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Publié par fxg

Edwy Plennel, fondateur de Médiapart, "le premier journal à défendre un modèle sans publicité, ne vivant que du soutien de ses lecteurs sur abonnement, une nouvelle presse un peu sérieuse, de référence, de qualité et indépendante sur Internet". Ce lundi, il inaugure, au lycée Joseph-Gaillard de Fort-de-France, la 26e semaine de la presse et des médias à l'école en présence de la rectrice qui en a fait son invité d'honneur. Il rencontrera ensuite durant toute la semaine des élèves et des professeurs à Sainte-Marie, à Bellevue, Rivière salée... pour parler liberté de la presse et liberté d'expression, journalisme d'investigation et presse numérique. Quatre rendez-vous sont ouverts au grand public.

Interview

Le thème de la 26e édition est : "la liberté d'expression, ça s'apprend !" renvoie aux attentats de janvier...

Sous le choc de Charlie Hebdo, il est très important de dire que c'est un crime immense de type fasciste que de tuer des gens parce qu'on n'aime pas ce qu'ils dessinent, ce qu'ils pensent... Il est important d'être solidaire, évidemment, face à ce geste effroyable de tuer des gens qui font des petits crobars dans leur coin pour quelques milliers de lecteurs. Et nous devons dans le moment actuel combattre tous ceux qui voudraient s'appuyer sur cet événement pour nous entraîner dans une virulence nouvelle contre les musulmans, les noirs, les immigrés ou les étrangers car l'autre aspect des attentats, c'est qu'on a tué des français, des gens vivant en France parce qu'ils étaient nés juifs, parce qu'ils étaient juifs, au nom de leur identité. Tuer pour des idées ou une identité sont deux crimes politiques, quels que soient les auteur, ils ne peuvent pas ne pas être condamnés.

Dans la préface de votre livre Pour les musulmans, réédité après les attentats, "Lettre à la France", vous défendez l'idée des causes communes. Quelles sont-elles ?

Il s'agit de tendre la main, de créer des relations pour éviter la guerre des identités qui est le piège que nous tendent aussi bien les totalitaires de l'Etat islamiques que l'extrême droite raciste en France. Si on veut ne pas être entraîné dans la guerre des mondes, des civilisations, le choc des religions, il faut s'appuyer sur les causes communes de l'égalité, du respect mutuel, du refus d'un monde qui ne vivrait que sur l'insulte, la blessure. Le monde que je propose est celui des causes communes de l'égalité des droits sans distinction d'origine, d'apparence et de croyance. C'est ça qui est important dans le moment actuel.

A la suite des attentats de janvier, Joëlle Ursull a écrit une lettre au président de la République pour dénoncer une hiérarchisation des mémoires de la Shoa et et de l'esclavage. Avez-vous entendu cela ?

Causes communes, ça veut dire ne pas tomber dans la concurrence des victimes, dans la rivalité des mémoires. ; tout reconnaître, tout regarder en face et ne pas créer de hiérarchies entre les blessures, les crimes, l'esclavage, les déportations, les génocides...

Certains s'interrogent au sujet de la liberté d'expression pourquoi personne n'a défendu l'humoriste français qui avait caricaturé un colon israélien déguisé en nazi sur France 3 en décembre 2003, alors que tout le monde s'est levé pour défendre les dessinateurs de Charlie qui ont caricaturé le prophète...

Il faut tenir les deux bouts. D'un côté il y a un droit à un genre très particulier qui est la caricature. La caricature, c'est certes l'excès, forcer le trait, l'ironie, la moquerie, mais ça ne doit pas être d'insulter, injurier, blesser... La caricature, c'est fait pour faire rire, pour moquer les puissants, surprendre, étonner. Si c'est une pure méchanceté, si c'est une insulte, une injure, la caricature passe du côté de l'idéologie, du côté de la violence et de la virulence. Il y a eu dans l'histoire de France, des caricatures racistes, le bon nègre Banania le Juif lié à l'argent et au gros nez. Défendre la liberté d'expression n'empêche pas d'avoir un débat critique sur l'excès qu'est la caricature. On ne peut pas vivre sous le règne de la caricature de chacun d'entre nous. On doit respecter ce qu'est l'autre, sa croyance, son identité... On ne doit ni le moquer, ni l'insulter autrement on ne peut plus vivre ensemble.

