La Vis, à la découverte d'une des plus belles rivières de France.
S'il y en a une qui me fait rêver depuis des années, c'est bien elle, la Vis. Rivière mythique du sud de la France aux reflets d'émeraude et aux berges quasi inaccessibles sur des kilomètres. Oasis de vie au milieu des causses arides, à l'ambiance préhistorique et aux truites aussi belles que difficiles. Voilà ce qu'il se dit dans les reportages. Rien de plus stimulant pour le rêveur que je suis, toujours en quête d'aventure. Certains disent également que si l'on est capable d'attraper une truite dans les eaux limpides de la Vis, on est capable d'en attraper partout ailleurs. C'est donc bien déterminé que je réussi à motiver les frangins "Dédé et Hugo" à relever le défi et entreprendre une session dans le sud de la France.
Après des mois d'impatience, nous voilà prêts à prendre la route pour une dizaine de jours en montagnes. Au programme : deux jours en Lozère que l'on connait bien pour y avoir effectué plusieurs séjours depuis 2010. Trois jours sur la Vis et le reste dans les Pyrénées, dont nous parlerons plus tard. Le camion est chargé : matos de pêche à la mouche, au leurre et au toc mais également de quoi bivouaquer et camper un jour sur deux. Nous voilà prêts à quitter notre Normandie pour 6h30 de route en direction de Florac, de quoi déguster les dernières sélections reggae et faire quelques plans sur la comète.
Après 2 jours passés en Lozère sous la pluie et les rafales de vent, nous arrivons dans l'après-midi au cirque de Navacelles, sur le territoire des causses et des Cévennes, inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO. La vue est à couper le souffle. On se sent tout petit. Je tiens à préciser que l'ensemble des images illustrant cet article, a été réalisé avec nos téléphones portables.
Le cirque de Navacelles créé par les anciens méandres de la Vis, entre deux nuages. C'est dans le fond de ces gorges que l'un des derniers écosystèmes les plus purs du pays, a su échapper à l'archarnement des consommateurs que nous sommes. La culture et l'élevage y étant quasiment impossible, l'eau qui s'y écoule y est des plus pures et alimente un écosystème unique en France.
Nous sommes loin d'avoir eu les conditions climatiques idéales à notre arrivée : un ciel couvert et beaucoup de vent, sans parler du niveau de la rivière dont les pluies des semaines passées avaient bien gonflés le lit. Une première approche peu prometteuse et pas très encourageante. Bref le temps est pourri mais les rêves donnent de l'ambition et nous avons quelques heures avant que le soleil se couche. Équipés, c'est parti, le défi de toucher une truite de la Vis est lancé.
Nous voilà donc partis à l'aventure en direction des gorges de la rivière dans un secteur très difficile d'accès. Le but étant de s'éloigner des sentiers battus, la Vis étant victime de sa réputation. Nous sommes entre Navacelles et St Maurice Navacelles. Après une demi heure de marche à longer les gorges nous décidons d'abandonner le sentier et de descendre à pic en direction du lit de la rivière. Un câble métallique permet de descendre tout en maîtrisant l'éboulement des pierres sur le sol. Attention, une bonne condition physique est obligatoire pour ce genre de parcours car si la descente est difficile, elle n'est rien à coté de la remontée.
Après quelques gaufres et acrobaties à cause de l'éboulement des pierres, n'est-ce pas Hugo? Nous voilà enfin arrivés au bord de la rivière. Le temps est vraiment pourri, mais wouha... C'est obligé, il doit y avoir des truites partout ici. On ne se fait pas prier. Les premiers coups de leurres, les premières dérives avec à chaque lancé, le soufle coupé par la certitude qu'une belle zébrée va venir nous offrir notre première cartouche d'adrénaline.
Que dalle...!! Aucune touche, pas l'ombre d'une truitelle. La rivière semble vide de toute vie. Du vent, de la pluie fine et pour ma part, une grosse frustration. Donc très peu de photos de ce secteur pourtant très beau. Nous avons très vite était bloqués ; dans ce secteur des gorges, les berges sont presque impossible à longer. Les paroies rocheuses et la végétation y étant tellement denses qu'on ne peut remonter le parcours qu'en passant par le lit de la rivière, et à moins d'être équipés de tenues de plongées, nous n'avons d'autre choix que de rebrousser chemin. Notre première approche est un échec total. Tant d'efforts pour n'apercevoir aucune nageoire. Dégoutés, pas le choix, demi-tour.
Une remontée très éprouvante, tant par le poids de la déception que par l'effort à fournir pour remonter jusqu'au sentier.
