Arbrealettres

Poésie

Ma renarde (René Char)

Posted by arbrealettres sur 26 avril 2018




    
Ma renarde, pose ta tête sur mes genoux.
Je ne suis pas heureux et pourtant tu suffis.

Bougeoir ou météore,
il n’est plus de coeur gros
ni d’avenir sur terre.

Les marches du crépuscule révèlent ton murmure,
gîte de menthe et de romarin, confidence échangée
entre les rousseurs de l’automne et ta robe légère.

Tu es l’âme de la montagne aux flancs profonds,
aux roches tues derrière des lèvres d’argile.

Que les ailes de ton nez frémissent.
Que ta main ferme le sentier
et rapproche le rideau des arbres.

Ma renarde, en présence des deux astres, le gel et le vent,
je place en toi toutes les espérances éboulées,
pour un chardon victorieux de la rapace solitude.

(René Char)

 

Recueil: Feuillets d’Hypnos
Traduction:
Editions: Gallimard

Une Réponse to “Ma renarde (René Char)”

  1. Renarde qui rêve
    ————

    En songe, on se construit un cosmos bien à soi,
    La renarde, elle aussi, des mirages façonne ;
    Elle entrevoit un prince et son âme frissonne,
    Mais ce n’est qu’au réveil qu’elle s’en aperçoit.

    Ce rêve reviendra, qui sait combien de fois ?
    Mirages intérieurs, reflets que l’on moissonne,
    Univers où se fond l’une à l’autre personne ;
    Entrer dans un tel jeu, c’est un acte de foi.

    L’aviateur prend congé de son étrange prince,
    L’un rejoint sa planète, et l’autre, sa province ;
    Pour eux deux, c’est un deuil qu’il faut apprivoiser.

    Le fatal serpent dit « Cette enveloppe est vide,
    Vos destins, cependant, se sont entrecroisés,
    Comme ceux des héros d’un poème d’Ovide. »

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