Traversée de Dublin en bateau gonflable (2)

J’avais attaché mon bateau sur une échelle à hauteur des Civic Offices, et il avait disparu quand je voulus continuer mon périple fluvial. Quelques jours plus tard, j’achetai donc le même bateau, fabriqué en Chine, d’une capacité de 140 kg, dans le même magasin de jouets.

Je m’enquis d’une plateforme pour amarrer (c’est comme ça qu’on dit ?). Un peu en aval, j’avise un chantier, en plein centre ville, qui prépare l’érection (mais est-ce le bon mot ?) d’un nouveau pont. Il me serait impossible de passer à travers ce chantier en bateau, ce qui me chagrine. On m’arrêterait tout de suite.

Toute cette matinée, je doute de mon projet. Je sens que l’on ne va pas m’autoriser à flotter sur la Liffey, je ne sais pourquoi. Chaque fois que j’aperçois des escaliers qui permettraient d’accéder à l’eau, des grilles et des panneaux en bloquent l’entrée.

J’arrive à la Maison des Douanes (Custom House), bâtiment très connu de Dublin. Il est originairement plus lié à la mer qu’au centre-ville, mais depuis le XVIIIe siècle où il a été construit, la ville s’est étendue vers l’est, empiétant sur la mer. Les docks sont apparus et ont repoussé les limites de la ville.

C’est là que le quartier des docks commence et c’est que les opportunités d’atteindre le fleuve se multiplient. J’élis un vieil escalier, au bas duquel mouille un bateau à moteur.

Je déplie mon drakkar de poche et pompe avec enthousiasme. Des gens me prennent déjà en photo. Un homme en veste fluo vient vers moi mais ne fait aucun commentaire sur mon bateau. Il va simplement dans le sien, allume le moteur et va vers le chantier du nouveau pont. Il revient quelques minutes plus tard, lorsque mon bateau est presque prêt. J’assemble les rames en plastique.

Une excitation indicible m’étreint. L’homme me souhaite bonne chance, sans trouver rien de farfelu à mon projet, semble-t-il.

Lorsque je suis sur le point de me lancer à l’eau, que j’enfile mon gilet de sauvetage, un bateau mouche passe et s’arrête à ma hauteur. Aucune voix ne m’intime l’ordre, par haut-parleur, de rentrer chez moi. Non, les touristes s’arrêtent pour me photographier.

4 commentaires sur “Traversée de Dublin en bateau gonflable (2)

  1. On t’imagine bien en train de bomber le torse sous ton gilet de sauvetage, fièrement campé dans une pose martiale sur les docks de la Liffey, face à ton destin. C’est la renaissance de l’esprit Viking, modeste, fier et impavide. Thurold le Rouge et tous tes ancêtres sont avec toi sous l’acier de ton casque volontaire.

    J’aime

  2. «  »…On t’imagine bien en train de bomber le torse sous ton gilet de sauvetage, fièrement campé dans une pose martiale sur les docks de la Liffey, face à ton destin. C’est la renaissance de l’esprit Viking, modeste, fier et impavide. Thurold le Rouge et tous tes ancêtres sont avec toi sous l’acier de ton casque volontaire… »
    Je retrouve bien là le complexe réducteur et mesquin de faux frère .

    J’aime

  3. « Viking modeste, fier et impavide », voilà qui me plaît bien, et qui ressemble tout à fait à ce que mon corps était devenu à la fin de ma descente, que je m’en vais raconter incontinent.

    J’aime

Laisser un commentaire