Quand tu réalise que ce genre de pêche c'est du sport, surtout quand tu marche plus d'une heure, que tu descends les rocheuses en rappel sans être équipé pour, et tout ça pour n'attrapper aucun poisson. La leçon du jour ; quand tu découvre une rivière, commence par un des secteurs les plus accessibles. Hugo ci-dessous, une fois remonté au sentier, après un effort sur-humain.
Sur le retour vers le camion. Le paysage et la vue remontent le moral qui serait au fond des waders si l'esprit de voyage et de découverte n'était pas la première motivation. On a beau dire pour se consoler que l'essentiel est de passer de bons moments au bord de l'eau et que le poisson reste un prétexte pour découvrir et passer du temps dans la nature. Mais là, il faut admettre qu'une petite truite aurait fait plaisir à voir et nous aurait peut être fait oublier le "temps de merde" qui nous suit depuis la Lozère. Mais on dirait bien que les truites de la Vis se méritent et ne se livrent pas aux premiers touristes venant sur ses berges, et heureusement. Mais il nous reste deux journées complètes à passer sur la rivière pour espérer toucher quelques truites. En attendant, il faut trouver où poser la toile de tente.
Nous irons camper à la ferme sur le plateau. Le lendemain après un bon repas chaud, une bonne nuit et une bonne douche chaude, le moral remonte avec l'arrivée du soleil. Le vent semble s'être calmé, une note d'espoir ensoleillé sur le joli paysage cévenol qui borde la ferme. C'est à ce moment du séjour que la belle aventure devrait commencer, nous avons hâte de retrouver les berges de la Vis sous ce beau soleil méditerranéen.
C'est une toute autre journée qui s'annonce. Après trois jours de galère, le soleil pointe enfin le bout de son nez et libère, en tapant sur le sol humide, les doux parfums du printemps. Il donne aux eaux cristallines de la rivière, des reflets turquoises. Le paysage envoie du rêve. On croirait voir les rivieres des reportages slovènes. Une ambiance ensoleillée dans un milieu aussi sauvage et préservé nous assure déjà une journée merveilleuse. Elle semble en tous les cas bien plus prometteuse que celle de la veille.
Nous avons dû gagner une dizaine de degrés et il fait bon vivre ce matin. On a une revanche à prendre sur dame nature, et aujourd'huis, ni le vent, ni la pluie, ne serviront d'excuse à une éventuellle bredouille. Nous nous rendons au pont submersible, au dessus du parcours No Kill. Après avoir discuté avec un habitué qui nous accompagnera sur la remontée du parcours, nous pêcherons l'eau en sèche et Hugo au leurre. C'est parti !
Et enfin, les premières petites truites de la Vis, prises en sèche. Ca ne semble pas grand chose, mais après l'echec de la veille et les conditions météo des jours précédents, aussi petits qu'ils soient, ces poissons sont énormes sur le plan émotionnel. Et dans ce cadre...
Pause de midi au cirque de Navacelles. Après une bonne matinée de marche à remonter le lit de la rivière, rien de tel qu'une bière bien fraiche en terrasse, accompagné du bruit des cascades, sous le soleil à l'auberge. Une matinée réussie. Un temps magnifique sur un parcours magnifique. A la vôtre les frangins!
Le pont Romain et les cascades qui le précèdent au cirque de Navacelles, "le" site incontournable et le plus touristique qui borde la rivière.
On mange près du pont Romain, un espace agréable avec une table en pierres à disposition, au top. Une Heineken, des rillettes cévenoles et du pain frais, que du bonheur et au bord de l'eau. Mais on se dépêche, on a aperçu du haut du pont, une jolie truite en pleine activité. Pas un monstre, mais pas loin de 35 cm. Le coup est assez difficile, un lisse d'environ 50 centimètres de profondeur. Le poisson est sous une petite branche qui vient doucement lécher la surface de l'eau en créant un sillon qui me servira de repère. Je ne peux pas approcher cette truite et compte sur l'oeil de mes collègues qui me guident du haut du pont. J'opte pour une émergente que je vais devoir poser un bon mètre en amont de cette branche en espérant qu'elle soit gobée avant de s'y accrocher.
Après deux passages parfait elle me fera deux refus. Je pense que sur ce lisse, le 12 centièmes qui me servait le matin même à pêcher l'eau dans les rapides, est trop gros pour ce lisse. Je passe donc en 10 centièmes et remet mon émergente. Bingo, au premier passage la belle se saisit de mon imitation. Ferrage, contact!!