Malgré vos activités professionnelles, vous prenez beaucoup de temps pour vous adresser à la jeunesse et à votre public, pourquoi ?

Le virtuel, c'est du réel. La presse numérique, bien plus me semble-t-il que la presse dans- laquelle j'ai travaillé pendant trente ans, nous fait prendre conscience de cette relation directe avec le public. Il réagit, il commente, il veut un lien physique. C'est-à-dire que le virtuel n'est pas abstrait, c'est une relation concrète avec les lecteurs... cette relation avec le public, c'est aussi une façon de montrer que la révolution numérique n'est pas synonyme forcément de baisse de niveau, de régression de la qualité, de flux d'immédiateté, de n'importe quoi, d'inexactitude, de rumeurs, de violence. Nous démontrons au contraire qu'à l'heure du numérique, on peut comme le disait Albert Camus "élever son pays en élevant son langage".

Quel avantage voyez-vous au numérique ?

C'est un journalisme sans frontière, le numérique ! Nous atteignons un public très varié sur la planète entière. Sur Mediapart, nous prenons soin de traduire certains de nos articles en anglais et en espagnol, cela accroit la diffusion. Et puis, le numérique, c'est neuf. Ca ne fait que depuis vingt ans qu'il se développe... Il n'y avait pas les téléphones intelligents, les smartphones qui existent aujourd'hui.

Tout ça va très vite et en même temps, cela fait peur au pouvoir établi qui redoute ce bouillonnement, qui a peur du n'importe qui, de l'expression démocratique sur la toile et les réseaux sociaux. Je pense au contraire qu'il faut parier sur cette liberté en essayant de l'élever, de la tirer vers des enjeux démocratiques, collectifs, ceux des causes communes, ceux des solidarités plutôt que d'avoir peur de cette expression populaire qu'il y a sur internet. Au lieu de ça, les dominants, les oligarques, ceux qui croient savoir mieux que le peuple ce qui est bon pour lui, se crispent.

Propos recueillis par FXG, à Paris

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A
bravo nono, tu viens de donner la preuve irréfutable que Mediapart, c'est le seul endroit où c'est intéressant de lire les commentaires.
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N
Ceux qui s'empressent de défendre les antiracismes sont parfois ceux qui les organisent. Ils les défendent aux yeux des nouvelles générations avant même que ces "racismes" n'existent et ils produisent des phobies ethniques, probablement pour se satisfaire eux-mêmes. Il n'y a qu'à voir le sort qui est réservé aux espaces verts de nos grandes villes. L'herbe synthétique en remplace une, autrefois, beaucoup plus naturelle. Pourtant les nouveaux décideurs sont fraîchement issus de territoires où la nature naturelle a encore sa place. Les grandes figures du siècle sont Thierry Henry qui a su donner honneur de son talent en territoire Anglais (une statue en témoigne)... et Lacazette qui permet lorsqu'il joue à la ville de Lyon (à bas prix, il est généreux) de figurer au podium de la ligue. Le fait qu'aux yeux des moins experts les mérites d'Alexandre ne soient pas commentés démontre qu'ils sont évidents. Médiapart est une feuille de choux numériques plutôt "fouille-caca" consensuel qui taquine quelques membres d'une même équipe. Ce n'est pas ce qui peut nourrir les natifs (ou non) du territoire France et dépendances. Un des véritables talents d'Edwy serait sa moustache. Peut-être un jour à la Une de Médiatropical les photos ou dessins de la rencontre d'une moustache et d'une barbe......
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