarion), nous rappelle son importance dans le développement de la pédopsychiatrie au 20e siècle.
Françoise Dolto commence à pratiquer sa profession pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle intervient donc surtout auprès d’orphelins de guerre. Un peu avant les années 1950, l’éducation est celle d’une autre époque, c’est-à-dire une éducation de dressage, où l’obéissance occupe une place extrêmement cruciale dans le processus. Cependant, pour Françoise Dolto, « l’enfant est un être de désir, de langage, qui comprend, quel que soit son âge, et un être à qui on doit s’adresser comme on s’adresse à tout être humain, quel que soit son niveau de langage. Ce n’est pas parce qu’un enfant ne parle pas encore, du fait de son âge, qu’il n’a pas de possibilités de compréhension ».
Une autre des idées de la psychanalyste choque à l’époque, celle que « l’enfant est un être de désir à égalité avec l’adulte ».
Françoise Dolto se fait connaître avec la publication en 1971 du Cas Dominique. Ce livre qui raconte la cure d’un adolescent gagne la reconnaissance de ses pairs psychanalystes.
Elle obtient un succès auprès du grand public grâce à la radio, surtout dans Lorsque l’enfant paraît, une émission animée par Jacques Pradel à France Inter, de 1976 à 1978.
« Pendant deux ans, au moment où les émissions de Françoise Dolto passaient, pendant 10 minutes la France s’arrêtait. Tous ceux qui ont écouté ces émissions s’en souviennent et en parlent comme si c’était hier. »
Encore une fois, ses pairs la critiquent, car elle semble répondre en direct à des cas soumis sans en connaître les détails. En réalité, les participants à l’émission lui ont déjà envoyé des lettres, souvent très longues, décrivant leur problème. Françoise Dolto en sait donc beaucoup plus sur leur situation que ce qu’elle communique durant l’émission.
La Maison Verte
La création en 1979 de La Maison Verte demeure un des plus importants legs de Françoise Dolto, qui désire un lieu de prévention des difficultés liées à ce qu’elle nomme les « séparations normales de la vie », soit l’entrée en garderie, le séjour chez les grands-parents, l’entrée à l’école et les hospitalisations parfois.
Aujourd’hui, ces associations de quartier associées à des psychanalystes se trouvent un peu partout à Paris, dans la majorité des villes de France et dans d’autres pays. Elles offrent leurs services auprès des enfants et des parents sous d’autres noms que La Maison Verte; par exemple, trois centres de La maison buissonnière existent à Montréal, et d’autres inspirés du même modèle ont pignon sur rue au Québec.
La Belle Province occupe d’ailleurs une place particulière dans la vie de Françoise Dolto. En 1983, celle-ci y donne une série de conférences et rencontre des spécialistes en intervention auprès des enfants du Québec. Le livre Dialogues québécois en est tiré.
« Elle transmet [ses connaissances] à toutes sortes de gens, pas seulement aux psychanalystes. À tout le personnel qui s’occupe de l’enfance. […] Énormément de personnes profitent d’elle, au meilleur sens du terme, de façon différente. »
En somme, Françoise Dolto voulait transmettre à tout le monde ce qu’elle apprenait de la psychanalyse avec les enfants.