La belle m'offre une grosse baston avant de finir dans l'épuisette. Ca y est, je l'ai ma belle de la Vis, Génial..! Et même si elle n'est pas énorme, c'était un poisson actif mais difficile à atteindre. Je suis comblé, heureux comme un gosse (même si ça ne se voit pas sur cette photo). Les poissons de cette rivière sont de vraies bombes, dans tous les sens du terme. Leur robe et leurs zébrures méditerranéennes sont splendides, leur mimétisme est allucinant. Quelques photos en vitesse sans trop la sortir de l'eau, et remise à l'eau de cette merveille sans le moindre bobo, merci ma belle. Quoi qu'il puisse arriver après cela, pour moi ça y est, ma session est réussie.
L'après midi nous remonterons le parcours en amont du pont romain, un parcours relativement étroit et difficile à pêcher à cause des nombreux lisses. La végétation rivulaire rend impossible la pêche du bord et le niveau d'eau est en moyenne d'un mètre, donc très difficile d'évoluer dans le lit sans faire fuire les truites. Mis à part tenter quelques lancés arbalettes pour essayer de leurrer les quelques truites visibles de la rive, il faudra marcher de rapide en rapide pour pouvoir sortir la soie.
C'est au tour d'Hugo, d'attraper sa première truite de la Vis. Petite, mais truite de la Vis quand même et pour un débutant, c'est une grande source de motivation. Car loin d'être passionné par la pêche Hugo est avant tout ici dans un esprit de voyage, d'aventures et de découverte. Il nous accompagne canne à la main "pour le délire" c'est donc un "must" de pouvoir accrocher une truite de temps en temps et qui plus est, de la Vis. Monsieur...!
Un dernier verre à l'auberge pour cloturer cette belle journée ensoleillée et nos premières truites de la Vis, santé...
Le jour suivant, nous irons sur le parcours "No kill" en aval du pont submersible. Un parcours sublime, quelques images pour résumer cette journée.
Nous aurons la chance d'assister à une éclosion de mouches de mai pour le coup du soir. Un super moment dans une ambiance de rêve. Temps et température parfaits, presque pas de vent, des truites en activité, merveilleux. Nous resterons sur les lieux pour un bivouac au bord de la rivière.
Pour notre dernier jour sur la Vis, nous retournerons tenter notre chance en nous éloignant une nouvelle fois des sentiers touristiques. La météo nous annonce une belle journée et j'aimerais vraiment découvrir la rivière dans sa partie la moins accessible et la plus reculée. Là où seuls les gens du coin et les plus déterminés se lancent dans sa partie la plus sauvage, là où dans mes rêves la rivière foisonne de truites. Nous voilà donc repartis pour environ une heure de marche sur le sentier avant de trouver un accès pour descendre au bord de la rivière.
Les ruines de vieilles constructions le long du sentier. Nous trouverons juste après ces ruines, un accès pour descendre au bord de l'eau. Quel bonheur d'apercevoir cet oasis après une heure de marche dans la garrigue. Nous avons dépensé moins d'énergie cette fois-ci que lors de notre première approche. Nous arriverons sur une petite plage de galets..
Le temps de boire une petite biere pendant qu'elle est encore fraîche (pas de préjugé il est presque 11h30), d'enlever nos tenues de marche et d'enfiler nos waders (pas question de faire une heure de marche rythmée en waders) et c'est parti. En route pour la remontée des gorges.
Nous prendrons quelques truites plus petites que celles qui nourissaient mes rêves, mais elles sont magnifiques et se méritent. Car en pleine journée sous un soleil de plomb, elles nous voient arriver à des kilomètres. Le décor quant à lui est grandiose et vaut la peine de marcher une bonne heure et de crapahuter à travers les blocs de roches et la ripisylve. Sur certains secteurs, la rivière aux reflets d'émeraude crée des piscines naturelles bordées de plages de sable, donnant presque envie d'y plonger tellement l'ambiance s'y prête. Si la temperature de l'eau n'était pas de 11 degrés.
11 degrés. Une température qui n'aura pas empeché Hugo de s'y lancer. En effet mon petit frère semble n'avoir qu'une parole et je pense qu'il a mis son courage à rude épreuve quand l'eau glaciale lui a atteint les parties génitales. Mais il l'a fait. Le grand plongeon dans les gorges de la Vis. Respect. Je pense que tu t'en souviendra longtemps...
Notre aventure et découverte des gorges de la Vis s'achève ici. Nous rebrousserons chemin en fin de journée en galérant un peu à travers la garrigue, pour retrouver le sentier. Nous avons découvert plusieurs secteurs aux profils différents. Certains plus à notre goût que d'autres. Les conditions du moment jouant un rôle important. Il nous reste encore beaucoup de secteurs à visiter et de supers moments à passer sur cette magnifique rivière. Nous reviendrons, c'est une certitude. En attendant, nous sommes à la moitié de notre séjour en montagne dans le sud de la France et demain matin nous prendrons la direction des Pyrénnées, pour de nouvelles découvertes et de nouvelles aventures.
A très bientôt.